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Comptes de campagne : le point sur ce qui est reproché à quatre candidats

De Hamon à Le Pen, de Macron à Mélenchon, les enquêtes réalisées par la presse sur les comptes de campagne des candidats ont révélé des irrégularités potentielles. Et ce malgré la validation de ces comptes par la Commission nationale.

Article rédigé par franceinfo - Hugo Cailloux
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
L'association Anticor a porté plainte contre quatre candidats à la présidentielle de 2017, le 13 juin 2018. Il s'agit de Benoît Hamon, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron. (CHARLY TRIBALLEAU / ALAIN JOCARD / GERARD BOTTINO / EMMANUELE CONTINI / AFP)

Les comptes de campagne des candidats à l'élection présidentielle de 2017 délivrent peu à peu leurs mystères et leurs irrégularités présumées, au fil des révélations de la presse. Dernière enquête en date, celle parue dans Le Parisien, vendredi 22 juin. Elle explique que le candidat du Parti socialiste, Benoît Hamon, a bénéficié de ristournes suspectes pour l'organisation de plusieurs meetings durant sa campagne.

Si tous les comptes ont été validés par la Commission nationale des comptes de campagne (CNCCFP), l'association de promotion de l'éthique en politique Anticor a déposé des plaintes concernant les comptes de quatre d'entre eux : Emmanuel Macron, Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon, et Marine Le Pen. Franceinfo résume les faits reprochés à ces candidats.

Benoît Hamon : des remises suspectes et des soupçons de surfacturation

D'après les révélations de L'Obs et du Parisien, l'équipe de Benoît Hamon a bénéficié d'une remise commerciale de 310 000 euros de la société Match Event, sur une facture totale de 1,7 million d'euros de sonorisation et d'éclairage. Ces 40% de réduction dépassent la limite maximale de "15 à 20%" admise par la CNCCFP. Au total, la commission a tiqué sur 155 635 euros de dépassement. L'association Anticor reproche aux candidats ayant profité de ristournes aussi importantes de contrevenir au principe d'égalité entre les candidats, sanctionné par le Code électoral.

L'équipe de Benoît Hamon assure de son côté que tout est régulier. Face aux questions posées par la Commission, elle a fourni des factures d'autres clients de Match Event censées prouver que ces rabais sont habituels. La commission des comptes de campagne s'est contentée des explications fournies par le candidat.

La CNCCFP a également pointé les factures de deux meetings, celui du 19 mars 2017 à Bercy et celui du 19 avril 2017 place de la République, à Paris, dont les prestations apparaissent jusqu'à "60% plus élevées" que les prix du marché. Le prestataire, la société RégieTeK, justifie ces coûts auprès du  Parisien par l'organisation "dans l'urgence" de ces meetings. L'association Anticor estime que ces dépenses pourraient constituer un financement illégal de la campagne par les entreprises, puisque ces dépenses sont destinées à être remboursées par l'Etat.

Marine Le Pen : des intérêts d'emprunts retoqués

Outre des petites dépenses retoquées par la Commission, un emprunt de 827 017 euros n'a pas satisfait la CNCCFP. Elle a choisi de ne pas rembourser la somme. L'équipe de campagne de Marine Le Pen a contracté un emprunt auprès du Front national et de Cotelec, le micro-parti de Jean-Marie Le Pen. Les intérêts s'élevaient à 827 017 euros. Cela n'a pas satisfait la commission, qui estime que les deux partis n'ont pas eux-mêmes contracté de prêt pour la campagne. Elle a retranché la somme des remboursements. Les comptes de campagne de Marine Le Pen ont été finalement validés par la Commission, et l'Etat remboursera la somme maximale possible à la candidate, soit 10 691 000 euros.

Emmanuel Macron : des remises suspectes

Concernant la campagne électorale d'Emmanuel Macron, la CNCCFP a relevé un total de dépenses "apparemment sous-évaluées" de 208 984 euros. Après avoir reçu les justifications de l'équipe de campagne du candidat, la Commission a validé les comptes.

Plusieurs médias ont épluché dans le détail ces comptes, et ont découvert d'autres ristournes qui avaient échappé à la vigilance de la CNCCFP.

- Deux salles à prix réduit grâce à un proche

Le propriétaire de théâtre parisien Jean-Marc Dumontet a loué deux de ses salles à des tarifs inférieurs à ceux pratiqués habituellement, a révélé franceinfo. Les théâtres Antoine et Bobino ont ainsi été loués 3 000 euros pour un meeting de campagne chacun, contre 13 000 par soir habituellement. Proche d'Emmanuel Macron, Jean-Marc Dumontet s'est défendu en affirmant que l'équipe du candidat avait simplement réussi à bien négocier.

- D'importantes remises par l'entreprise GL Events

Le mouvement d'Emmanuel Macron, En Marche !, a bénéficié d'importantes ristournes de la part de la société GL Events, pour des locations de salles et de matériel lors de meetings du candidat. La société a, par exemple, réduit la facture du meeting du 12 juillet à la Mutualité, à Paris, de 39 863 euros, soit 36% de réduction. L'entreprise évoque des remises habituelles sur ces périodes, révèle Le Monde. Le meeting de la porte de Versailles du 10 décembre 2016 a quant à lui bénéficié d'un rabais de 10 000 euros sur les 39 490 initiaux, poursuit le quotidien, soit près de 25%.

Par ailleurs, la société Jaulin, détenue par GL Events, a accordé une ristourne de 50% sur la location de barrières pour un meeting au centre d'expositions du Paris Event Center, écrit Le Monde.

- La location d'une salle à moins 40% en Seine-Saint-Denis

L’Usine, une salle d'événements située en Seine-Saint-Denis, a accordé un rabais de 40% à l’équipe Macron, en mars 2017, selon Le Monde.

- Des appels ciblés à 24% de moins

L'équipe d'Emmanuel Macron a bénéficié de 76 800 euros de remise pour des appels ciblés, soit 24,24% en moins sur la facture globale, ajoute Le Monde.

- Un tarif "spécial" pour la location d'une salle parisienne

La salle La Bellevilloise, située à Paris, lui a loué ses locaux pour 1 200 euros la soirée. Soit 900 euros de remise.

- Une promotion pour la location d'une péniche à Lyon

En marche ! a versé 996 euros TTC pour un rassemblement festif sur La Plateforme, une péniche située à Lyon, le 7 septembre 2016. Franceinfo a essayé de louer la péniche sous la même configuration, et la simple location nous a été proposée à 2 925 euros.

- Des remises "exceptionnelles" pour des meetings par la société Eurydice

Le candidat Emmanuel Macron a bénéficié d'une "remise exceptionnelle" de 22 000 euros par la société d'événementiel Eurydice pour son meeting d’Arras (Pas-de-Calais) du 26 avril 2017. La prestation totale a été facturée 61 521,47 euros hors taxes (HT).

Pour le meeting de Nantes, Eurydice a appliqué une remise totale, selon les calculs de franceinfo, de 15 206,06 euros HT pour une facture de 47 369,62 euros HT.

- Un logiciel à moins 30%

La société Nation Builder, qui a fourni une plateforme multitâche pour les candidats, a accordé 30% de remise pour le candidat Macron. La facture passe ainsi de 74 000 dollars à 52 000 dollars.

Ces entreprises insistent sur "le caractère 'normal' et 'courant' de ces pratiques", note Le Monde.

Jean-Luc Mélenchon : des facturations inhabituelles

La campagne de Jean-Luc Mélenchon n'a versé que 7 949 euros de salaires pour toute la période électorale, mais a préféré facturer les services des membres de son équipe à des sociétés extérieures. Un rapporteur de la CNCCFP a quitté la Commission pour protester contre le président de l'institution qui lui demandait de signer une lettre qui allait à l'encontre de ses analyses du compte de campagne de Jean-Luc Mélenchon, a-t-il expliqué à Mediapart.

Ainsi, plusieurs des proches du candidat de La France insoumise ont été rémunérés avec le statut d'auto-entrepreneurs. Une dizaine de personnes ont été payées ainsi, d'après les informations de franceinfo. Alexis Corbière, devenu depuis député, a perçu 28 700 euros d'honoraires pendant la campagne.

Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire en mai sur les comptes du candidat. Jean-Luc Mélenchon s'est défendu sur son blog de toute violation du Code électoral. "Je n'ai jamais agi autrement qu'honnêtement", a-t-il écrit.

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