Résultats des municipales 2020 : le PS résiste bien, les communistes en difficulté dans deux de leurs bastions
Les maires sortantes socialistes de Paris, Anne Hidalgo, et de Lille, Martine Aubry, sont toutes les deux en tête du premier tour.
La gauche conserve son ancrage local. Malgré un contexte inédit et une abstention record liée à l'épidémie de coronavirus, les partis de gauche ont réussi à tirer leur épingle du jeu lors du premier tour des municipales, dimanche 15 mars. Dans les communes socialistes, les maires PS sortants arrivent largement en tête, avec notamment 30,2% des voix pour Anne Hidalgo à Paris et 29,8% des voix pour Martine Aubry à Lille.
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La plus grosse surprise est apparue à Marseille, où la tête de liste PS-PCF Michèle Rubirola est au coude-à-coude avec sa rivale LR, Martine Vassal. La candidate de gauche obtient, selon une estimation Ipsos/Sopra Steria pour France Télévisions, Radio France et les chaînes parlementaires, 23,44% des voix, contre 22,32% pour la candidate de droite. Stéphane Ravier, le candidat RN, obtient lui 19,45% des voix.
Le PS renforcé par les listes d'union de la gauche
Après sa déroute à l’élection présidentielle de 2017 (6,36%) et aux législatives de 2017, puis son faible score aux élections européennes (6,19%) de 2019, le PS comptait sur les municipales pour conserver ses villes (Paris, Lille, Nantes, Rennes, Le Mans) et en conquérir d’autres comme Nancy ou Bourges, rappelle La Croix. Pour ce scrutin local, le PS a présenté 1 000 listes et en a soutenu 1 000 autres, note Le Monde.
En plus de Paris et Lille, la maire sortante socialiste de Rennes, Nathalie Appéré, est également arrivée en tête du premier tour avec 32,77% des voix. A Nantes, Johanna Rolland se classe première aussi avec 31,36% des voix, suivie de loin par Laurence Garnier (LUD), qui obtient 19,93% des voix. L'ancien ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll est en pole position au Mans et obtient 41,99% des voix. Dans les Hauts-de-France, trois maires socialistes illustrent la bonne résistance du PS dans la région. A Denain (Nord), Anne-Lise Dufour a battu le RN Sébastien Chenu, et à Lens (Pas-de-Calais), Sylvain Robert a été élu avec 55,48%, battant un RN ambitieux.
"Ce qui est intéressant, c'est que le PS au niveau national ne pèse pas grand-chose en ce moment, mais au niveau local il réussit à très bien se maintenir", analyse Vincent Tiberj, sociologue, spécialiste du vote à Sciences Po Bordeaux.
Pour les maires sortants, notamment de gauche, dès lors qu’ils sont clairement identifiés comme opposants au gouvernement, ils n’allaient pas subir de vote sanction.
Vincent Tiberj, sociologue, spécialiste du voteà franceinfo
Les socialistes s'en sortent notamment grâce à leurs soutiens à des listes d'union de la gauche. A Bordeaux par exemple, le candidat soutenu par le PS, EELV et le PCF, Pierre Hurmic, est quasi à égalité avec le maire LR Nicolas Florian, avec 34,38% contre 34,55%. A Quimper (Finistère), la liste d'union de la gauche arrive en tête (32,06%) devant le maire sortant, Ludovic Jolivet (30,22%) et loin devant la députée LREM Annaig Le Meur (13,75%).
"La gauche continue d'exister"
Pour le chercheur Vincent Tiberj, ces résultats montrent également que "les partis forts au niveau national, qui essayaient de s’emparer des fiefs socialistes – comme le RN, LR ou LREM – ont montré qu'ils manquaient de ramifications locales."
A Brest par exemple, bastion de la gauche depuis trente ans, le maire socialiste François Cuillandre, qui briguait un 4e mandat, est arrivé en tête (26,53%) malgré sa mise en examen dans le cadre d'une enquête sur le versement d'indemnités aux élus socialistes de la ville. L'ancienne préfète Bernadette Malgorn (divers droite) le suit avec 18,87%, devant l'écologiste Ronan Pichon (15,73%).
La gauche "classique" a aussi pu profiter de "votes sanction" envers le gouvernement. "Ce vote a vraisemblablement été construit sur le mouvement contre la réforme des retraites. A Toulouse par exemple, Jean-Luc Moudenc est mis en difficulté par trois listes de gauche, cela n'aurait peut-être pas été le cas s'il n'avait pas fait alliance avec LREM", illustre le chercheur. Dans la Ville rose, le maire sortant (DVD) a ainsi obtenu 36,18% des voix, suivi à 27,56% par la liste Archipel Citoyen, soutenue par EELV, La France insoumise et Place publique. "On voit que LREM fait face de plein fouet au clivage gauche-droite. La gauche et la droite continuent à exister et à structurer les territoires", poursuit Vincent Tiberj.
Les communistes vers des alliances avec LFI
De leurs côtés, les communistes sauvent les meubles, mais sans grande victoire. En Seine-Saint-Denis, dans la majorité des 40 communes "rouges", les maires sortants se qualifient au second tour, mais pas forcément en première place, relève France Bleu. Ainsi, à Saint-Denis, bastion communiste depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, le maire sortant, Laurent Russier (PCF), obtient 24 % des voix, devancé par le candidat socialiste Mathieu Hanotin, qui remporte 35,31% des votes.
À Aubervilliers, la maire sortante, Meriem Derkaoui (PCF), se prend une claque et arrive en troisième position à 17,66%. Elle est en ballottage, derrière son ancien adjoint Sofienne Karroumi (DVG), qui obtient 19,08%, et derrière la candidate de la droite, Karine Franclet (UDI), en tête avec 25,69% des voix.
Les communistes font toutefois leur grand retour à Bobigny, après avoir perdu cette commune en 2014. Après une campagne marquée par un livre polémique sur la municipalité sortante, le maire, Stéphane de Paoli, ne s'est pas représenté, remplacé par son premier adjoint, Christian Bartholmé (UDI), qui obtient 26,37% des voix. Abdel Saadi, le candidat communiste, le devance avec 37,65% des voix. À Montreuil, où le taux d'abstention atteint 66,33%, le communiste Patrice Bessac repart pour un nouveau mandat en obtenant 51,34% des suffrages exprimés.
Le communisme national n’existe plus, mais le local continue de payer. Des électeurs qui ne votent pas forcément PCF au niveau national le reconnaissent au niveau local grâce à toutes ses actions sociales (logement, colonies de vacances, etc.)
Vincent Tiberj, sociologue et spécialiste du voteà franceinfo
A noter : au Havre, fief d'Edouard Philippe, le Premier ministre est mis en ballottage avec 43,59% des voix par le communiste Jean-Paul Lecoq (35,87%). Pour le second tour, les communistes entendent s'allier avec les "insoumis" pour se maintenir. "J’espère que nous arriverons à faire des rassemblements avec La France insoumise, nous allons rapidement discuter à Saint-Denis et dans d’autres communes", assure Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, à franceinfo.
Les "insoumis" ont fait l'impasse sur le scrutin
Pour sa première participation aux élections municipales, La France insoumise a joué profil bas. La formation n'a investi aucun candidat, mais a soutenu 550 listes dans toute la France, rendant ses résultats très difficilement lisibles. Défendant le principe "d'auto-organisation", la formation de Jean-Luc Mélenchon se prépare surtout à la présidentielle de 2022 et n'a présenté aucun objectif chiffré pour ce scrutin municipal.
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