Marine Le Pen et la longue quête des signatures : résumé de la saison 2012
Mardi 13 mars, à 4 jours du premier tour, Marine Le Pen a annoncé avoir obtenu les 500 parrainages. A un moment, elle a craint de ne pas atteindre ce seuil. Bluff ou réalité ? Retour sur la saga : "le FN et les signatures de maire".
"C'est la plus vieille série de la vie politique française, même à la télé, il n'y en a pas qui durent aussi longtemps". Ainsi Nathalie Kosciuscko-Morizet ironise sur l'actualité du jour. La candidate du FN a les 500 signatures et peut se présenter à l'élection présidentielle.
Alors Marine Le Pen, plus forte que "Les Feux de l'amour" et que "Plus belle la vie". Retour sur la saison 2012 du feuilleton "Le Front national à la recherche des signatures".
Résumé des épisodes précédents : sauf en 1981, Jean-Marie Le Pen a toujours atteint le seuil des 500 parrainages. Mais depuis 2002, il affirme que cela a été très difficile.
Pitch : le FN a t-il bluffé ou a-t-il eu de réelles difficultés à recueillir ces précieux parrainages ?
Episode 1 : Max la menace
Extérieur jour. Le Hall 7 du parc des expositions de la porte de Versailles, fin novembre. Marine Le Pen tire la sonnette d'alarme à l'occasion du congrès des Maires. Elle explique être au même niveau qu'en 2007 à la même époque.
"Je préfère soulever le problème tôt dans la campagne, pour en être débarrassé assez vite et pouvoir parler d'autre chose au mois de février", explique-t-elle alors.
Aussitôt ses adversaires évoquent le bluff traditionnel.
Mme Le Pen récuse cette accusation : "ce n'est pas une stratégie électoraliste de ma part comme certains médias l'affirment et je ne cherche pas à faire le buzz sur cette affaire".
Episode 2 : The good wife
Dans la foulée, le FN dépose une demande au conseil constitutionnel pour rétablir l'anonymat des parrainages. Après un parcours administratif et judiciaire, celle-çi est rejetée au mois de février.
Quelques semaines auparavant, devant le Sénat, Mme Le Pen se fait la porte-parole de tous les petits candidats et se pose en victime d'un déni démocratique. "Ne créez pas le parti des orphelins du suffrage universel", proclame lyriquement son soutien Gilbert Collard.
Le FN fait état de pressions du PS et de L'UMP sur les petits maires, notamment à cause du developpement des intercommunalités, qui lient leurs destins à celui de plus grosses communes aux élus encartés. Argument fondé comme le fait que beaucoup de maires ont changé en 2008.
Mais s'associer à l'ensemble des petits candidats permet à Mme Le Pen d'éviter la question qui fâche. Pourquoi a-t-elle autant de difficultés que son père à obtenir les signatures alors qu'elle souhaite incarner un nouveau visage dédiabolisé du Front ?
Episode 3 : Mission impossible
Extérieur jour. Qg du Front national à Nanterre le 5 janvier. Mme Le Pen présente ses voeux à la presse et émet une hypothèse : "il est possible que je ne sois pas candidate à l'élection présidentielle". Selon elle, le FN est en retard sur le tableau de marche par rapport à 2007.
Il s'engage alors une course contre la montre. La candidate du FN dramatise-t-elle son sort pour assurer la collecte ? Les militants sont priés d'aller faire la retape. Les journalistes qui les suivent évoquent de réelles difficultés. Les maires sont réticents.
Le FN s'y est-il pris trop tard ? C'est l'hypothèse avancée par Jacques Cheminade pour expliquer que lui a recueilli les 500 signatures. Tout comme Nicolas Dupont-Aignan ou Nathalie Arthaud, il a commencé la chasse dès 2010 et dans une certaine discrètion.
Au FN, on récuse toute forme d'amateurisme, mais on admet que la séquence de la primaire interne entre Mme Le Pen et Bruno Gollnisch, achevée en janvier 2011 a pris beaucoup d'énergie et de temps.
Mais, selon plusieurs observateurs, le parti a mésestimé les difficultés pensant qu'avec Marine Le Pen ce serait peut-être plus facile qu'avec son père.
Episode 4 : Deseperate Housewife
Intérieur nuit . Plateau du JT de France 2, le 1er mars. Les traits fatigués et l'air las, la présidente du FN affirme solennelle : "il me manque 48 parrainages". A deux semaines de la date limite, elle lance un dernier appel aux maires. Et toujours la même question : bluff ou pas bluff ?
Quelques jours auparavant, Dominique Martin, élu régional de Rhône-Alpes, chargé de la collecte, rassurait des militants. "On va les avoir. Avec une fourchette à escargots. Mais on les aura", expliquait-il. Seulement voilà des maires n'ont pas confirmé leur promesse de parrainage.
Cette incertitude aurait des conséquences financières. Les banques ne prêterait pas d'argent à la candidate. Elle annule deux meetings à Clermont et à Auxerre. L'envoi du document de 16 pages à l'attention des millions de Français est mis en attente. Dans le même temps, elle ne progresse pas dans les sondages toujours située entre 15 et 20% selon les instituts.
Il n'est donc pas certain que sa position de victime du système, jouée ou réelle, soit payante électoralement.
Episode 5 : Happy Days
Extérieur jour. Lumière du petit matin. Dans leurs bureaux, les journalistes de permanence mal réveillés decouvre une dépêche de l'agence Reuters datée de 7h 15. Marine Le Pen annonce avoir ses 500 parrainages.
"Il y a eu une accélération ces derniers jours. L'appel de Marine sur France 2 a payé", explique Louis Aliot, directeur de campagne. Une nouvelle fois, le FN a ses signatures au dernier moment , au risque de relancer les accusations de bluff. "Il n'y a qu'elle qui entretenait le suspense", critique ainsi le socialiste Manuel Valls.
Pour Nicolas Bay, porte-parole de la campagne, l'explication est plus simple. "Les militants voyant l'échéance arriver se sont démenés comme des diables. Ensuite, beaucoup de maires nous avaient prévenus que s'ils nous donnaient un parrainage, ce serait au dernier moment".
Autre explication possible : des déblocages politiques de dernière minute. M. Aliot balaye l'argument et accuse l'UMP d'avoir "maintenu une pression jusqu'au bout pour empêcher Mme Le Pen d'avoir ses signatures".
Générique de fin
A 16 h, Mme Le Pen va se déclarer officiellement candidate à la présidentielle à Hénin-Beaumont, sa terre électorale. Les difficultés pour obtenir ses 500 signatures ont été réelles mais elles lui permettent de poser en victime du système. Et comme dans tout bon scénario, la fin se doit d'être ambiguë afin de permettre au téléspectateur de choisir.
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