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Nicolas Sarkozy n'a pas bougé sur l'âge du départ à le retraite mais a lâché du lest sur certains points

Le chef de l'Etat a jugé mercredi la réforme des retraites "essentielle" tout en se disant, d'après un communiqué, "attentif aux préoccupations qui sont ainsi exprimées".Les syndicats, satisfaits de la mobilisation qui a réuni mardi, selon eux, plus de 2 millions de manifestants, pourraient envisager une autre mobilisation avant la fin septembre.
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Nicolas Sarkozy (AFP PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN)

Le chef de l'Etat a jugé mercredi la réforme des retraites "essentielle" tout en se disant, d'après un communiqué, "attentif aux préoccupations qui sont ainsi exprimées".

Les syndicats, satisfaits de la mobilisation qui a réuni mardi, selon eux, plus de 2 millions de manifestants, pourraient envisager une autre mobilisation avant la fin septembre.

Nicolas Sarkozy a demandé au gouvernement, lors du Conseil des ministres, "d'améliorer le dispositif carrières longues" et d'élargir la prise en compte de la pénibilité dans les départs en retraite, au lendemain de la mobilisation contre la réforme proposée.

"Le dispositif carrières longues créé en 2003 sera maintenu et élargi: tous ceux qui sont rentrés très jeunes sur le marché du travail, c'est-à-dire avant 18 ans, et qui ont toutes les années de cotisations requises, pourront continuer à partir à 60 ans, voire avant", a dit le chef de l'Etat dans une déclaration communiquée ensuite à la presse.

"Je demande au gouvernement d'améliorer le dispositif afin d'éviter tout effet de seuil et de renforcer par conséquent l'équité entre les générations. Cela représente un effort supplémentaire de 350 millions d'euros pour nos régimes de retraite", a-t-il ajouté.

En ce qui concerne le facteur pénibilité, il a proposé d'abaisser à 10% le taux d'incapacité permettant aux salariés effectuant un travail pénible de continuer à partir à la retraite à 60 ans, contre 20% dans le texte actuel, et souhaité des accords de branche pour aménager leur fin de carrière.

"Ces branches ou ces entreprises pourront compter sur le soutien financier et l'ingénierie d'un fonds public expérimental. Un bilan de ces actions sera dressé en 2014", a aussi annonce aussi le chef de l'Etat.

Le chef de l'Etat a également indiqué qu'il maintiendrait le disposititif permettant aux fonctionnaites ayant eu trois enfants et quinze ans de service de faire valoir leurs droits à la retraite avant l'âge légal.

Nicolas Sarkozy a "remercié et "félicité" le Premier ministre François Fillon et le ministre du travail Eric Woerth pour "leur engagement" dans la réforme des retraites".


Aménagements annoncés: 1 milliard d'euros

Les aménagements à la réforme des retraites annoncés mercredi par Nicolas Sarkozy devraient "coûter aux alentours d'un milliard d'euros", a annoncé le secrétaire d'Etat à la Fonction publique, Georges Tron, sur la radio BFM.

Réactions
La CFDT a qualifié les propositions de modification de "bricolage".

Le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, a qualifié de "mesurettes" les modifications annoncées. "C'était plus ou moins dans les tuyaux", a-t-il affirmé sur TV5-Monde.

Pour la CFE-CGC, les aménagements annoncés constituent "des avancées" mais déplore "qu'aucune recette nouvelle ne soit prévue", ce qui "rend caduc le plan de retour à l'équilibre" du système de financement.

L'UMP a salué les derniers arbitrages du président de la République, estimant que les Français y seraient "sensibles".

Martine Aubry, première secrétaire du PS, a affirmé mercredi que Nicolas Sarkozy a opposé "une fin de non-recevoir" aux Français "qui étaient dans la rue" contre la réforme des retraites.

Débats à l'Assemblée: la gauche accuse
Les députés PCF et Parti de Gauche ont dénoncé mercredi un "passage en force" lors de la reprise des débats sur la réforme des retraites.

"Sarkozy, comme Marie-Antoinette, lance des brioches au peuple avec des fausses annonces. On n'a pas le temps de discuter des amendements. On essaie de passer en force à l'Assemblée nationale. C'est inacceptable", a déclaré l'ex-numéro un du PCF Marie-George Buffet dans les couloirs de l'Assemblée.

"Nous allons devoir voter en rafale des dispositions en 30 secondes, c'est franchement scandaleux", a lancé pour sa part Martine Billard (Parti de Gauche).

"On fait tout pour que le débat ait lieu en catimini" et que les amendements sur le recul de l'âge légal "passent à deux heures du matin", a aussi déploré Pierre Moscovici (PS).

Les annonces du président de la République seront examinées en commission à 19H00.


Les syndicats maintiennent la pression
La CFDT a compté 2,5 millions de manifestants tandis que la CGT parle de 2,7 millions de personnes dans toute la France. Le ministère de l'Intérieur a donné un chiffre de 1,12 million de manifestants.

Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, a estimé sur TF1 mardi soir que cela ferait "forcément réfléchir" Nicolas Sarkozy.

Bernard Thibault et son homologue de la CFDT, François Chérèque, ont exigé des propositions du gouvernement avant la réunion de l'intersyndicale de mercredi sur les suites à donner au mouvement.

Selon FO, une autre journée d'action contre la réforme des retraites se profile car les syndicats ont reçu des manifestants "une espèce de mandat pour tenir", a jugé mercredi son secrétaire général de Jean-Claude Mailly, "sans illusion" sur les annonces imminentes du chef de l'Etat.

"Je ne me fais pas d'illusion car (...) les messages laissés passés est que sur le coeur de la réforme, on ne peut pas bouger", a déclaré M. Mailly sur France Info.

Avant la déclaration du chef de l'Etat mercredi matin, Martine Aubry, qui s'exprimait sur France 2 et qui a participé mardi au cortège parisien, déclarait : "Dans une démocratie, quand la population est dans la rue, quand il y a plus de 2 millions de personnes et beaucoup de gens qui les soutiennent, eh bien on doit écouter, on doit entendre et je crois que le gouvernement doit reprendre à zéro cette réforme qui est à la fois injuste et inefficace".

Selon la Première secrétaire du PS, il faut aussi "arrêter le débat parlementaire" qui a débuté mardi à l'Assemblée nationale. "Si ce n'était pas le cas, nous continuerions à faire (...) nos propres propositions pour montrer aux Français que bien sûr il faut une réforme, bien sûr il faut prendre en compte l'allongement de la durée de vie mais il faut le faire de manière juste".

Le ministre du Travail, Eric Woerth, a présenté mardi après-midi, devant les députés son projet de réforme des retraites qu'il a qualifié de "rendez-vous des Français avec leur avenir".

L'Assemblée nationale a engagé l'examen en séance publique de ce projet de loi qui prévoit le report de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ à la retraite en 2018 et le relèvement de 65 à 67 ans de l'âge permettant d'obtenir une retraite à taux plein, quel que soit le nombre de trimestres cotisés.

Le relèvement de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ en retraite, auquel s'opposent les syndicats, est un choix raisonnable et incontournable, avait déclaré mardi à l'Assemblée le Premier ministre, François Fillon.

Les assouplissements envisagés par Nicolas Sarkozy

Carrières longues : le dispositif créé en 2003 sera "maintenu et élargi". Ceux qui sont rentrés avant 18 ans sur le marché du travail et qui ont toutes les années de cotisations requises pourront continuer à partir à 60 ans, voire avant. Nicolas Sarkozy souhaite en outre que le dispositif soit amélioré "afin d'éviter tout effet de seuil et de renforcer l'équité entre les générations". L'Elysée chiffre cet effort supplémentaire à 350 millions d'euros pour les régimes de retraite.

Pénibilité : le projet de loi prévoyait jusqu'ici que pour tout assuré présentant un taux d'incapacité supérieur ou égal à 20%, l'âge de la retraite sera maintenu à 60 ans. Le dispositif sera étendu aux agriculteurs et le taux d'incapacité abaissé à 10% dans certains cas. Les salariés présentant ce dernier taux devront faire appel à une commission pluridisciplinaire qui décidera ou non de leur accorder un départ à la retraite à 60 ans.

Nicolas Sarkozy souhaite d'autre part que les branches professionnelles ou les entreprises s'engagent dans des négociations pour proposer à leurs salariés exposés à des facteurs de pénibilité un aménagement de la fin de leur carrière. Elles pourront compter "sur le soutien financier et l'ingénierie d'un fonds public expérimental", un bilan de ces actions devant être dressé en 2014.

Le projet de loi engagera d'autre part une réforme de la médecine du travail et demandera aux entreprises de négocier des accords ou de prévoir des plans d'action en matière de prévention. A défaut, une pénalité leur sera appliquée.

Autres : la suppression prévue du dispositif qui permettait aux agents du service public ayant 3 enfants et 15 ans de service de liquider leur pension avant l'âge de droit commun ne sera pas applicable à ceux qui sont à 5 ans de l'âge de la retraite.

Polypensionnés : Nicolas Sarkozy n'a pas annoncé de mesures précises, indiquant seulement qu'il souhaitait "qu'on arrête en particulier de pénaliser ceux qui accomplissent leur carrière pour partie dans le public et pour partie dans le privé".

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