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Pourquoi les abstentionnistes s'abstiennent-ils ?

La Seine-Saint-Denis détient le record national d’abstention, lors du premier tour des régionales, avec un taux de 62%. Près de deux électeurs sur trois, dans le département, ont snobé les bureaux de vote. _ Pourquoi ? Jules Lavie est allé à la rencontre de ces électeurs, inscrits, qui n'ont pas pris la peine hier de passer par la case "isoloir". Des abstentionnistes de circonstances, qui avaient "{des courses}" ou "{des trucs}" -enfin bien autre chose- à faire, démotivés qu'ils étaient par ce premier tour des régionales 2010. Portraits croisés.
Article rédigé par franceinfo
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"Les régionales, à quoi ça sert ?"

Damien, 33 ans, ingénieur d’études dans la logistique, se remettait hier de sa soirée de la veille. Et quand il a pris le soin d’ouvrir les programmes électoraux qui se trouvaient dans sa boîte aux lettres, il ne s’y est "pas retrouvé. Trop succinct". Damien, pourtant, n’est pas un abstentionniste revendiqué. "J’ai voté à la présidentielle, aux municipales, mais celle-là, non. Je ne sais pas à quoi ça sert, les régionales". S’il avait voté ? C’aurait été "vert". Mais finalement non, car "les politiques, c’est bonnet-blanc, et blanc-bonnet" et puis "une voix sur cinquante millions, non, ça change par grand-chose (…) Ils n’ont pas besoin de moi !"

"Trop de polémiques, dans cette campagne"

Benjamin, 30 ans, informaticien a déménagé et n’a pas pris le temps de s’inscrire sur les listes électorales de sa nouvelle commune. Raté pour cette fois, mais sans regret, ce n’était "que le premier tour". Il se déplacera pour le second, "car c’est le principal". Benjamin se dit déçu de cette campagne "avec des polémiques dans tous les sens, sur Ali Soumaré, par exemple". Lui aurait souhaité qu’on parle du fond, des programmes, "plutôt que du casier ou du passé d’un candidat". D’ailleurs, selon lui, "dans toutes les listes, il y a des personnes qui ont eu des antécédents avec la justice", alors plutôt savoir "ce qu’ils vont faire, que ce qu’ils ont fait"… La faute, pour lui, aux politiques mais aussi aux médias : "les politiques font des coups bas pour déstabiliser les autres, et les médias foncent."

"A 19h, on s'est dit, mince, on a loupé le vote !"

Pascal, chef de projet chez France Télécom, 46 ans "s’est loupé (…) pris par le temps", il avait "des p’tites choses à faire" et quand il a regardé la pendule, avec sa femme, à 19h, s’est dit : "ah mince, on est pas allé voter !" Aux municipales, à la présidentielle, c’est évident, il y serait allé, mais là, Pascal se sentait moins concerné : "concrètement, pour moi, simple citoyen lambda, les régions, l’autonomie des régions, l’impact sur ma commune. Je n’ai pas vu l’utilité, je n’ai même pas lu les programmes reçus dans ma boîte aux lettres."
_ "J’aurais pu faire le geste d’aller au bureau de vote, prendre le bulletin qui me va le mieux et voter, mais, il m’a manqué du contenu, ce que ça va changer pour nous. On ne communique pas autant pour les régionales, que pour les autres élections. On n’a pas motivé les gens à y aller !"
Pourtant, Pascal a des scrupules : hier, il a regardé la soirée électorale à la télévision et découvert atterré le taux d’abstention :"zut, ce coup-ci, j’en fait partie !" Pas deux fois : il ira voter dimanche prochain, et prendra le temps de lire cette fois les tracts qu’il a accumulés.

"
Dans les programmes, rien qui poussait à y aller..."

Florence, chef de projet à France Télécom avait "des courses à faire", pensait passer au bureau de vote au retour, mais est rentrée directement. "On a zappé, oublié le vote ! On n'était pas motivé..."
_ Elle aussi estime que ces régionales, on n’en a pas beaucoup parlé, "si ce n’est des querelles de personnes, des polémiques : Pécresse qui n’était pas soutenue par son parti. Mais, et son programme ?". Pourtant, elle les a bien reçus, "et lus dans ma cuisine, mais je n’y ai trouvé rien de concret, rien de transcendant. Rien qui poussait à se dire : oui, il faut que j’y aille".
Elle se dit pourtant de droite, a voté Sarkozy en 2007, au second tour. Mais, aujourd’hui, le trouve plus UMP que président. Alors voter pour la droite ce coup-ci, ce n’était pas une évidence. "Est-ce qu’elle fera mieux que la gauche ? Est-ce que la gauche a si mal fait ? Je ne sais pas..."

Jules Lavie, Cécile Quéguiner

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