À la carte. Portraits de chefs. "La desseralité" selon Jessica Préalpato
Les premières poires arrivent déjà, et c’est un fruit que Jessica Préalpato, sacrée meilleure pâtissière du monde l’an dernier, aime travailler.
Si la pâtissière de Barbara vend des petits gâteaux à la crème, ou des choux, comme on l’entend dans la chanson, Jessica Préalpato, elle, évite au maximum la crème, le beurre, les mousses, les choux et le sucre. Pour les desserts du trois étoiles d’Alain Ducasse, elle donne le premier rôle aux fruits. Après un bac littéraire et un bref épisode en faculté de Pau pour apprendre la psychologie, cette fille de pâtissier est rattrapée par son destin. Elle intègre le lycée hôtelier de Biarritz et entame son parcours d’apprentissage. À Èze avec Philippe Labbé, à Saint-Émilion auprès de Philippe Etchebest, puis à Paris chez Frédéric Vardon. C’est grâce à ce dernier qu’elle débarque chez Ducasse, où elle pleure trois fois. Quand l’entretien d’embauche dure trois minutes, quand elle réalise qu’elle est recrutée comme cheffe pâtissière, et quand elle confectionne son premier dessert pour le maestro qui lui lance : "C'est trop prout-prout, je ne goûte pas." L’anecdote, racontée dans Libération, fait aujourd’hui sourire Jessica qui dirige tout en douceur sa brigade des desserts.
Jessica Prealpato bouscule les codes
La desseralité, elle en a fait un livre pour expliquer que les fruits sont assez sucrés pour éviter de rajouter du sucre, qu’elle utilise tel le sel en cuisine, pour assaisonner. Jessica Prealpato bouscule les codes, préfère le goût au visuel, pousse ses compositions vers l’amertume et l’acidité. Certains la regardent de travers. Pourtant, moins de quatre ans après son arrivée dans le palace parisien, elle est sacrée meilleure pâtissière du monde par le 50 Best et meilleur pâtissière de l’année par le guide Gault-et-Millau.
Imaginez des cerises fraîches, rôties, vinaigrées et déshydratées associées à des chips de riz. Ou encore des quartiers d’abricots mariés à la rue officinale, un condiment très amer aux vertus médicinales. Pour vous, la cheffe a choisi de travailler les poires, dont la saison commence (recette ci-dessous).
Quant au restaurant d’Alain Ducasse, où officie Jessica Préalpato, il va bientôt rouvrir, le 2 septembre, après une longue pause estivale en raison de la crise sanitaire et de l’absence de clientèle internationale.
Ingrédients pour six :
Pour le biscuit : 1 œuf, 25 g de sucre non raffiné, 35 g de lait entier, 30 g d’huile de pépin de raisin, 50 g de semoule fine, 6 g de levure chimique, 15 g de farine complète, ½ zeste de citron, 100 g de miel d’arbousier, 8 g de jus de citron. Pour le dressage : 2 poires vertes (pas mûres), 1 citron, 1 sorbet à la poire, 200 g de purée de poires, 26 olives noires, 4 blancs d’œufs, du sucre non raffiné, poivre de Tasmanie.
Préparation :
Préparer la génoise en amont. Pour cela, blanchir les œufs et le sucre durant 5 minutes au fouet du batteur. Ajouter le lait et l’huile. Fouetter de nouveau 5 minutes. Ajouter la semoule, la levure, la farine et les zestes. Mettre en plaque graissée, cuire à 180°C pendant 10 minutes. Verser le miel chaud dessus. Finir de cuire (environ 5 minutes à 180°C°). Laisser tiédir et gratter le biscuit à la fourchette pour en faire un crumble.
Égoutter les olives de leur huile sur un papier absorbant. Les tremper à l’aide d’une pince ou fourchette dans les blancs puis dans le sucre (il faut bien les rouler dedans). Les mettre à sécher au four à 60°C. Elles doivent sécher mais rester moelleuses. Laisser refroidir.
Éplucher les poires, les tailler en brunoise, arroser du jus du citron, et poivrer. Laver les épluchures et les faire sécher au four à 60°C pour les mixer en une poudre fine.
Pour servir, dresser le crumble de biscuit en longueur dans le fond de l’assiette. Égrener la brunoise de poires. Avec deux cuillères, former une quenelle dans le sorbet et la déposer par-dessus. Ajouter les olives au sucre. Finir avec la poudre de peaux séchées et la purée de poire.
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