Luc Ferry a été brièvement entendu vendredi matin comme témoin par la brigade de protection des mineurs
Le philosophe et ancien ministre de l'Education nationale est sorti vers 10h30 des locaux de la brigade de protection des mineurs où il était arrivé vers 9h20.
Les enquêteurs souhaitaient lui faire préciser les accusations de pédophilie lancées lundi 31 mai sur Canal Plus contre un ancien ministre dont il n'a pas voulu donner le nom.
Dans l'émission Le Grand Journal, le philosophe avait a affirmé qu'un "ancien ministre" s'était "fait poisser à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons", assurant tenir cela des "plus hautes autorités de l'Etat".
Interrogé par différents médias, sur cette "demi-révélation", l'ex-ministre de l'Education (2002-2004) a jusque-là justifié son silence sur l'identité de la personnalité par des raisons juridiques. "Si je sors le nom maintenant, c'est moi qui serai mis en examen et à coup sûr condamné, même si je sais que l'histoire est vraie." Il aurait en revanche renvoyé les enquêteurs vers un ancien patron des renseignements généraux, Yves Bertrand, lequel devrait être convoqué à son tour.
Jack Lang se réjouit de l'ouverture d'une enquête
Vendredi soir, l'ancien ministre socialiste Jack Lang s'est réjoui de l'ouverture d'une enquête préliminaire après les déclarations de Luc Ferry impliquant un responsable politique dans des affaires de pédophilie. "On ne peut pas dire n'importe quoi. Il n'y a pas de démocratie possible si chacun n'assume pas pleinement ses responsabilités avec honnêteté et bonne foi", a déclaré Jack Lang sur Canal +.
"Je pense que cette affaire peut avoir un aspect positif si elle incite les différents responsables à se conduire de façon plus correcte", a-t-il ajouté. Questionné sur le fait qu'il avait dû affronter à plusieurs reprises des rumeurs, Jack Lang a répondu: "Ce n'est pas moi qui suis en cause spécialement. Quand on attire la sympathie on attire aussi la foudre. Je n'ai jamais laissé passer", a-t-il dit, rappelant qu'il avait déjà par le passé engagé des poursuites.
Luc Ferry avait été sommé de s'expliquer
Suite à ses propos, l'ancien ministre de l'Education Luc Ferry a été sommé de s'expliquer par plusieurs ténors de la majorité.
Le porte-parole du gouvernement, François Baroin, avait commenté cette affaire mercredi à l'issue du Conseil des ministres, en jugeant "surprenants" les propos de Luc Ferry. "Soit il est détenteur favorisé d'informations qui s'appuient sur des faits, et dans ce cas il a le devoir de saisir la justice, soit il rapporte des propos qu'il a entendus dans les couloirs et, dans ce cas-là, il n'est plus le philosophe de la rumeur mais il en devient un acteur essentiel."
"Quand il y a des faits avérés c'est une faute de ne pas les révéler mais le droit d'informer, ce n'est pas le droit de calomnier", avait déclaré Alain Juppé, le ministre des Affaires Etrangères, mercredi sur France Culture. "Si M. Luc Ferry a la preuve qu'il y a eu un comportement délictueux ou criminel (...), que M. Ferry saisisse la justice", a encore dit Alain Juppé. "Si on a la conviction qu'il y a eu un délit, voire un crime, on saisit la justice et on ne va pas simplement bavasser dans la presse."
Même point de vue chez l'ancienne garde des Sceaux. "Ce qu'il dit, c'est la non-dénonciation d'un crime. La pédophilie est un crime donc (si) il sait des choses (...), il doit dénoncer les faits et indiquer de qui il s'agit, de quels faits il s'agit", a déclaré Rachida Dati (UMP) sur RMC et BFM-TV. "Juridiquement c'est la non-dénonciation d'un crime", donc "je ne vois pas comment la justice ne peut pas s'emparer de ces propos", a-t-elle ajouté.
Maroc: plainte de "Touche pas à mes enfants"
"M. Ferry doit assumer la responsabilité juridique de ses propos accusateurs, qu'il a faites lors d'une émission publique. Nous allons porter plainte contre X", a déclaré à l'AFP Najia Adib, présidente de l'association "Touche pas à mes enfants", basée au Maroc.
"M. Ferry a fait un acte de dénonciation d'un crime qui a été commis au Maroc. La législation française permet d'ouvrir une enquête sur une simple dénonciation de crime commis en dehors de la France", a indiqué pour sa part Me Yassine Krari, l'avocat de l'association. "La plainte contre X sera déposée au Maroc et la possibilité de la déposer également en France reste ouverte", a estimé Me Krari. "Le Maroc n'est pas un pays anarchique. Il y a des loi et il (Luc Ferry) doit nous dire qui est ce pédophile qui a accompli cet acte au Maroc et que de hautes autorités françaises connaissent, selon M. Ferry."
Luc Ferry plus mesuré dans une interview à "L'Express"
Seule certitude dans cette nouvelle polémique, Luc Ferry a réussi à faire parler de lui. Mercredi, interrogé sur le site L'Express.fr, il s'est montré plus mesuré: "Je n'ai aucune preuve, ni aucun fait précis sur cette affaire, mais à l'époque où j'étais ministre, j'en ai entendu parler. On m'a rapporté mille choses sur mille ministres mais je ne dirai jamais rien, à part si cela mettait en danger la République". Contacté par l'AFP, Luc Ferry n'a pas répondu.
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