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Cantonale à Brignoles : quelles leçons en tirer pour les élections de 2014 ?

Malgré une hausse de la participation, le Front national a remporté l'élection partielle. A cinq mois des municipales, le parti frontiste affiche ses ambitions.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le conseiller général FN, Laurent Lopez, le 13 octobre 2013 à Brignoles (Var). (FRANCK PENNANT / AFP)

Après avoir perdu au second tour dans l'Oise et à Villeneuve-sur-Lot, le Front national a remporté, dimanche 13 octobre, l'élection cantonale partielle de Brignoles (Var). Laurent Lopez, qui avait survolé le premier tour avec 40,4% des suffrages, a obtenu 53,9% des voix, contre 46,1% pour sa rivale de l'UMP, Catherine Delzers.

A cinq mois des municipales de 2014, cette élection était scrutée de près par les états-majors des partis politiques. Le vainqueur a d'ailleurs annoncé qu'il voulait "conquérir la mairie de Brignoles". Peut-on pour autant en tirer des enseignements ? Francetv info a posé la question à deux chercheurs spécialistes du Front national.

Le Front républicain ne fonctionne plus

Eliminés au premier tour, le PS et le PCF avaient appelé à faire "barrage" au Front national. Au second tour, les 2 000 voix supplémentaires obtenues par la candidate de l'UMP n'ont pas suffi. "Il faut prendre des pincettes parce que ce n'est pas une élection nationale, mais le Front républicain a pris un coup sur la tête", analyse Sylvain Crépon, sociologue à l'université de Nanterre et spécialiste du Front national, contacté par francetv info. "Les électeurs de gauche préfèrent s'abstenir plutôt que d'aller voter UMP", poursuit-il, en observant que "la désaffection pour le PS ne profite pas à l'UMP".

Une analyse partagée par Joël Gombin, chercheur en science politique et spécialiste du FN. Pour lui, le discours du PS n'est pas compris parce qu'il est contradictoire. "Le PS explique que le FN monte parce que l'UMP se droitise et se rapproche du FN. Mais dans le même temps, il conseille de voter pour l'UMP contre le FN, développe-t-il pour francetv info. C'est un discours d'une subtilité trop grande pour les électeurs." 

Le chercheur se demande même si ce front républicain n'est pas contre-productif, puisqu'il renforce de fait le discours du FN sur l'"UMPS" et le "front des copains". "En disant qu'il faut voter contre le FN quoi qu'il arrive, on considère le FN comme occupant une place à part dans le champ politique. C'est ce que dit Marine Le Pen quand elle parle d''UMPS'. Ce sont deux discours opposés qui se nourrissent l'un l'autre", observe-t-il.

Le Front national mobilise entre les deux tours

Signe de la mauvaise santé du front républicain, le FN a gagné malgré la hausse de la participation de 14 points entre les deux tours (47,47% des inscrits). L'extrême droite, qui totalisait - en comptant les bulletins du dissident Jean-Paul Dispard - 3 330 voix au premier tour, a obtenu 5 031 voix au second tour. Sur Twitter, son vice-président, Florian Philippot s'est dit "très heureux de voir ce soir que le Front national est le seul parti capable de ramener des abstentionnistes aux urnes".

Les deux spécialistes interrogés par francetv info ne sont pas aussi affirmatifs : "Il y a de nouveaux électeurs, mais c'est un peu tôt pour dire d'où ils viennent", tempère Joël Gombin. Sylvain Crépon partage cette prudence, mais remarque que "les abstentionnistes ont un profil sociologique très proche des électeurs du Front national, des gens de catégorie populaire et peu politisés".

Un résultat qui ne présage rien pour les municipales

Pour l'autre vice-président du FN, Louis Aliot, cette victoire "en annonce d'autres, plus importantes". Mais la performance électorale du FN à Brignoles (Var) doit être relativisée.

Avec le canton de Brignoles, le parti de Marine Le Pen n'a remporté qu'un deuxième siège de conseiller général, sur les plus de 4 000 que compte le pays. Dans ce département, le FN avait déjà remporté un siège de député (Yann Piat) en 1986 et un poste de conseiller général (Eliane de la Brosse) en 1994. "Après ces élections, il n'y a pas eu de déferlante du Front national", rappelle Joël Gombin, qui juge qu'"il ne faut pas extrapoler sur les municipales le résultat de trois partielles [Brignoles, Villeneuve-sur-Lot et dans l'Oise], organisées sur des territoires plutôt favorables au Front national".

"Les municipales sont des élections très particulières, ce sont les candidats implantés et visibles qui s’en sortent le mieux", abonde Sylvain Crépon. Selon lui, le FN ne fera pas de percée à cette occasion. Mais il pourrait en être autrement pour les européennes de mai 2014, une élection traditionnellement plus "protestataire".

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