Sur l'éducation, Nicolas Sarkozy mérite-t-il la moyenne ?
Quelle note donner au président Sarkozy qui a délivré jeudi 5 janvier ses voeux au monde de l'éducation ? Son quinquennat a été davantage marqué par les suppressions d'effectifs que par les progrès des élèves dans les classements internationaux.
Quel souvenir les Français garderont-ils du quinquennat Sarkozy sur l'éducation ? Probablement celui de la suppression de dizaines de milliers de postes dans l'Education nationale - 66 000 postes depuis 2007, 14 000 prévus en 2012. L'exécutif, lui, se glorifie de la réforme de l'enseignement supérieur, qui a donné davantage d'autonomie aux universités. Passage en revue.
Education nationale : 80.000 postes supprimés en 5 ans
Plus de 65 000 postes supprimés depuis le début du quinquennat, auxquels s'ajoutent 14 000 autres programmés en 2012. Au total, près de 80 000 suppressions d'effectifs dans l'Education nationale, qualifiés par Ségolène Royal de "plus grand plan social de toute l'histoire" du gouvernement, en août 2011, lors de la campagne des primaires.
Une politique qui a été largement désapprouvée par l'opinion : selon un sondage CSA publié en août 2011, 82% des Français (+ 2 points depuis 2010) pensent que "le principe du non-remplacement d'un enseignant sur deux" est "une mauvaise chose".
Le quinquennat a donc vu se multiplier les actions inédites, comme la "nuit des écoles" , reconduite chaque année depuis 2008, où 650 établissements avait été occupés. Même des communes se sont rebellées, comme Puy-Saint-Vincent, petit village des Hautes-Alpes prêt à payer un instituteur pour éviter la fermeture d'une maternelle.
Vue l'impopularité de la RGPP appliquée à l'enseignement, rien d'étonnant que François Hollande ait fait du rétablissement de ces 60 000 postes une de ses propositions phares, même si la proposition a été jugée "irresponsable" par NicolasSarkozy lors de ses voeux au monde de l'éducation, jeudi 5 janvier.
Primaire : le samedi matin libéré
A l'école primaire, en revanche, une mesure a été plébiscitée par les enfants et une grande partie des parents : la suppression, à la rentrée 2009, du samedi matin travaillé (même si des écoles privées continuent, elles, à donner cours le samedi).
A l'enthousiasme du début a succédé une déferlante de critiques : ce resserrement des cours sur quatre jours a été jugé nocif pour les enfants par les chronobiologistes, par l'Académie de médecine ... et par l'UMP elle-même. Le parti présidentiel a promis, s'il poursuivait aux affaires après la présidentielle, de revoir les rythmes scolaires : retour aux quatre jours et demi, allègement de la trop longue journée des écoliers français, et diminution des vacances scolaires. Faut-il l'interpréter comme une manière de désaveu ?
Collège : pas de changement, sauf la carte scolaire
Pour ce quinquennat, Nicolas Sarkozy a éludé l'obstacle : pas de réforme du collège, où se concentrent pourtant l'essentiel des difficultés du secondaire. Lors de ses conventions, l'UMP a largement pointé ce manque, en annonçant la fin du collège unique et en avançant plusieurs propositions : regroupement des 6e et 5e d'un côté, des 4e des 3e de l'autre, évaluation en CM2 pour filtrer l'accès en 6e, "parcours en alternance" dès 14 ans facilité.
La seule réforme qui ait touché le collège est une promesse qui n'a pas été tenue jusqu'au bout : l'assouplissement de la carte scolaire. Cet assouplissement partiel et sous conditions (avoir un frère ou une soeur dans l'établissement demandé, être boursier ...) a accéléré la fuite des collégiens les plus aisés (ou les moins défavorisés) vers les établissements de centre ville...Publics, ou privés, quand ils n'obtenaient pas satisfaction car "la promesse d'ouvrir totalement ce choix en 2010 est tombée
Lycée : réforme en cours
Reportée par Xavier Darcos alors que les manifestations lycéennes se multipliaient, fin 2008, la réforme du lycée a finalement été mise en oeuvre...mais de façon échelonnée : à partir de l'automne 2010 pour la seconde, à l'automne 2011 pour la première ...et à la rentrée 2012 pour la terminale.
L'idée consiste à proposer un parcours "plus progressif et plus individualisé", permettant de regrouper les élèves de différentes classes par niveaux (de langue par exemple). Difficile d'évaluer aujourd'hui cette transformation inachevée.
Enseignement supérieur : l'autonomie des universités
S'il y a bien une réforme (et quasiment la seule, dans le domaine de l'Education) dont s'enorgueillissent président et gouvernement, c'est celle de l'autonomie des universités. Mieux encore, François Hollande a fait savoir qu'il ne la remettrait pas en cause : "L'autonomie des université, ça me va".
Depuis le début de l'année, 80 des 83 établissements ont liberté de gestion (en particulier pour leur masse salariale), mais pas forcément les moyens nécessaires. "Les engagements de l'État n'ont pas permis de rattraper le sous-financement chronique et ancien d'un certain nombre de petites universités récentes comme celles de Bretagne-Sud ou de Pau", note ainsi Le Figaro.
Le président de la République et l'UMP estiment que cette "autonomie" doit désormais être déclinée dans le secondaire, avec davantage de pouvoirs accordée aux chefs d'établissement. Pour Nicolas Sarkozy qui présentait jeudi 5 janvier ses voeux aux enseignants dans la Vienne, celle-ci permettra que se constituent "des équipes collectivement responsables des élèves qui leur sont confiés".
Une France qui ne brille pas dans les classements internationaux
Les Français seront-ils sensibles aux promesses d'un chef de l'Etat de plus en plus clairement en campagne ? Ou jugeront-ils le président de la République sur son bilan ?
Un bilan, si l'on en croit Le Monde, partiellement occulté : selon Interstat, collectif de syndicats de l'INSEE et du ministère de l'Education, seules quatre notes d"informations annuelles sur douze ont été publiées au premier semestre 2011. Parmi celles restées dans les tiroirs, des enquêtes montrant que "les lacunes des plus faibles se sont aggravées".
Restent les classements internationaux, moins suspects de partialité. Les résultats des collègiens français aux épreuves PISA, qui évaluent les performances des pays de l'OCDE ? A peine la moyenne en 2009, avec un écart de plus en plus grand entre les très bons et les très mauvais élèves, et un fort impact du milieu socio-économique sur les résultats.
Le ministre Luc Chatel avait alors plaidé la nécessité du recul pour mesurer l'impact des réformes en cours. Et le dernier classement de Shanghaï, en août 2011, ne comptait, parmi les 500 répertoriées, que 21 universités françaises. Il appartient désormais aux Français de décider s'ils autorisent ou non l'élève Sarkozy à passer le cap d' un nouveau quinquennat.
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