Vidéo "J'ai frôlé la mort" : séquestrée et battue par sa belle-sœur, elle raconte deux années d'esclavage domestique

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"J'ai frôlé la mort" : séquestrée et battue par sa belle-sœur, elle raconte deux années d'esclavage domestique
"J'ai frôlé la mort" : séquestrée et battue par sa belle-sœur, elle raconte deux années d'esclavage domestique "J'ai frôlé la mort" : séquestrée et battue par sa belle-sœur, elle raconte deux années d'esclavage domestique (COMPLÉMENT D'ENQUÊTE / FRANCE 2)
Marion travaillait quinze heures par jour et dormait sur le carrelage, à la merci d’une belle-sœur qui la violentait. Dans cet extrait de "Complément d'enquête", voici le récit, éprouvant, de deux années d'enfer.

Marion a une oreille définitivement abîmée par les coups, qui ont écrasé son cartilage. C'est l'une des séquelles de deux années de séquestration chez son ex-belle-sœur, qui l'abreuvait d'insultes et la frappait presque chaque jour, explique-t-elle. Elle devait faire le ménage, la cuisine, les courses, s'occuper de cinq enfants. Quinze heures de travail par jour, gratuitement, sous une menace permanente, selon elle. 

Abandonnée par son ancien petit ami chez Alexandra, sa belle-sœur, Marion s'est d'abord bien intégrée à la vie de la famille. C'est quand le mari d'Alexandra l'a quittée que l'enfer a commencé, selon elle. Elle aurait été traitée en esclave pendant des mois, dormant "par terre au salon, sur des couvertures, sur le carrelage froid", et n'ayant droit à de la nourriture ou une douche que quand sa tortionnaire le décidait.

Travailler jour et nuit sans contrat ni salaire, être hébergé dans des conditions indignes… Aboli en France en 1848, l'esclavage reste une réalité pour des milliers de victimes. Selon les estimations du Global Slavery Index, elles seraient près de 135 000 dans le pays dit "des droits de l'homme". Exploitées et maltraitées le plus souvent à huis clos, elles ont du mal à fournir des preuves. L'infraction de "traite des êtres humains" est donc très difficile à caractériser.

"Nature de l'infraction : viol, séquestration avec actes de torture et de barbarie, violences aggravées"

Pourquoi Marion a-t-elle subi ce cauchemar si longtemps ? Pourquoi n'est-elle pas partie ? Elle met en avant sa santé fragile, le fait qu'elle n'avait plus ni voiture ni téléphone, sa peur aussi, de "représailles" de la part d'individus "dangereux" et "tous connus de la justice". Une expertise psychologique a par la suite décrit la jeune femme comme "porteuse de vulnérabilité" et pouvant "connaître des relations de dépendance, d'emprises négatives".

Pour "Complément d'enquête", Rola Tarsissi s'est rendue dans le lotissement où vivait la famille. Quand Alexandra a fini par être arrêtée, des scellés ont été apposés sur la porte de son pavillon. On peut encore y lire, sous "Nature de l'infraction" : "Viol, séquestration avec actes de torture et de barbarie, violences aggravées."

Comment Marion a-t-elle pu subir un tel supplice sans que personne n'intervienne ? Certains voisins ont confié à la journaliste s'être inquiétés des bleus sur son visage, mais Alexandra avait toujours une explication à leur fournir : "Elle fait de la boxe" ; "Elle est tombée"... Mégane, une ancienne amie intime d'Alexandra, avait pourtant des soupçons et s'en veut de ne pas avoir réagi plus tôt. Finalement, c'est elle qui sauvera Marion...

Un ultime épisode de violence qui a failli lui coûter la vie

Un matin de mai 2019, pour une simple histoire de shampooing, Alexandra se serait jetée sur Marion pour la rouer de coups. Elle l'aurait attachée avec un câble au radiateur du salon, à genoux, les mains dans le dos, déshabillée, et violée avec un rouleau à pâtisserie. "J'ai cru que j'allais crever, confie Marion. Il faut être inhumain pour faire ça."

Marion est en sang, mais Alexandra la force à s'habiller, et à venir avec elle faire le plein d'essence. Sa carte bancaire ne passe pas. Les agents de sécurité appellent les gendarmes, qui placent Alexandra en garde à vue pour défaut de permis. Marion en profite pour se réfugier chez Mégane, et la supplie de l'aider. En la voyant "toute bleue de la tête aux pieds", celle-ci est horrifiée. "Du sang qui avait séché entre ses jambes, des hématomes partout, partout, jusqu'en haut du ventre. Son visage, c'était affreux. Elle avait des balafres partout, elle avait sa petite oreille toute plissée, elle n'entendait pas, ni rien… C'était impressionnant." 

"On va prendre tes affaires, tu t'en vas", décide-t-elle en apprenant que c'est Alexandra qui lui a porté ces coups. Enfin libérée de l'emprise de sa tortionnaire, Marion retrouve sa famille, qui était sans nouvelles d'elle, et porte plainte. Le verdict du procès a été rendu en avril 2024 aux assises de Montauban : Alexandra est condamnée en appel à vingt ans de prison.

Extrait de "Exploités et maltraités : qui sont les nouveaux esclaves ?", un document à voir dans "Complément d'enquête" le 26 septembre 2024.

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