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"Nazi", "islamo-gauchiste"... La guerre Mélenchon-Valls en cinq actes

L'ancien Premier ministre et l'ancien candidat à la présidentielle de La France insoumise multiplient les joutes verbales depuis quelques jours, avec en toile de fond l'élection de justesse, contestée, du premier aux législatives.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le député de l'Essonne, Manuel Valls, le 3 octobre 2017 à l'Assemblée nationale. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

La guerre est déclarée. Depuis le début du mois d'octobre, les députés Jean-Luc Mélenchon et Manuel Valls s'invectivent par médias interposés. Une dispute entre le leader de La France insoumise et l'ancien Premier ministre qui a même pris une dimension physique, mercredi 11 octobre, avec les révélations d'une altercation à l'Assemblée nationale par Le Canard enchaîné.

Franceinfo revient sur leur discorde qui remontent aux législatives.

Acte 1. L'élection contestée de Valls en juin

Le 18 juin, l'ancien Premier ministre sauve de justesse son siège dans la 1ère circonscription de l'Essonne, avec 139 voix d'avance sur Farida Amrani, candidate de La France insoumise. Une victoire à l'arrachée immédiatement contestée par le parti de Jean-Luc Mélenchon. Sur Twitter, sa responsable de la communication, Sophia Chikirou, n'hésite pas à accuser l'ancien Premier ministre d'être un "tricheur". Un recours devant le Conseil constitutionnel, qui doit trancher prochainement, est déposé.

Des invectives auxquelles Manuel Valls ne tarde pas à répondre, dans un entretien accordé à Libération le 26 juin. "Mélenchon est dangereux", lâche-t-il, avant de récidiver sur RTL quelques jours plus tard. "Manuel Valls a été l'un des Premiers ministres le plus violent de l'histoire de la République", réplique Jean-Luc Mélenchon, le 28, sur Europe 1.

Acte 2. Valls accuse les députés LFI de tenir un "discours islamo-gauchiste"

L'acrimonie entre Manuel Valls et les membres de La France insoumise a repris à la rentrée, lors des débats concernant le projet de loi sur le terrorisme. Dans l'Hémicycle fin septembre puis sur RTL début octobre, l'ancien Premier ministre s'en prend aux députés du parti de gauche radicale. "Je pense que dans leur discours, dans leurs pratiques concernant l’islam radical, il y a de la complaisance, il y a de l’ambiguïté en tout état de cause. [...] Je pense que c’est un discours islamo-gauchiste", déclare-t-il sur les ondes de la station, en visant tout particulièrement Danièle Obono pour des propos polémiques tenus sur BFMTV.

L'utilisation de ce terme controversé, aux contours très flous comme l'explique Libération, ne passe pas. "Vous parlez comme le Front national, ce n'est pas glorieux", réplique aussitôt Alexis Corbière, député LFI de Seine-Saint-Denis, avant de consacrer un post de blog à cette "injure absurde".

Acte 3. Mélenchon claque la porte d'une mission parlementaire dirigée par Valls

La tension monte encore d'un cran le 6 octobre. Trois jours après avoir regretté l'élection de "l'ignoble Valls" à la tête d'une mission d'information de l'Assemblée sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, Jean-Luc Mélenchon claque la porte. "On ne saurait faire choix plus inapproprié. Monsieur Valls est un personnage extrêmement clivant, qui suscite de forts rejets du fait de sa proximité avec les thèses ethnicistes de l’extrême droite", argumente-t-il dans sa lettre adressée au président de l'Assemblée nationale, où il accuse son adversaire de frayer "avec les dirigeants de l'extrême droite israélienne".

Le député apparenté La République en marche dénonce aussitôt un texte "ignoble et outrancier". "En claquant la porte de la mission Nouvelle-Calédonie, [il] affiche son mépris pour les Calédoniens", accuse Manuel Valls sur Twitter. "Que vient faire Israël dans ce débat ? Quel lien avec l'islamisme radical ? Là encore, des raccourcis et allusions évidentes et délétères", tonne-t-ilavant d'inviter "tous les républicains" à un "devoir de vigilance face à ses thèses"

Le lendemain, Jean-Luc Mélenchon s'en prend à "la bande de Valls", accusée d'être "totalement intégrée" à la fachosphère. Une petite phrase qui a donné naissance à un cri de ralliement sur les réseaux sociaux, "Je suis la bande de Valls", immédiatement raillé par les partisans de La France insoumise.

Acte 4. "Le Canard enchaîné" révèle une altercation musclée entre les deux hommes

Mercredi 11 octobre, Le Canard enchaîné révèle que cette joute sur les réseaux sociaux a eu son pendant physique dans la salle de la commission des lois de l'Assemblée, le 3 octobre. "Moi, je ne m'assieds pas à côté de ce nazi", aurait déclaré Jean-Luc Mélenchon, avant de lancer à l'intéressé : "Tu n'es qu'une ordure ! Un pauvre type ! Une merde !" "Mais tu es complètement fou !" lui aurait répondu Manuel Valls, rapidement épaulé par le seul témoin cité par le journal, le socialiste David Habib, qui traite Jean-Luc Mélenchon de "connard".

Après la publication de cet article, le leader de La France insoumise a démenti avoir utilisé le mot "nazi". Et David Habib a changé de version, souligne Libération"Sur le mot nazi, je ne sais plus s’il l’a répété ou si c’est Manuel qui m’a glissé à l’oreille avoir été traité de nazi", explique-t-il au HuffPost.

Le témoignage de Manuel Valls ne permet pas de confirmer l'utilisation du mot fatidique. "Je ne l'ai pas entendu mais il l'a dit, selon différents témoins. Mais devant moi en revanche, il a proféré de nombreuses insultes", a expliqué l'ancien Premier ministre sur Europe 1, avant de poursuivre : "Ce n'est pas un coup de colère de sa part (...) C'est une manière pour lui de disqualifier."

La République en marche est venue à la rescousse. "Qui pourrait trouver normal que Manuel Valls se fasse traiter de 'nazi', qu'on soit dans le même groupe parlementaire ou pas ? C'est inacceptable. Je pense qu'il faut que le déontologue de l'Assemblée nationale soit saisi, a déclaré Stanislas Guerini, porte-parole du groupe majoritaire, sur Radio Classique. C'est inacceptable que des propos comme cela soient tenus dans l'enceinte de l'Assemblée nationale."

Acte 5. Une plainte est déposée pour "fraude électorale"

En plus de son recours devant le Conseil constitutionnel, Farida Amrani a annoncé vendredi 13 octobre à l'AFP avoir porté plainte contre X pour "fraude électorale" auprès du parquet d'Evry, confirmant les informations parues jeudi sur Buzzfeed.

Fin juin, la candidate battue de justesse aux législatives avait dénoncé "plusieurs irrégularités". Se basant sur des photos des cahiers d'émargements de bureaux de la commune d'Evry (Essonne), elle avait notamment affirmé qu'"une centaine de signatures" d'électeurs semblaient "différentes entre le premier et le second tour". Son entourage avait expliqué voir dans ces signatures des imitations effectuées à la place d'électeurs absents.

"Ça mérite qu'il y ait des vérifications qui soient faites", au vu du résultat "extrêmement" serré, a souligné vendredi le député de La France insoumise Alexis Corbière sur France 2.

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