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BD bande dessinée. L'innocence perdue

Chloé Cruchaudet revisite l'épisode médiéval de la Croisade des enfants pour en tirer un récit initiatique cruel.

Article rédigé par franceinfo, Jean-Christophe Ogier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
DEUX REGARDS D'AUTRICES SUR L'INNOCENCE PERDUE (CHLOE CRUCHAUDET, NOCTAMBULE / NORA KRUG, GALLIMARD BD)

Au XIIIe siècle, plusieurs milliers d’enfants prirent la route du sud dans le but de se rendre en Terre Sainte pour libérer Jérusalem. Nombre d’entre eux étaient partis de ce qu’on appelle aujourd’hui l’Allemagne, d’autres du royaume de France. De cet épisode, on sait peu de choses.

Un Moyen-Âge violent

En s’inspirant de cette Croisade des enfants, la dessinatrice Chloé Cruchaudet imagine une fable cruelle, l’histoire d’une folle espérance. A la plume, au lavis, Chloé Cruchaudet dessine un Moyen-âge où les rares couleurs sont celles des églises bariolées.

Le Moyen-Âge n’est pas forcément une période sombre, morbide, atroce, cruelle. Mais j’avais besoin que l’on sente que, pour ces enfants, le départ et le voyage étaient une question de survie.

Chloé Cruchaudet

Nés dans la misère, Colas, Camille et tous les autres vont croire ou feindre de croire que Jésus Christ les guide sur un chemin que les adultes, forcément méchants et brutaux, ne peuvent pas comprendre.

La foi qui sauve et peut vous perdre

D’un hiver à l’autre, ils feront tout pour rester unis, solidaires, purs et glabres. Les poils, c’est pour les grands. Portés par une foi inébranlable, ces enfants-là sont  prêts à gober sornettes et billevesées. Et l’on ne peut s’empêcher de penser aux gosses d’aujourd’hui partant pour le djihad.

Même s’il y a un décalage d’un millier d’années, cela participe de la même démarche. C’est-à-dire comment on peut farcir le cerveau de jeunes immatures pour leur faire commettre des choses insensées.

Chloé Cruchaudet

La Croisade des innocents,  de Chloé Cruchaudet, sous le label Noctambule.

Si loin de l'Allemagne

Les Allemands nés après la Seconde Guerre Mondiale sont nombreux à continuer à porter le poids de la culpabilité de leurs ainés. Ils ont du mal à composer avec l’amour de leur pays, la tendresse que leur inspire ses traditions, ses paysages, sa brillante culture, face à la mémoire de l’irréparable, quand tout un peuple a commis les pires crimes. Ce mal-être identitaire insoluble nourrit le travail de l’Allemande Nora Krug, aujourd’hui installée aux Etats-Unis. Sur près de 300 pages, ses dessins fouillent le passé, auscultent le présent.

Heimat, loin de mon pays, chez Gallimard BD est en sélection pour les prix du prochain festival d’Angoulême.  

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