Pouvoir d'achat : "Si les réformes n'aboutissent pas" dans un an et demi, "ça deviendra très compliqué" pour le gouvernement
Invité sur franceinfo, Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof, revient sur les déclarations de Gérald Darmanin et Bruno Le Maire dans la presse dimanche.
Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin s'exprime dans le Journal du Dimanche, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire dans Le Parisien. Dimanche 28 octobre, ils défendent les réformes du gouvernement et leurs mesures pour le pouvoir d'achat, tandis que le président de la République Emmanuel Macron et le Premier ministre Edouard Philippe restent silencieux.
Mais sur franceinfo Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof, affirme que "si les réformes de structures n'aboutissent pas à des éléments concrets dans la vie des Français d'ici un an, un an et demi, ça deviendra très compliqué pour l'exécutif dans la perspective des prochaines échéances".
franceinfo : Est-ce suffisant pour l'exécutif de laisser ses ministres répondre aux inquiétudes des Français ?
Bruno Cautrès : Non, et d'ailleurs ce n'est pas la première fois que les ministres montent ainsi au créneau. Depuis plusieurs mois, en fait, on voit que l'exécutif ou que les ministres concernés expliquent que les réformes engagées sont des réformes au long court, qu'on ne pourra pas toucher les bénéfices de ces réformes tout de suite, qu'il faut être patient, que l'exécutif travaille pour l'avenir de la France. C'est l'un des messages les plus importants d'Emmanuel Macron et d'Edouard Philippe. Edouard Philippe utilise par exemple souvent l'idée qu'il faut réparer la France, comme si la France avait été endommagée et qu'il faudrait aujourd'hui une équipe de réparateurs qui s'attellent aux réformes de structures qui elles n'auront d'effets que dans plusieurs années. Au fond si les réformes de structures n'aboutissent pas à des éléments concrets dans la vie des Français d'ici un an, un an et demi, ça deviendra très compliqué pour l'exécutif dans la perspective des prochaines échéances.
Gérald Darmanin déclare que les réformes vont bénéficier aux Français "qui se lèvent tôt, qui font tourner le pays". Ce genre de phrases n'accentue-t-il pas le mécontentement des Français ?
On retrouve là un élément de langage extrêmement fréquent autour des réformes. Elles seraient dédiées à donner envie aux fameux premiers de cordée d'être encore plus des premiers de cordée et au bout d'un moment, finalement, ça serait eux qui feraient tourner l'économie. Les entrepreneurs, les créateurs, etc. Mais c'est vrai que ce n'est pas exactement le type de déclarations qui vont répondre à l'une des principales critiques qui est opposée : celle d'être détaché des préoccupations des Français et surtout la question du pouvoir d'achat.
Laisser ces deux ministres parler est-il le signal que ce sont les ministres les plus à droite qui pilotent le gouvernement ?
C'est vrai que depuis la composition du gouvernement dans la foulée de l'élection d'Emmanuel Macron, lorsque le gouvernement a été constitué et confirmé après les élections législatives, c'est sûr que deux postes aussi importants occupés par deux personnalités politiques qui viennent du centre droit, des anciens Républicains tout simplement, bien sûr qu'il y avait là un message qui était adressé aux électeurs et notamment aux électeurs de centre droit. Ça a marché pendant un moment donné, les électeurs de centre droit ont bien été séduits par le gouvernement Philippe. Mais on a vu que progressivement c'est dans cet électorat qu'il y a eu aussi des pertes pour l'exécutif. Donc c'est vrai que c'est un des points sur lesquels, à un moment donné, l'exécutif devra sans doute réfléchir. Faut-il infléchir la composition du gouvernement avec des personnalités qui incarneraient un peu plus le centre gauche ? On a vu que le dernier remaniement n'a pas vraiment réussi de ce point de vue-là à envoyer ce message.
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