L'Espagne change de majorité parlementaire : quelles leçons à tirer pour la France ?
La droite espagnole a remporté les législatives dimanche, battant le PS au pouvoir. Trois faits ont marqué cette consultation : défaite du parti au pouvoir, hausse record de l'abstention et progression des "petits partis". Des leçons pour la France ?
Après l'Irlande, l'Islande, le Portugal, et hors élections, l'Italie et la Grèce, l'Espagne change de gouvernement. Les conservateurs du Parti populaire (PP) ont remporté dimanche les élections législatives dans un pays en pleine crise économique et financière.
Echec du parti au pouvoir
Emprisonnée dans la crise de l'euro et soumise à une politique de rigueur, l'Espagne, gouvernée par les socialistes, a changé de majorité dimanche. Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), qui a reconnu sa défaite après plus de sept années au pouvoir, réunit moins de 29% des voix et perd une soixantaine d'élus au Congrès, sa pire performance depuis trente ans.
Ce phénomène n'est pas nouveau en Europe, puisque les gouvernements qui se sont présentés devant les électeurs ont été battus. En Irlande, au Portugal et au Danemark, les gouvernements sortants ont été battus.
En Espagne, le gouvernement socialiste qui proposait une politique de rigueur n'a pas convaincu ses électeurs de le soutenir.
Record d'abstention
Le Parti populaire, qui a remporté le scrutin, est bien sur satisfait de sa victoire. Mais ce succès a été obtenu, selon les chiffres disponibles, avec moins de voix qu'en 2008 qui avait vu la victoire du gouvernement Zapatero.
Explication : moins d'un Espagnol sur deux s'est déplacé pour voter. L'abstention est passée de 26% en 2008 à 53 % en 2011. Un record depuis le retour de la démocratie en Espagne.
Appelés à sa prononcer entre la rigueur du PSOE et la rigueur du PP, les électeurs espagnols ne se sont pas mobilisés en masse.
Progression des petits partis
Troisième leçon de ce scrutin : Le PP et le PSOE (les deux partis majoritaires espagnols) auraient rassemblé à eux deux 73% des suffrages exprimés, contre 83% lors de la précédente consultation législative, soit 10 points de moins qu'en 2008.
Résultat, ce sont les petits partis qui ont progressé : la gauche de la gauche (Izquierda Unida , la Gauche unie regroupant notamment le Parti communiste et les Verts) voit son nombre d'élus multiplié par cinq ou six, passant de deux à onze élus. Même progression d'un parti centriste qui passe de un à cinq élus.
Sur le plan national, ces partis de "second plan" ont réuni 5,2 des 24,5 millions de suffrages exprimés. Au Congrès des députés, ils représenteront désormais 54 des 350 sièges, contre 26 dans la précédente législature.
"Dans aucune autre élection depuis 1982 autant d'électeurs étaient passés d'un parti à un autre. C'est la première fois en vingt ans que, dans leur ensemble, les partis minoritaires, qui reculaient jusque là, progressent", relève Narciso Michavila, président de la société de consultants GAD3.
Le vote espagnol vu par les socialistes français
Le responsable de la communication de François Hollande, Manuel Valls a attribué l'échec des socialistes espagnols au fait que José Luis Zapatero, le premier ministre socialiste sortant, "a menti".
"Il a caché la vérité aux Espagnols, à son peuple, sur l'ampleur de la crise il y a deux ans, a affirmé M. Valls. Il est là, le parallèle : Nicolas Sarkozy, François Fillon mentent aussi aux Français sur la situation économique et financière du pays. Ils préparent un nouveau plan de rigueur".
Pour le porte-parole du parti socialiste, Benoît Hamon, c''est la "défaite historique et cuisante d'un gouvernement qui est arrivé à ces élections épuisé sur le plan politique et idéologique, étranglé par les politiques d'austérité mises en oeuvre en Espagne", a déclaré M. Hamon. La "leçon qu'il faut retenir", c'est qu'"il faut pouvoir proposer une alternative claire face aux choix qui sont ceux de la droite", a-t-il ajouté.
Analyse différente pour un autre socialiste : Gérard Filoche (gauche du PS). Ancien inspecteur du travail, soutien de Martine Aubry pendant la primaire PS, très actif sur Twitter, il affirme : "Ce n'est pas un raz de marée vers la droite, mais un raz de marée d'abstentions à gauche". S'agit-il d'un message destiné au candidat François Hollande ?
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