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"Requiem pour la classe Moyenne" d'Aurélien Delsaux et "Ces Gens-là" de Chico Buarque

"Requiem pour la classe Moyenne" d'Aurélien Delsaux aux éditions Notab/lia, et "Ces gens-là" de Chico Buarque, chez Gallimard, sont les deux romans choisis par Gilbert Chevalier pour "A livre ouvert".
Article rédigé par Gilbert Chevalier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le dernier roman d'Aurélien Delsaux paru chez Notab/lia. (NOTAB/LIA)

Requiem pour la classe moyenne d'Aurélien Delsaux aux éditions Notab/lia, et Ces gens-là de Chico Buarque, chez Gallimard, ce sont deux romans aux formes et aux thèmes très différents l'un de l'autre, et pour leur point commun : une forme d'humour particulière. On pourrait l'appeler l'ironie, qui consiste à prendre un petit pas de côté, on va dire la distance nécessaire pour supporter des événements dramatiques ou le désespoir qui vous habite.

Et constatons qu'en littérature, l'humour n'est pas le mode le plus utilisé, le plus exploité par les auteurs, plus inspirés et peut -être contaminés par la gravité des choses qu’ils décrivent. Et pourtant, dans Requiem pour la classe moyenne, Aurélien Delsaux pulvérise en 200 pages la vie d'une famille lambda, papa et maman et leurs deux enfants. Le déclic pour cette famille, apparemment normale, mais qui va devenir totalement dysfonctionnelle, c'est la mort de Jean-Jacques Goldman. Le drame absolu pour le père, alors qu'il rentre de vacances chez lui, à Lyon, avec sa famille parfaite et son apparent bien être.

Sa vie est confortable, routinière. Mais cette rentrée et la mort du chanteur vont tout faire dérailler, et on est embarqué dans ce naufrage, avec ce père qui ne comprend plus rien, ou qui découvre qu'il n'a jamais rien compris à rien. Et c'est avec une ironie dévastatrice qu'Aurélien Delsaux cible le mode de vie des classes moyennes bien installées, d'où le titre. Le vide, la vacuité de ces vies deviennent, sous la plume d'Aurélien Delsaux, une évidence. Et c'est absolument jubilatoire.

"Ces gens-là" de Chico Buarque. (GALLIMARD)

Ces gens-là de Chico Buarque 

Et il y a la même tonalité, dans un roman qui se passe à l'autre bout du monde, Ces gens-là de Chico Buarque, chez Gallimard, la même ironie, on pourrait dire. Chico Buarque nous emmène dans les pas d'un écrivain sexagénaire en panne d'inspiration, dont la vie affective, professionnelle et matérielle semble arriver dans une impasse totale.

Menacé d'être expulsé de son appartement dont il ne peut plus payer le loyer, il déambule dans Rio de Janeiro. Bolsonaro vient d'arriver au pouvoir. On est en 2018-2019. La narration oscille entre le roman épistolaire et le journal intime de l'écrivain, mais avec toujours ce regard distancié qui donne une saveur ironique au récit.

Ce roman de Chico Buarque est une critique élégante et plutôt drôle du Brésil d'aujourd'hui. Et c'est bien sûr savoureux de retrouver la plume de Chico Buarque, ce très grand musicien fondateur du mouvement tropicaliste au Brésil, avec Gaetano Veloso, Gilberto Gil, Tom Ze, Gal Gosta (mouvement engagé contre le régime militaire), et qui s'est mis à écrire à la fin des années 60.

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