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Primaire de la gauche : "Le PS peut disparaître du paysage politique"

Benoît Hamon et Manuel Valls restent en lice pour l'investiture socialiste à l'élection présidentielle. Dimanche, ils ont terminé en tête du premier tour la primaire, malgré des programmes très éloignés. Selon Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à Lille, le PS est maintenant "usé".

Article rédigé par franceinfo
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Benoît Hamon et Manuel Valls, vainqueurs du premier tour de la primaire socialiste (JOEL SAGET / AFP)

Au moins 1 600 000 personnes ont voté, dimanche 22 janvier, lors de la primaire de la gauche, qui a vu Benoît Hamon arriver en tête devant Manuel Valls. Le second tour les départagera, le 29 janvier. Mais selon Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à Lille, invité de franceinfo lundi, le PS est "usé" et ne représente plus "une dominante à gauche".

franceinfo : La faible participation prouve-t-elle l’affaiblissement du Parti socialiste ?

Rémi Lefebvre : Ce n’est pas non plus la catastrophe. C’est beaucoup plus que les 80 000 militants du Parti socialiste, mais évidemment c’est très décevant par rapport à 2011 et par rapport à la primaire de droite. Les sympathisants se sont rendus aux urnes sans véritable enthousiasme. De toute façon, 90% des participants de la primaire estiment que le candidat désigné ne sera pas président de la République.

On a eu une primaire d’alternance avec la droite on a un peu une primaire de désespérance à gauche. Le problème, c’est qu’il y a Macron et Mélenchon, qui sont installés dans le paysage politique et on se demande à quoi sert cette primaire. Le candidat désigné a très peu de chances d’être même au deuxième de tour de la présidentielle. 

Qui est responsable de cette situation compliquée pour le PS ?

Concrètement, le PS est usé, décrédibilisé, discrédité. En cinq ans de pouvoir, le PS s'est auto-détruit. Il a perdu toutes les élections intermédiaires, il a violenté son électorat sur toute une série de questions : la loi Travail, la déchéance de nationalité...

Les sympathisants n’ont pas la mémoire courte, ils se souviennent de toutes les humiliations accumulées, de la déchéance de la nationalité à la loi travail. Aujourd'hui, le parti paye tous les reniements et toutes les erreurs qu’il a commises depuis 2012, et il le paye cash.

Pensez-vous que l’existence du PS soit menacée ?

Le PS a un siècle d'existence. Il a résisté à tout : aux années 1960, à la défaite de 1993, au Congrès de Reims, en 2008... Mais là, la situation est un peu inédite. Dans toutes ces crises, il était toujours le parti dominant à gauche, il a toujours su rebondir car il a capté le vote utile puisqu’il apparaissait comme la seule alternative à gauche.

Là, les choses changent parce qu’il est pris en tenaille entre à ses partenaires : Mélenchon à gauche et Macron à droite. C’est son statut de parti dominant à gauche qui est mis en cause. Nous sommes dans une situation où cette phase des primaires, de la présidentielle et des législatives va être dévastatrice pour le PS, il peut disparaître du paysage politique. Cela s'illustre avec la distance idéologique entre Valls et Hamon qui est considérable. Comment des options aussi différentes peuvent coexister au sein d’un même parti ?

C’est une erreur d’avoir organisé cette primaire ouverte?

Le PS n’avait pas le choix, il n’y avait que des mauvaises solutions. Le candidat qui en sortira sera légitimé par les sympathisants, certes, mais le risque c’est que si Hamon gagne, il y a beaucoup de cadres du Parti socialiste qui vont rejoindre Macron. Ceux qui vont rester et qui sont proches de Valls ne soutiendront pas Hamon.

Si c’est Valls, beaucoup d’électeurs du Parti socialiste, de sympathisants ne le soutiendront pas car c’est un candidat repoussoir pour une partie de cet électorat. Concrètement un parti n’existe que s’il a un candidat à l’élection présidentielle. Si le Parti socialiste renonçait, un scénario auquel je ne crois pas, il entérinerait sa propre fin. Il y aura un candidat du Parti socialiste qui risque d’être relégué en 4e ou 5e position.

"En cinq ans de pouvoir, le PS s'est auto-détruit" selon Rémi Lefebvre

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