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"Tipflation" : aux Etats-Unis, les clients protestent contre l'inflation... sur les pourboires

Les tarifs augmentent, et y compris ceux des pourboires : les consommateurs américains ont le sentiment de devoir payer des "tips" de plus en plus élevés pour de moins en moins de services.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des billets en dollars américains. (Stéphanie Berlu /Radio France)

C'est un nouveau mot qui s'entend de plus en plus aux Etats-Unis : "tipflation". "Tip" pour pourboires, "flation" pour l’inflation, parce que depuis plusieurs mois, le consommateur américain a le sentiment qu’on lui demande des pourboires de plus en plus élevés pour de plus en plus de services. Un effet de l’inflation qui a suivi la pandémie de Covid.

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Mais il faut rappeler que la culture du pourboire aux Etats-Unis est différente de celle de la France, ce que peut constater n'importe quel voyageur. Dans un restaurant américain, il y a une différence significative entre le prix affiché sur le menu et ce que vous versez pour l’addition au final. D'abord, parce que le prix affiché ne tient pas compte des taxes, environ 10% et la plupart du temps, le service n’est pas inclus comme en France. Donc il faut ajouter au moins 15% de pourboires, plus si on est très satisfait. Une pratique habituelle pour un Américain qui sait calculer de tête un pourboire. 

Un "tip" demandé dans de plus en plus de secteurs

Mais, dans la presse américaine, ces derniers mois, se multiplient les articles relayant les plaintes de consommateurs. Ils estiment qu’on attend d’eux plus que les 15% de pourboires habituels pour un serveur, payé au salaire minimum – qui en plus va différer d’un Etat à l’autre : un peu plus de 15 dollars par heure en Californie, contre 7 dollars 25 dans l’Idaho, par exemple. Mais il semblerait aussi que depuis la pandémie, quand les gens trouvaient normal de récompenser les travailleurs dits essentiels, de plus en plus de prestataires de services s’attendent eux aussi à un pourboire.

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Dans un café où vous commandez et récupérez votre boisson au comptoir, quelle est la réalité du service ? Surtout lorsque le pourboire est demandé au moment où vous payez, c’est-à-dire avant de recevoir ce service. Une option mise en place notamment par Starbucks, pour satisfaire en partie ses employés, qui, ces dernières années, ont multiplié les efforts pour se syndiquer.

Des pourboires partout, tout le temps

Mais est-ce au consommateur de subventionner en quelque sorte le salaire des employés ? Sur les réseaux sociaux, une jeune femme, choquée, a raconté qu’on lui avait demandé un pourboire à un drive-in, pour une commande qu’on lui a juste tendue à travers la fenêtre de sa voiture. Une autre dit qu’on lui a proposé de payer un "tip" dans une boutique vendant des lunettes de soleil.

Le site de financement participatif GoFundMe demande lui aussi des pourboires pour aider la plateforme, en plus de l’argent que vous donnez pour le projet qui vous intéresse. Et dans ce cas-là, vous donnez un pourboire à une machine, pas à une personne. Le site Vox a aussi recensé des tips dans les stations de lavage automatique ou encore chez un vendeur de produits dérivés lors d’un concert. Le risque, c’est de voir une autre expression se répandre, la "tip fatigue". La lassitude des pourboires. 

Le "guilt tipping", le pourboire donné par culpabilité

Depuis la pandémie, beaucoup de magasins sont passés au paiement via une tablette, un système qui existait avant le Covid. C’est pratique, car vous n'avez pas besoin de manipuler de l’argent liquide. Et à la place d’avoir un gobelet sur le comptoir où vous laisseriez de la monnaie – persona non grata depuis la pandémie – l’écran de la tablette vous suggère des options de pourboires, qu’il a calculées pour vous. Mais les suggestions commencent parfois à 18% plutôt qu’à 15%.

Et derrière vous, dans la file d’attente, tout le monde peut voir le montant que vous choisissez. Alors encore un terme pour vous : le "guilt tipping", le pourboire qu’on donne par culpabilité. L’option "pas de pourboire" ou celle qui permet de décider vous-mêmes du montant sont un peu plus dures à trouver sur l’écran : peut-être parce que les spécialistes de la consommation confirment que si vous demandez plus, vous obtenez plus en général. Et peut-être aussi parce que les entreprises qui conçoivent ces systèmes de pourboires numériques – Square, Toast ou Clover – prélèvent, dans certains cas, une commission sur tous les paiements effectués.

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