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L'Assemblée nationale a voté mardi, par 314 voix contre 213, le projet de loi Grenelle 2

"N'en déplaise aux inquiets, aux tristes et aux grincheux, les 250 articles du projet seront les 250 fleurs du printemps de l'écologie", a lancé le ministre de l'Environnement Jean-Louis Borloo à l'issue du vote.A l'opposé, le député Verts Yves Cochet a jugé le Grenelle 2 "décevant" soulignant que les Verts "n'y reconnaissaient pas leur enfant".
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Jean-Louis Borloo, ministre de l'Environnement et porteur du projet de loi Grenelle 2 (AFP - Jacques Demarthon)

"N'en déplaise aux inquiets, aux tristes et aux grincheux, les 250 articles du projet seront les 250 fleurs du printemps de l'écologie", a lancé le ministre de l'Environnement Jean-Louis Borloo à l'issue du vote.

A l'opposé, le député Verts Yves Cochet a jugé le Grenelle 2 "décevant" soulignant que les Verts "n'y reconnaissaient pas leur enfant".

Les groupes UMP et du Nouveau centre (NC) ont voté pour le texte. Les groupes socialiste, radical et citoyen (SRC) et de la gauche démocrate et républicaine (GDR, PC et Verts) ont en revanche voté contre.

Composé de près de 300 articles, sur lesquels avaient été déposés quelque 3.000 amendements, le Grenelle 2 décline en mesures concrètes les engagements et les objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement, négocié en 2007, et inscrit dans la loi dite "Grenelle 1".

Mais si cette-dernière avait été adoptée par les parlementaires à la quasi-unanimité à l"automne 2008, le Grenelle 2 a fait voler en éclats le consensus politique. L"enthousiasme des premiers jours a même cédé la place à la déception, voire le scepticisme chez certains qui considèrent que l"ambitieux projet a été vidé de sa substance.

Des avis partagés
Lors de son organisation, le Grenelle de l'environnement avait suscité un immense espoir, non seulement du côté des politiques, mais dans toute la société. Pour la première fois, des acteurs qui ne se parlaient pas jusque-là, syndicats, ONG, écologistes, collectivités, etc. se sont retrouvés autour de la table.

Moins de deux ans plus tard, beaucoup ont déchanté. Leur désappointement face au Grenelle 2 est à la mesure de l"espoir qu"avait fait naître cette large et inédite concertation.

Plusieurs mesures parmi lesquels la très critiquée loi sur les OGM, ont en effet contribué à « détricoter » le texte initial dit "Grenelle 1". Sans parler des renoncements sur la taxe poids lourds et surtout, du report sine die de la contribution climat énergie, sacrifiée sur l"autel des intérêts partisans.

Pour le député vert de Gironde, Noël Mamère, cette volte-face a une explication : « Il (Nicolas Sarkozy) a rabaissé l"environnement, qu"il avait présenté comme une priorité, au rang de variable d"ajustement de ses difficultés politiques ».

Reste que pour les partisans de la majorité au contraire, l"esprit du Grenelle de l"environnement et les dispositions du Grenelle 2, sont des acquis sans équivalent.

Le contexte a changé

En coulisse, certains élus de la majorité admettent que la crise a rebattu les cartes, laissant entendre que les priorités sont désormais ailleurs. Et du côté des Verts, on déplore que l"écologie soit trop souvent présentée en termes négatifs sous forme d"impôts, de taxes et/ou d"interdictions. Le phénomène n"est pas nouveau.

Il y a depuis longtemps une tension entre écologie et économie et à chaque crise, l"écologie est remise à plus tard expliquent-ils. Si par le passé, l"écologie était perçue comme une contrainte, c'est devenue une opportunité. De grandes entreprises, y compris pétrolières, investissent aujourd'hui dans le photovoltaïque ou l"éolien. Elles ont parfaitement intégré que l"environnement est une variable avec laquelle il faudra compter sur le long terme.

Pour les Verts, l"écologie est l'une des réponses à la crise. Ils plaident même pour une conversion écologique de l"économie, en citant la recherche, l"innovation, la reconversion d"une partie des salariés dans des secteurs industriels plus respectueux de la planète et bien sûr, la création d"emploi.

Comme si, au final, la crise était salutaire pour l"écologie.

Les principales mesures du Grenelle 2
et les reculs

Adopté en conseil des ministres le 11 juin 2008 et voté en première lecture à l'Assemblée nationale puis au Sénat, le projet portant engagement national pour l'environnement dit "Grenelle 2" a été adoptée par les députés, malgré le vote contre du Parti socialiste, des Verts et des communistes.

Habitat et urbanisme

Le texte vise à renforcer l'exigence de diagnostic de performance énergétique.

Il prévoit une norme "basse consommation" pour les bâtiments neufs qui consomment moins de 50 kilowatts heure par mètre carré, l'obligation de mentionner la performance énergétique du bien pour les annonces immobilières et d'opérer des travaux d'amélioration énergétiques des bâtiments, entre 2012 et 2020, pour le secteur tertiaire.

Il renforce le rôle des schémas de cohérence territoriale en vue d'une meilleure coordination entre politiques locale, d'urbanisme, d'habitat et de transport.

Au passif, "l'absence d'encadrement sérieux pour les très nombreuses communes soumises à de fortes pressions d'urbanisation (résidentielle, commerciale ou tertiaire)" selon France Nature Environnement (FNE).

Transport

Le texte vise à favoriser l'usage des transports collectifs. Il prévoit la construction de centaines de kilomètres de voies ferrés supplémentaires, la modulation des péages selon les émissions de gaz à effet de serre pour les poids-lourds et l'obligation de prévoir la création de garages à vélos dans les nouveaux immeubles.

Au passif, le report sine die de la "taxe carbone" et de la taxe écologique sur les poids lourds, annoncé pour 2012, la suppression de la possibilité d'expérimenter les péages urbains dans les villes de plus de 300.000 habitants "au regard des inégalités sociales".

Energie
Le texte vise à renforcer la planification des énergies renouvelables.

La performance énergétique des bâtiments neufs est davantage prise en compte, avec une norme "RT 2012" imposant un plafond de 50 kilowatts heure par mètre carré. Son entrée en vigueur est remise au 1er juillet 2011.

Il étend le dispositif des certificats d'économie d'énergie et encadre le développement des dispositifs expérimentaux de stockage de CO2.

Au passif, un encadrement restreignant et encadrant plus strictement le développement de l'éolien (un parc doit comprendre cinq éoliennes au moins et obéit aux règles des installations classées pour la protection de l"environnement, ICPE) et la non soumission des entreprises, de moins de 500 salariés, au bilan carbone.

L'enquête publique n'est plus obligatoire pour les demandes d'augmentations de rejets radioactifs et chimiques et des prélèvements d'eau des installations nucléaires, à la suite d'un amendement gouvernemental. Une information au public suffira.

Biodiversité

Le projet de loi prévoit la création des trames "verte et bleue" afin de permettre la continuité de la biodiversité sur l'ensemble du territoire.

Cette trame n'est opposable que pour les infrastructures nationales: elle devra simplement être "prise en compte" dans les documents d'urbanismes locaux, notion moins contraignante que la compatibilité.

Santé environnement et gestion des déchets

Le texte renforce les dispositifs de protection des habitants face aux diverses nuisances sonores, radioélectriques et lumineuses. Il rend obligatoire la vente des téléphones portables avec oreillette et interdit leur usage dans les écoles et collèges. La publicité extérieure et la publicité lumineuse sont davantage encadrées. La publicité est restreinte près des écoles et des ronds-points.

Au passif, l'insuffisance des études et des obligations de publicité concernant les effets sanitaires des lignes à très haute tension.

Gouvernance et information
Le texte introduit l'obligation d'un bilan d'émission de gaz à effet de serre (GES) pour les grandes entités publiques ou privées

Au passif, le report de l'obligation d'étiquetage environnemental visant à informer le consommateur de l'équivalent carbone des produits et de leur emballage. Une période d'expérimentation d'un an au minimum lui a été substituée.

Un amendement, proposé et adopté en 1ère lecture au Sénat, a par ailleurs rétabli l'autorisation de la publicité des pesticides pour les jardiniers, accompagnées de quelques contraintes. Ces dernières consistent à "présenter les bonnes pratiques d'utilisation qui permettent de prévenir leurs éventuels impacts sanitaires ou environnementaux".

Le retrait du marché d'un pesticide est soumis à un avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et à l'évaluation des effets socio-économiques et environnementaux de cette mesure.

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