Ce que peut faire Jean-Marie Le Pen pour annuler son exclusion du FN
Le bureau exécutif du Front national a exclu jeudi le co-fondateur du parti, qui compte bien à nouveau saisir justice en retour.
"Une mascarade, un guet-apens, un simulacre." Au lendemain de son exclusion du Front national, jeudi 20 août, Jean-Marie Le Pen a annoncé qu'il poserait "bien évidemment" un recours devant la justice contre cette décision, sans donner plus de détails. Convoqué pour une quinzaine de griefs, notamment après ses propos réitérés sur les chambres à gaz, le co-fondateur du parti, âgé de 87 ans, a chargé son avocat de faire annuler "cette pseudo-condamnation".
Cet épisode est l'énième rebondissement d'une crise ouverte depuis cinq mois au sein du clan Le Pen. Début mai, Jean-Marie Le Pen avait déjà été convoqué puis suspendu comme adhérent par le bureau exécutif du Front national, avant que la justice n'annule cette décision. Pour la quatrième fois, le "Menhir" assure qu'il se battra par tous les moyens juridiques.
Contester la compétence du bureau exécutif
Pendant plus de trois heures, Jean-Marie Le Pen a été interrogé devant le bureau exécutif de sa formation, en l'absence de la présidente Marine Le Pen et de son bras droit Florian Philippot. Tous deux ont assuré vouloir "respecter une impartialité totale et ne pas être juges et partis". La réunion a donc été présidée par Jean-François Jalkh, premier vice-président du Front national. Etaient présents Nicolas Bay, Louis Aliot, Steeve Briois, Wallerand de Saint-Just et Marie-Christine Arnautu.
Or, le co-fondateur du FN récuse l'indépendance de ces six interlocuteurs, les jugeant incompétents à examiner son cas et "tributaires de la présidente du parti", rapporte Libération. "Il est évident que leur situation de salariés, en les rendant hiérarchiquement tributaires de la présidente ne leur permet pas de juger en toute liberté", reproche Jean-Marie Le Pen.
Déclaration de JMLP devant le BE pic.twitter.com/ELQHTu3nkV
— Aurélie Herbemont (@aurelherbemont) 20 Août 2015
L'ex-président s'appuie même sur l'article 6 alinéa 1 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) pour réclamer la publicité des débats, et l'arrêt Köning, jurisprudence prononcée par la même instance en 1978, sur le droit à un procès équitable, détaille Le Figaro.
Autre élément de défense : l'élue européenne frontiste Marie-Christine Arnautu, présente lors de la séance, a affirmé que la séance ne s'était pas passée comme prévue. "Il avait été convenu quand j'ai quitté Nanterre de nous revoir soit par mail soit de visu, avant les conclusions finales, raconte-t-elle. J'ai appris la décision par coup de fil de Wallerand de Saint-Just." Ce détail pourrait être repris par la défense de Jean-Marie Le Pen. Le patriarche rappelle aussi que sa suspension décidée le 4 mai 2015 a été annulée par la justice, et que le parti ne "peut à l'évidence puiser dans les mêmes faits pour fonder une nouvelle sanction".
Revenir sur son absence lors des délibérations
Techniquement, même suspendu, Jean-Marie Le Pen conserve le titre honorifique de président d'honneur. Avec ce statut, il est membre de droit du bureau exécutif et doit pouvoir assister à ses délibérations, explique Le Parisien (article payant).
Devant les membres du bureau exécutif, il a déclaré : "Je dispose en quelque sorte à l'égard de votre 'juridiction' d'une immunité du fait de mon statut, de la même façon que la présidente en exercice ne pourrait être 'jugée' par le bureau exécutif, ainsi en est-il du président d'honneur". Jean-Marie Le Pen a également demandé la convocation au plus tôt d'un congrès des adhérents du parti ou "à défaut" du comité central, "seule instance démocratique élue du FN".
Le tribunal qui jugera l'affaire pourra décider d'annuler la décision pour des motifs de forme, si les statuts du parti ou si les droits de la défense n'ont pas été respectés. Cependant, Marine Le Pen semble avoir pris soin de renforcer sa position. Elle a notamment fait voter une motion par le conseil d'administration du parti qui désapprouve officiellement les propos tenus par Jean-Marie Le Pen, explique le Huffington Post.
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