Larcenet dessine bien le mal
Manu Larcenet dit qu’il a éprouvé une évidence à mettre en bande dessinée le roman de Philippe Claudel Le Rapport de Brodeck . Évidence de l’humidité : Les scènes de nuit, les paysages de neige, les huis clos qui sentent le renfermé. Evidence des hommes, aux visages marqués, tavelés, ridés comme leurs consciences coupables. Evidence du noir et blanc qui au premier regard nous renvoie à son énorme roman graphique Blast , terminé l’an dernier. Dans Le Rapport de Brodeck , les pages les plus blanches restent noires.
Avouons-le : on attendait de Manu Larcenet un retour à la couleur. On espérait, pour lui comme pour nous, une bouffée de légèreté. Pourquoi s’attarder sur la douleur, dessiner l’indicible ? Le crime collectif et l’horreur des camps ? Sans doute, comme le personnage de l’étranger venu s’installer au milieu de la communauté, et dont on sait dès le début de l’histoire le funeste destin, Manu Larcenet veut-il "prendre la mesure du monde". Larcenet le fait à coups de pinceaux et prouve qu’on peut traduire un fleuve de mots par des pages de dessins souvent muettes. Comme cette dernière image arrêtée sous une pluie de flocons qui nous laisse en suspens. Il faudra donc attendre un an peut-être pour découvrir la suite et la fin du Rapport de Brodeck aux éditions Dargaud. Disons que cela nous donne l’occasion de lire ou de relire, huit ans après sa sortie, le roman de Philippe Claudel. Lequel nous parle du mal et de sa banalité sur laquelle avait travaillé après la seconde Guerre mondiale, à l’occasion du procès Eichmann, en Israël, la philosophe Hannah Arendt.
Un grand destin de femme
Racontée en BD par Béatrice Fontanel et Lindsay Grime, Hannah Arendt, c'est une intelligence,une force de travail, une intégrité mise au service de la pensée pour dire le totalitarisme et les maux du XXe siècle ! Et quelle femme, vivante, amoureuse, enflammée, moderne. Elle apparait ainsi, intense, dans les petites cases de ce petit livre bleu : Hannah Arend t, chez Naïve livres.
Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Lætitia de Germon de la rédaction de franceinfo.fr. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Lætitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.
Poison city , de Tetsuya Tsutsui, chez Ki-oon
Tokyo 2019. Un peu moins d’un an avant l’ouverture des Jeux olympiques le Japon veut donner de lui une image parfaite. Une vague de puritanisme exacerbé s’abat sur tout le pays, cristallisée par la multiplication de mouvements autoproclamés de vigilance citoyenne. Aucun mode d’expression n’est épargné et Mikio Hibino, un mangaka de 32 ans, va devoir composer avec la censure pour publier un manga d’horreur ultra-réaliste, Dark Walker .
DansPoison city , Tetsuya Tsutsui (Prophecy , Manhole, Duds Hunt ) s’intéresse à la liberté d’expression et à la censure dont il a lui-même été victime. Son manga Manhole est actuellement censuré dans le département de Nagasaki. Dans Poison City , Tetsuya Tsutsui dévoile les coulisses et l’absurdité du système de censure japonais, ainsi que les nombreuses pressions extérieures qu’un auteur subit tout au long du processus de création.
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