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Qui va payer pour le plan Fillon ?

François Fillon a annoncé hier le très attendu train de mesures fiscales visant à rétablir l'équilibre budgétaire de la France. Le Premier ministre se refuse à parler d'austérité et préfère évoquer une politique de rigueur nécessaire dans un contexte de crise et de révision à la baisse des prévisions de croissance. Un plan qui, selon le gouvernement, sera avant tout supporté par les plus riches. Faux, rétorquent l’opposition et les syndicats.
Article rédigé par franceinfo
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"83% de ce plan porte sur les entreprises, les détenteurs de patrimoine et les ménages aux revenus très élevés". Interrogé hier par nos confrères de TF1, François Fillon l’affirme : son plan de redressement des finances publiques répond à des exigences de justice sociale.

Le Premier ministre a annoncé hier les grandes lignes du budget 2012. Objectif annoncé : réaliser 11 milliards d'économie, auxquelles s'ajoute 1 milliard en cette fin d'année. Des mesures pour rassurer les marchés en pleine crise économique. Le Premier ministre a d'ailleurs revu les prévisions de croissance du pays à la baisse : 1,75% pour cette année et l'an prochain contre 2% initialement prévus en 2011 et 2,25% en 2012.

Parmi les mesures évoquées, la révision de la fiscalité des heures supplémentaires pour les entreprises, l'augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, ou encore une taxe exceptionnelle de 3% sur les plus haut revenus, c'est-à-dire les ménages dont le revenu fiscal dépasse 500 000 euros pas an. Une dernière mesure symbolique, d’autant qu’elle est limitée dans le temps (2013), mais qui souligne la participation de l'ensemble de la nation à l'effort selon la ministre du budget et porte-parole du gouvernement, Valérie Pécresse.

Un plan guidé par l’équité ? Tout le monde n’est pas de cet avis. Les classes moyennes aussi vont devoir mettre la main au porte-monnaie. L'augmentation du prix du tabac et de l'alcool, la création d'une taxe sur les sodas, ou encore l’augmentation des taxes sur les complémentaires de santé risque de peser lourd sur le budget des ménages les plus modestes. "On ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs", souligne sur France Info Henri Sterdyniak, économiste à l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "A partir du moment où on dit qu’en période de dépression on veut gagner 0,5% du PIB, naturellement, il faut faire payer assez lourdement un certain nombre de classes moyennes", analyse-t-il. Et d’ajouter qu'on "aurait pu préférer attendre que la croissance soit plus assurée pour se lancer dans de telles hausses d’impôts".

Minimaliste, décevant, hypocrite… Opposition et syndicats montent ensemble au créneau. "Les niches ne sont pas remises en cause de façon assez importante", regrette Véronique Descacq. La secrétaire nationale chargée des questions économiques à la CFDT estime que ce plan ne résout en rien le problème du manque d'équité du système fiscale français. Même analyse du secrétaire général de Force Ouvrière : "Ça relève du gadget. Je pense notamment aux 16 PDG qui, ces derniers jours, ont fait des déclarations. Ils ont une taxe qui est une taxe exceptionnelle. Ça va leur permettre de conserver des rémunérations exorbitantes. La véritable réforme qu’il faudrait faire, c’est une réforme fiscale d’ensemble et mieux réguler les modes de rémunération des gens les plus riches ", martèle Jean-Claude Mailly.

Dans les rangs de l’opposition, cette "politique d’austérité" qui ne dit pas son nom, c’est avant tout l’aveu d’un "échec" de la politique économique et budgétaire du gouvernement, estime le socialiste Michel Sapin : "Le Premier ministre est obligé lui-même de dire que le seuil de l'endettement maximum est dépassé. C'est son endettement, l'endettement de sa politique", souligne l'ancien ministre de l'économie, tandis que chez les Verts Yannick Jadot, porte-parole d'Eva Joly, la candidate écologiste à la présidentielle, parle lui de "mesures cosmétiques" et d'une politique fiscale "qui emmène notre économie vers la récession".

Invité de France Info ce matin, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin, n'a pas de mots plus tendres. "C’est un début, une prise de conscience. Après quatre années d’une politique dispendieuse le gouvernement revient sur terre et constate la situation dramatique dans laquelle nous sommes sur le plan des finances publiques, sur le plan de l’endettement”, estime le président de République Solidaire, candidat à la présidentielle de 2012.

Cécile Mimaut, avec agences

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