Vidéo "Affaires sensibles". En toile de fond de l'étrange agression de Maureen Kearney, une guerre des chefs au sein de la filière nucléaire française

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Affaire Maureen Kearney : en toile de fond de l'étrange agression d'une syndicaliste d'Areva, une guerre des chefs au sein de la filière nucléaire française (Affaires sensibles / France 2)
Article rédigé par France 2
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"Affaires sensibles" revient sur un dossier aux allures de polar : l'agression de Maureen Kearney. En décembre 2012, cette syndicaliste est retrouvée ligotée chez elle. Sur son ventre, gravée au couteau, la lettre "A". "A" comme "Areva", l'entreprise dont elle défendait les salariés ? Serait-elle une victime collatérale de la guerre qui oppose, ces années-là, les deux géants du nucléaire français, Areva et EDF ?

Le 17 décembre 2012, Maureen Kearney est retrouvée ligotée à son domicile, le ventre scarifié d'un "A"... "A" comme "Areva", l'entreprise où elle exerce d'importantes responsabilités syndicales ? Se serait-elle intéressée de trop près à des contrats secrets conclus entre la France et la Chine pour construire des centrales ? En 2011, elle avait alerté sur de possibles transferts des technologies d'Areva dans le cadre d'un contrat entre EDF et une entreprise d'Etat chinoise, qui auraient pu représenter une menace pour les savoir-faire d'Areva et ses emplois.

Deux chefs, deux egos pour un seul poste

Jusqu'en 2011, la patronne d'Areva n'est autre que l'ex-"sherpa" de François Mitterrand, Anne Lauvergeon – dont Maureen Kearney est proche. "Atomic Anne", comme elle est surnommée, se heurte à Henri Proglio depuis qu'il a été nommé à la tête d'EDF par Nicolas Sarkozy, en 2009. Il y a donc deux chefs, deux egos pour un seul titre : celui de "chef du nucléaire français". Cette guerre des chefs est au cœur de cet extrait du numéro d'"Affaires sensibles".

Les choses s'accélèrent en février 2011, quand Henri Proglio est nommé vice-président d'un tout nouveau Comité stratégique de l'énergie nucléaire. Areva tombe alors sous la coupe de celui qui souhaite son démantèlement. Cinq mois plus tard, le président Sarkozy confirme sa volonté de réorganiser la filière en débarquant sans ménagement Anne Lauvergeon. Celui qui la remplace à un poste si stratégique, Luc Oursel, est un inconnu. Cette nomination surprise suscite des interrogations : saura-t-il faire face aux ambitions d'EDF et aux pressions de l'Elysée ? Une partie de sa mission, telle qu'il la présente, consiste à "purger la gestion d'Anne Lauvergeon".

"C'est à ce moment-là", rappelle Caroline Michel-Aguirre, spécialiste de ce dossier (et auteure d'un livre-enquête sur l'affaire Maureen Kearney, La Syndicaliste, éd. Stock), "que tout un tas d'affaires sortent, [comme] l'achat controversé d'UraMin, une petite société minière présente en Afrique, qui a été rachetée très cher et qui ne produira jamais d'uranium…".

"Un nid de vipères, de trahisons, de barbouzeries dans tous les sens"

La journaliste évoque le climat particulièrement délétère qui entoure Anne Lauvergeon, "un nid de vipères, de trahisons, de barbouzeries dans tous les sens, qu'on a du mal à imaginer aujourd'hui". L'ancienne patronne d'Areva aurait ainsi découvert que son successeur avait embauché un détective privé. "Son mari a été mis sur écoute ; elle aussi, se souvient Maureen Kearney. Il y a eu un cambriolage chez elle, personne n'a rien entendu. C'était… assez dur pour elle."

Maureen Kearney a-t-elle pu faire les frais de sa proximité avec Anne Lauvergeon ? "Je ne me mettais pas sur le même rang qu'elle, précise-t-elle. J'étais une syndicaliste, j'étais prof d'anglais…" Pourtant, elle vit elle aussi dans une ambiance inquiétante : elle affirme avoir reçu des menaces téléphoniques quelques jours avant les faits – des faits longtemps mis en doute par la justice. Accusée d'avoir tout inventé, condamnée pour dénonciation de crime imaginaire, Maureen Kearney a finalement été relaxée en appel… sans que l'auteur de l'agression ne soit identifié. Ni son possible commanditaire...

Extrait de "L’affaire Maureen Kearney, la véritable histoire de 'La Syndicaliste'", un document à revoir le 25 janvier 2024 dans "Affaires sensibles", un magazine présenté par Fabrice Drouelle et coproduit par France Télévisions, France Inter et l’INA d'après l'émission originale de France Inter.

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