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Grève des urgences : "Nous n'avons pas formé suffisamment de médecins depuis trente ans", dénonce Philippe Juvin

Le chef des urgences de l'hôpital européen Georges Pompidou, invité du "8h30 politique" vendredi, estime que le manque d'effectif est notamment la cause du nombre insuffisant d'urgentistes formés.

Article rédigé par franceinfo
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Philippe Juvin, chef du service des urgences de l'hôpital Georges Pompidou, invité du "8h30 politique", vendredi 16 août 2019.  (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

La grève des urgences qui est en cours depuis cinq mois est liée au "système qui fait que nous n'avons pas formé suffisamment de médecins depuis trente ans", a estimé Philippe Juvin, chef du service des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou à Paris et maire Les Républicains de La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine), invité du "8h30 politique", vendredi 16 août. Cinq mois après le début du mouvement, 220 services d'urgences sont en grève en France selon le collectif inter-urgences, là où le ministère de la Santé en recense 195. "Il y a moins de médecins aujourd'hui qu'il y a dix ans alors que la population a augmenté, vieilli et est plus malade", a dénoncé Philippe Juvin. 

Le chef des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou constate lui-même le manque de médecins dans l'exercice de ses fonctions. "Dans mon service, j'ai des postes vacants de médecins", a-t-il expliqué. "Je ne trouve pas de médecins parce qu'il n'y en a pas." Face à ce constat, les solutions proposées par le gouvernement, comme la fin du numérus clausus votée en mars et annoncée pour la rentrée 2020, "est une piste mais ce n'est pas suffisant". "La vraie question est de savoir combien de médecins va-t-on former", a-t-il jugé.

Il y a de plus en plus de monde qui vient aux urgences parce qu'il y a de moins en moins de médecins en ville

Philippe Juvin

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Dans ces conditions, le manque de médecins se répercute sur la médecine de ville et, in fine, sur les urgences, selon Philippe Juvin. "Il y a de plus en plus de monde qui vient aux urgences parce qu'il y a de moins en moins de médecins en ville", a-t-il expliqué, évoquant un équilibre entre les deux structure qui "dysfonctionne" et "s'essouffle". "Nous sommes en permanence sur un fil", a affirmé le chef du service des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou. "Dans la région Île-de-France, 25% des habitants n'ont pas de médecin traitant", a assuré le maire LR de La Garenne-Colombes. "Que font-ils quand ils sont malades ? Ils vont aux urgences." Il s'est dit convaincu que les patients "ne peuvent pas faire autrement" et a estimé que "si on ne change pas de système, ça va continuer à s'aggraver."

Les pistes pour désengorger les urgences

Alors que les services des urgences de France entament leur sixième mois de grève pour demander plus de moyens, Philippe Juvin a présenté plusieurs pistes pour résoudre les difficultés auxquelles est confronté le personnel. Il a notamment évoqué la possibilité de filtrer les arrivées en amont, sur le modèle danois. "Il faut d'abord téléphoner à un centre, parler avec un médecin ou un personnel paramédical qui dit si le cas nécessite ou pas d'aller aux urgences. S'il ne le nécessite pas, l'interlocuteur trouve un rendez-vous avec un médecin dans les jours suivants", expose-t-il.

Le chef du service des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou évoque aussi une différenciation des patients en fonction de l'âge. Il préconise un parcours dédié aux personnes âgées, "comme on a créé il y a vingt ans des services de gériatrie pour faire face au fait que la population vieillissait." Enfin, Philippe Juvin estime que l'engorgement des urgences vient aussi du manque de communication entre ce service et le reste de l'hôpital. "Je suis aveugle sur le nombre de lits effectivement disponibles dans mon hôpital", déplore-t-il. 

Retrouvez l'intégralité de l'émission "8h30 politique" du vendredi 16 août 2019 :

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