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Corse : les nationalistes à Matignon souhaitent "discuter de manière ouverte et loyale" affirme Jean-Guy Talamoni

Le président de l'Assemblée de Corse, reçu par le Premier ministre lundi, prévient toutefois qu'en cas de "déni de démocratie" du gouvernement, la Corse pourrait se mobiliser. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Jean-Guy Talamoni, président de l'Assemblée de Corse. (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

Le président indépendantiste de l'Assemblée de Corse, invité de franceinfo lundi 22 janvier, a précisé ses attentes, quelques heures avant la rencontre de l'exécutif corse avec le Premier ministre à Matignon.

"Un nouveau statut" demandé pour la Corse

Jean-Guy Talamoni, qui préside l'Assemblée de Corse depuis le 3 janvier, a assuré vouloir "discuter de manière ouverte et loyale" avec le gouvernement. Cependant, en cas de "déni de démocratie, nous serions obligés de demander aux Corses de se mobiliser dans la rue", a-t-il prévenu. "Nous n'avons pas mis de préalable", "nous voulons faire le crédit de la bonne foi de nos interlocuteurs", a toutefois tempéré Jean-Guy Talamoni.

Lors de l'entretien à Matignon, le président de l'Assemblée de Corse a dit souhaiter en priorité obtenir "l'introduction dans la Constitution française d'un dispositif pour la Corse permettant de déroger dans certains nombres de domaines (foncier, fiscal, linguistique, institutionnel…). Si nous ouvrons les portes au niveau constitutionnel, ensuite nous aurons tout le temps de discuter avec Paris de la loi organique, et là il y aura une négociation pour savoir où on met le curseur", a-t-il ajouté. Jean-Guy Talamoni a toutefois estimé que la Corse s'était fait de "solides ennemis au Conseil constitutionnel", regrettant une "application très rigoriste" de la loi "uniquement" à l'égard de l'Île de Beauté. 

L'exécutif corse souhaite obtenir "un nouveau statut" pour la Corse, avec un "pouvoir législatif dans de larges domaines de compétences, en matière économique, sociale, culturelle, aménagement du territoire", a indiqué Jean-Guy Talamoni. "Á peu près tout, hormis les prérogatives régaliennes pour l'instant", a-t-il ajouté. Jean-Guy Talamoni a dit espérer aussi inclure dans le débat, des sujets auxquels le gouvernement a fermé la porte comme la co-officialité de la langue corse et l'amnistie des prisonniers politiques. 

Affaire Erignac : de la "compassion" mais pas de présence à la cérémonie  

Le président indépendantiste de l'Assemblée de Corse, qui ne participera pas à l'hommage rendu au préfet Erignac le 6 février, 20 ans après son assassinat, a expliqué sur franceinfo avoir déjà exprimé sa "compassion de manière publique et claire", notamment dans sa dernière tribune publiée dans Corse-Matin dimanche. "Gilles Simeoni [président du conseil exécutif de Corse] a fait le choix d’aller à cette commémoration et moi j’ai dit pourquoi je n’y allais pas."

Jean-Guy Talamoni a souhaité pour sa part, "un hommage collectif rendu à tous ceux qui ont perdu la vie dans ce long conflit de 40 années". "Il n’y a pas eu que le préfet Erignac", a-t-il ajouté. "Je n'ai pas entendu - et ce n'est pas un reproche - un responsable de l'Etat marquer sa compassion à l'endroit de la mémoire des morts du mouvement national", a-t-il indiqué. "Il y a eu usage de la force des deux côtés. Aujourd'hui, nous avons fait un pas, et il n'y a pas eu un pas en sens inverse. Ce n'est pas du donnant donnant, mais il faut le temps."

La revendication d'"une loi d'amnistie"

Parmi les revendications figure, "dans un premier temps, le retour en Corse des prisonniers" incarcérés en métropole", a indiqué Jean-Guy Talamoni. Mais au-delà, le président de l'Assemblée de Corse, a dit souhaiter à terme "une loi d'amnistie" pour "une dizaine de personnes" incarcérées "pour des faits politiques". "Notre revendication à terme n'est pas qu'ils soient en prison en Corse ou ailleurs", a-t-il expliqué. "Partout dans le monde, quand un conflit a pris fin – et notre conflit a pris fin en 2014 – on en tire un certain nombre de conséquences, c'est pourquoi nous demandons à la France de discuter d'une loi d'amnistie", a-t-il développé.

Interrogé sur ces prisonniers susceptibles d'être amnistiés, Jean-Guy Talamoni a précisé qu'il ne s'agit que de "prisonniers politiques". "Ca ne concerne pas les affaires de gangstérisme", a-t-il ajouté. À la question de savoir si cette amnistie inclut le commando, qui a assassiné le préfet Claude Erignac le 6 février 1998, Jean-Guy Talamoni a répondu : "Oui, tout à fait".

"Des réserves" sur le verdict d'Yvan Colonna

Par ailleurs, Jean-Guy Talamoni a confirmé ses "réserves" sur le verdict prononcé contre Yvan Colonna, condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac. "Je suis avocat de profession, et je sais très bien que la vérité judiciaire n'est pas toujours la vérité. Je trouve qu'il y a des zones d'ombres qui sont impressionnantes, et je serai très réservé sur cette décision rendue par la cour d'assises", a-t-il déclaré.

Regardez l'intégralité de l'entretien de Jean-Guy Talamoni sur franceinfo le 22 janvier 2018.

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