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La cote de confiance de Nicolas Sarkozy a atteint son plus bas niveau historique en décembre à 24%

Interview de Jean Viard.Que révèlent ces "péripéties" sur l"état actuel des deux camps ?J.V. La droite a fait un gouvernement de combat autour de Nicolas Sarkozy : un gouvernement plus réduit, plus expérimenté, plus homogène. Il n"y a ni problème de personne, ni de stratégie. C"est plutôt rassurant en période de crise.
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié
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Arnaud Montebourg, député PS et candidat aux primaires, lors d'un discours en présence de ses militants le 20/11/2010. (AFP - Jeff Pachoud)

Interview de Jean Viard.

Que révèlent ces "péripéties" sur l"état actuel des deux camps ?

J.V. La droite a fait un gouvernement de combat autour de Nicolas Sarkozy : un gouvernement plus réduit, plus expérimenté, plus homogène. Il n"y a ni problème de personne, ni de stratégie. C"est plutôt rassurant en période de crise.

Reste qu"il y a un rejet du chef de l'Etat, que l"on retrouve d"ailleurs dans toutes les démocraties en période de sortie de crise, auquel s"ajoute un rejet lié à la personne de Nicolas Sarkozy.

De l"autre côté, la gauche est dans son processus de désignation mais le problème est que personne ne comprend vraiment ce qui changerait si elle était aux affaires. Est-elle capable de construire un pacte de combat qui serait meilleur que celui de la droite ?

Disons que la conviction n"est pas faite. Les choses restent ouvertes pour 2012.

Pourquoi le parti socialiste est-il en proie à de telles tensions ?

J.V. La gauche française a réussi l"essentiel des objectifs de 1848. Elle a construit le modèle social qui est le fondement de nos sociétés. C"est très bien mais au lieu d"inventer de nouveaux projets, elle ne cesse de répèter : "notre modèle de régulation est en train d"être détruit par les droites".

La droite a moins de difficulté à penser ce futur. Pour quelles raisons ?

J.V. Les droites sont issues des valeurs militaires du 19e siècle et de la culture des frontières. Elles sont donc à l"aise avec les questions liées aux territoires, aux identités et à la mondialisation.

C"est un véritable chantier auquel est confronté le PS pour refonder son corpus idéologique ?

J.V. La gauche est tournée vers le social mais ce n"est plus qu"une question parmi d"autres. Elle doit faire rentrer les autres enjeux dans sa pensée du monde. Et pour l"instant, elle n"arrive pas.

La gauche ne parvient pas à développer une pensée politique intégratrice.

Il y a d"un côté les identités "bricolées" par les extrêmes-droite. De l"autre, la question de la prédation de la nature par l"homme, traitée par les écolos.

Et que fait la gauche ? Elle se replie sur le nationalisme et le refus de l"Europe. On l"a vu lors du référendum.

Est-ce le même constat ailleurs ?

J.V. Tous les pays ne sont pas dans la même difficulté.

Le monde hispanique est passionnant, en pleine vitalité créatrice, à la limite entre le religieux et le socialisme. Il a su associer théorie de la libération et valeurs de gauche.

L"Allemagne se réunifie - deux millions d"Allemands sont revenus, notamment d"Ukraine - et reprend ses marques en Europe centrale.

Quant aux anglo-saxons, ils sont comme des poissons dans l"eau, le monde étant bâti sur le commerce depuis la Révolution Française.

Au fond les deux pays les plus désespérés, c"est l"Italie et nous.

L"Italie a été une grande nation mais aujourd"hui elle ne sait plus être le pont nord-sud, ni être un pont Méditerranée.

En France, au-delà des réformes menées, le Président ne nous permet pas, culturellement, d"incarner la grande tradition des valeurs françaises. Il ne comprend pas que dans des périodes de crise, on a besoin de s"appuyer sur ses fondamentaux. Et nos fondamentaux, c"est d"être le pays des droits de l"homme et des valeurs de 1789.

Au lieu de les mettre en valeur, il fait l"inverse.

Un exemple ?

J.V. Les Roms. Il n"y avait pas besoin de faire un tel cinéma. On pouvait procéder discrètement, comme on l"a d"ailleurs toujours fait. Là, le discours était absolument odieux.

Avoir un ministre de l"Intérieur de la République Française condamné pour propos racistes ferait retourner dans leur tombe les philosophes des Lumières.

On ne sait plus ce qu"être français signifie et à force de l"ignorer, on va finir par considérer que sont français uniquement ceux nés ici et ont la bonne couleur.

Etre français, ce n"est pas cela. C"est partager un certain système de valeurs, reconnaître que la Révolution Française a été l"une des grandes ruptures positives de l"humanité, reconnaître l"idée de liberté, l"amour de la liberté et la laïcité.

Si on casse ces quatre valeurs fondamentales, alors on n'a plus rien à partager et on se replie sur ce dont on est sûr.

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