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Jean-Christophe Cambadélis élu à la tête du PS avec plus de 70% des voix

Une semaine après la victoire de sa motion en vue du congrès de Poitiers, le premier secrétaire a été reconduit jeudi soir à la tête du PS, offrant au président de la République ses talents de rassembleur en chef.

Article rédigé par Christophe Rauzy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, le 20 mai 2015 au siège du parti, rue de Solférino, à Paris. (MAXPPP)

Cette fois, c'est son tour. Après avoir été devancé par François Hollande en 1997, après avoir été jugé trop proche de DSK en 2011, après avoir dû céder la place en 2012, le siège de premier secrétaire du Parti socialiste revient à Jean-Christophe Cambadélis. Il a été élu jeudi 28 mai, dans la soirée, avec plus de 70% des voix, face au "frondeur" Christian Paul. Ces résultats partiels, mais qui ne devraient pas beaucoup changer, portent sur "le dépouillement dans plus de 50% des sections".

Jean-Christophe Cambadélis occupait déjà le poste depuis avril 2014, après avoir été nommé à la hâte à la place d'Harlem Désir - déroute des municipales oblige. Mais cette fois, il a été désigné par les militants, gagnant enfin la légitimité nationale que le député de Paris recherche depuis de nombreuses années. 

Si sa candidature s'est imposée, c'est avant tout parce qu'elle présente plusieurs avantages pour le parti, mais surtout pour François Hollande. A mi-mandat, face à une opinion publique majoritairement hostile et un camp socialiste tiraillé entre les sociaux-libéraux et les frondeurs, le chef de l'Etat a besoin de savoir-faire à la tête du PS. Francetv info détaille les raisons pour lesquelles "Camba", bien qu'il ne soit pas un "hollandais", est un chef de parti idéal pour le président.

Parce qu'il a des alliés dans tous les camps

C'est en marin chevronné que Jean-Christophe Cambadélis fraye aujourd'hui dans les mers socialistes. A l'époque où il était trotskiste, membre de l'Organisation communiste internationaliste et syndicaliste étudiant, celui qui se faisait alors appeler "Kostas" marchait aux côtés de militants comme Julien Dray, Jean-Luc Mélenchon ou Jean-Marie Le Guen. Puis, en 1986, son engagement dans la campagne de François Mitterrand le pousse à prendre sa carte au PS. Dès lors, il sera tour à tour mitterrandien, rocardien, strauss-kahnien puis aubryste.

Un déjeuner rassemblant les socialistes Jean-Christophe Cambadélis, Martine Aubry, Claude Bartolone, Laurent Fabius et Arnaud Montebourg, le 1er juin 2008 à Paris. (MAXPPP)
 

Grâce à l'évolution de ses positions, l'actuel premier secrétaire peut aujourd'hui compter parmi ses alliés aussi bien Martine Aubry que Manuel Valls. Faire signer sa motion A, "Renouveau socialiste", au Premier ministre et à la maire de Lille est un tour de force qu'il était le seul à pouvoir réussir. "Il a le souci de la synthèse", se félicite-t-on à l'Elysée, où l'on sait apprécier cette qualité. "C’est un mécanicien du génie politique, qui excelle dans la tactique", explique un proche de Vincent Peillon, cité par L'Opinion.

Une capacité à rassembler qui a permis la victoire de la motion A, avec 60% des voix, lors du vote des militants jeudi 21 mai. Et, sans surprise, les motions C et D, éliminées de la course, se sont rangées derrière la candidature de Jean-Christophe Cambadélis. Avec autant d'alliés, il s'impose comme l'intermédiaire idéal entre l'Elysée et le parti.

Parce qu'il maîtrise les contradictions de la majorité

Il y a bien un camp qui ne porte pas Jean-Christophe Cambadélis dans son cœur : celui des frondeurs. Représentés par la motion B, qui a convaincu 29% des militants, ils estiment que le premier secrétaire sortant porte une motion qui, d'après Christian Paul, sert "de paravent face aux contradictions évidentes de signataires qui ne partagent pas les mêmes idées". L'aile gauche du PS ne digère pas le ralliement tactique de Martine Aubry qui l'a privée d'une tête d'affiche anti-gouvernement.

Les frondeurs auraient pourtant dû se méfier de l'habileté légendaire de Jean-Christophe Cambadélis, et de sa connaissance parfaite des subtilités socialistes. Pour convaincre la maire de Lille d'apposer son nom au bas de sa motion, à côté de celui de Manuel Valls, il a inclus de fines critiques de l'exécutif. Sur la question polémique du travail du dimanche, la motion contient la phrase suivante : "Nous sommes opposés à une nouvelle extension du travail du dimanche."

Comme l'explique Europe 1, la formule est suffisamment ambiguë pour que les opposants au travail dominical y voient une remise en cause de la loi Macron. Ses partisans, eux, y décèlent plutôt une incitation à ne pas aller plus loin. "C'est à montrer dans les écoles ! explique Cambadélis dans L'Obs (article payant). L'astuce permettait à tout le monde de s'y retrouver. (…) Tout a été pensé, croyez-moi. J'ai passé des jours et des nuits à plancher pour éviter les coins."

Jean-Christophe Cambadélis, salué par François Hollande, alors premier secrétaire du PS, le 2 septembre 2007 à La Rochelle (Charente-Maritime). (PIERRE ANDRIEU / AFP)
 

Résultat des courses, tout le monde ou presque semble satisfait de la victoire de la motion A, comme le résume Politis. De leur côté, les frondeurs ne peuvent plus affirmer que la majorité des militants est derrière eux. "Il faut désormais tourner la page de ce que les médias ont appelé la fronde parlementaire", a d'ailleurs reconnu Christian Paul. François Hollande, qui a œuvré au succès de la motion A en coulisses, se réjouit de la perspective de compter moins d'adversaires dans son propre camp : "Tout ce qui peut apporter de la stabilité, de la cohérence et de la visibilité est bon pour l’action que je mène aujourd’hui pour la France", a déclaré le président dimanche, à Riga (Lettonie), en réaction à la victoire de la motion Cambadélis. 

Parce qu'il a un plan pour 2017

Cette capacité à convaincre des ennemis farouches d'unir leurs forces s'exprime parfaitement dans la dernière partie de la motion A, où Le Monde voit "l'essence du cambadélisme". Le texte a pour ambition de créer à terme "une belle alliance populaire", "celle qui unit tous les progressistes dans un projet de transformation, qui se fixe comme objectifs la croissance durable, la réduction des inégalités et la République fraternelle".

Derrière cette formule se cache l'ambition de recréer la gauche plurielle de 1997, dont Jean-Christophe Cambadélis était un des artisans. Vingt ans plus tard, pour la présidentielle de 2017, l'objectif sera de redonner au PS une force d'attraction susceptible de générer des alliances avec les écologistes et les communistes. Il s'agira aussi d'éviter l'isolement qui a été fatal aux socialistes espagnols, comme l'explique le premier secrétaire à L'Opinion (article payant) : "Notre défi est maintenant de se réapproprier le terrain. Partout. A tous les échelons, pour ne pas être à la merci en France d'un mouvement comme Podemos."

Pour "se réapproprier le terrain", il faudra recruter des militants. Une tâche difficile alors que le PS subit une érosion continue depuis 2012. Mais Jean-Christophe Cambadélis ambitionne d'atteindre 500 000 militants en 2017, contre 131 000 aujourd'hui. Pour y parvenir, il promet de "moderniser les pratiques" et surtout de "bâtir une stratégie de dépassement du Parti socialiste pour aller vers un nouvel Epinay".

Une référence au congrès fondateur du PS, en 1971, qui laisse perplexe les frondeurs. "Très bien de vouloir dépasser le PS, à condition qu'il soit d'abord fort, respecté et créatif." Mais ce que "Camba" compte fournir à François Hollande, c'est surtout un PS plus discipliné, et en ordre de bataille. Ce sera en tout cas un parti modelé par son rassembleur en chef qui se placera derrière son candidat.

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