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Tsipras : "le dilemme n'est pas entre l'euro et la drachme", mais entre abandon et poursuite de l'austérité

Salle bondée lundi 21 mai pour la conférence de presse Mélenchon-Tsipras. Pour le dirigeant du Front de gauche grec, le "dilemme n'est pas entre l'euro et la drachme", mais entre l'abandon ou non d'un "mémorandum inhumain" (le plan d'austérité).
Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Jean-Luc Mélenchon, Alexis Tsipras et Pierre Laurent (JOEL SAGET / AFP)

Salle bondée lundi 21 mai pour la conférence de presse Mélenchon-Tsipras. Pour le dirigeant du Front de gauche grec, le "dilemme n'est pas entre l'euro et la drachme", mais entre l'abandon ou non d'un "mémorandum inhumain" (le plan d'austérité).

A 15 heures précises, ce lundi 21 mai, la salle de l'Assemblée nationale qui devait accueillir la conférence de presse commune Mélenchon-Tsipras (le dirigeant de Syriza, le "Front de gauche" grec) était bondée, et les cameramen montés sur les tables pour pouvoir filmer le duo.

De nombreux journalistes européens - allemand, espagnol, grecs...- étaient venus écouter Alexis Tsipras, dont le parti caracole en tête des intentions de vote des législatives grecques du 17 juin et qui pourrait donc devenir premier ministre.

Alexis Tsipras a jugé que le dilemme n'était pas entre l'euro et la drachme, mais entre la poursuite d'un "mémorandum inhumain" (document définissant le plan d'austérité voulu par l'UE, la BCE et le FMI en échange d'une aide financière) ou son abandon.

Il a également déclaré qu'il n'appartenait pas à la chancelière Angela Merkel de décider ou non d'un référendum (sur l'euro) en Grèce, "pays souverain". La chancellerie allemande dément de son côté se mêler des affaires grecques et vouloir un référendum.

Mélenchon : "les menaces risquent d'être contreperformantes"

Après une introduction de Pierre Laurent (secrétaire national du PCF) "ravi d'accueillir Alexis Tsipras", Jean-Luc Mélenchon est entré dans le vif du sujet : "La chaîne des résignations et des servitudes qui liaient les peuples au traité de Lisbonne est en train de rompre en Grèce. Il est peu probable que les menaces venues de l'extérieur dissuadent les Grecs de confier à Syriza le pouvoir".

"Il est vain de dire qu'on expulserait la Grèce (de la zone euro). Ces mesures pourraient surtout être contreproductives car 60% des titres de la dette grecque sont dans des caisses publiques et le reste dans cinq banques, dont trois françaises", a ajouté l'ex-candidat du Front de Gauche à l'Elysée.

Selon lui, "il n'existe aucune disposition dans le traité de Lisbonne permett(ant) aux pays de la zone euro de chasser un autre pays de la dite zone".

Alexis Tsipras s'est félicité ensuite d'"avoir surpris l'Europe, à en juger par votre présence ici" (allusion à la forêt de caméras). "La crise, a-t-il estimé, ne concerne pas seulement la Grèce, mais tous les peuples européens. Aucun peuple ne peut être conduit à une sorte de suicide volontaire. "

Syriza dénonce "une expérimentation néo-libérale qui s'apparente à un traitement de choc"

Et de poursuivre : "ce qui est appliqué en Grèce, ce n'est pas un simple programme d'austérité, c'est une expérimentation néolibérale qui s'apparente à un traitement de choc. C'est une crise humanitaire".

"Nous livrons en Grèce, a-t-il ajouté, un combat au nom de tous les peuples européens. Si cette expérimentation continue en Grèce, elle sera exportée dans tous les pays européens."

Comme François Hollande au Bourget, il a désigné un "ennemi" qui n'a "pas de visage, pas de programme, pas de parti" : "la finance".

"Un vent de changement un peu partout"

Pourtant, a-t-il continué, "nous sentons un vent de changement un peu partout. Des choses impossibles hier sont désormais discutées", sous peine de voir se désintégrer la zone euro.

Pour Alexis Tsipras, "Mme Merkel doit comprendre qu'elle est à égalité avec les autres au sein d'une eurozone où il n'y a ni locataire ni propriétaire.

"On ne négocie pas avec l'enfer"

"Ce sont les élections qui seront le véritable référendum du pays. Le dilemme n'est pas entre l'euro et la drachme mais poursuite du désastre du mémorandum ou annulation".

"Nous voulons discuter d'une refondation de la construction européenne", a-t-il encore dit, avant d'ajouter : "au-delà de son côté inhumain et barbare, le mémorandum est inefficace puisqu''on va vers une seconde restructuration de la dette". "Il n'y a rien à négocier dans le mémorandum car on ne négocie pas avec l'enfer".

Avertissement à Hollande pour qu'il ne devienne pas "Hollandreou"

"François Hollande ne pourra renier facilement ses promesses sinon il deviendra Hollandreou", a-t-il conclu, par un mot-valise (déjà utilisé par Jean-Luc Mélenchon) qui fait allusion à l'ancien Premier ministre socialiste grec Georges Papandréou (négociateur du premier plan d'aide à la Grèce avant de démissionner en novembre dernier).

M. Tsipras, qui n'a pas été recu par des membres du gouvernement Hollande, a estimé que François Hollande devra "comprendre qu'il lui faudra répondre à des questions cruciales. " : "si M.Sarkozy passe ses vacances au Maroc", c'est que le peuple français a " voté pour une autre politique".

S'opposant aux mesures de rigueur prônées par l'Europe et imposées en Grèce depuis 2010 en échange des prêts internationaux pour sauver le pays de la faillite, Syriza a créé la surprise lors du scrutin du 6 mai en arrivant deuxième avec 16,8% des voix derrière la Nouvelle Démocratie et en quadruplant son score par rapport aux dernières législatives de 2009.

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