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Assemblée nationale : on vous résume la polémique autour du boycott d'un match de foot avec des élus RN en cinq actes

Les députés LFI, PS et une partie des députés Renaissance ont décidé de ne pas participer à un match de football caritatif, mercredi soir, pour protester contre la présence de parlementaires RN dans leurs rangs. Une décision qui a immédiatement fait polémique. 

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Les députés dans l'Assemblée nationale applaudissent l'équipe de France victorieuse de la Coupe du monde 2018 en Russie.  (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

La politique s'invite aussi sur les terrains de foot. Mercredi 28 septembre, des députés et des anciens joueurs professionnels comme Sonny Anderson ou Christian Karembeu doivent participer à un match de football dont les gains seront reversés à l'association "e-Enfance", qui lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement, avec le numéro national 30 18.

Mais à la veille de la rencontre qui se tient au stade Emile Anthoine, dans le 7e arrondissement de Paris, au pied de la tour Eiffel, des députés La France insoumise (FI) et PS ont décidé de boycotter la rencontre pour protester contre la présence de députés du Rassemblement national (RN), entraînant des réactions en cascade d'autres partis. Et posant, une fois de plus, la question de la normalisation du parti d'extrême droite. Quoi qu'il en soit, le match aura bien lieu. Selon Pierre-Henri Dumont, l'un des trois capitaines de l'équipe, le boycott ne concerne pas plus d'une dizaine de députés, sur 34 inscrits. Franceinfo vous résume en cinq actes cette polémique politico-footballistique. 

1Des députés de gauche décident de boycotter le match pour protester contre la présence du RN

Finalement, c'est non. Mardi 27 septembre, Le Parisien révèle que les députés de LFI décident de laisser leurs crampons au vestiaire pour protester contre la présence de quatre députés du Rassemblement national, dont Philippe Ballard et Julien Odoul. Une première pour l'équipe de France des députés, qui, jusqu'à présent, n'accueillaient pas des parlementaires d'extrême droite. 

"Le Rassemblement national a voulu faire de ce match, initialement dédié au service d'une bonne cause, un objet de récupération politique, visant à affirmer sa prétendue 'normalisation'", justifie LFI dans un communiqué mardi. Le parti de Jean-Luc Mélenchon annonce que les élus financeront directement l'association. 

Du côté du PS, l'une des trois capitaines de l'équipe, la socialiste Marietta Karamanli, avait confirmé dans un premier temps sa présence auprès du Parisien. "Je compte bien être vigilante, avec mes collègues, aux comportements des joueurs et attentive à ce que cette participation ne soit pas une tribune et qu'aucun propos ou comportement offensant, discriminatoire, raciste, sexiste ne soit prononcé ou fait", prévenait-elle néanmoins. Mais, finalement, les socialistes emboîtent le pas à leurs alliés de la Nupes et annoncent, à leur tour, le boycott de cet événement sportif. "Les députés socialistes et apparentés refusent cette banalisation de l'extrême droite", écrivent-ils dans un communiqué.

2Aurore Bergé, la présidente de Renaissance, recommande à son groupe de ne pas jouer

Quelques heures plus tard, nouveau coup de théâtre. Cette fois, c'est la présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, qui demande en personne à ses troupes "de ne pas participer à un match qui donnera lieu à une 'photo d'équipe'". Or, "nous ne jouons pas dans la même équipe. Ni extrême droite, ni extrême gauche", a-t-elle écrit dans un message relayé par l'AFP.

"Nous ne choisissons pas la composition de l'Assemblée mais nous choisissons avec qui nous faisons équipe."

Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance

à franceinfo

3Certains députés Renaissance maintiennent leur souhait de jouer ce match

Mais la ligne Bergé n'est pas suivie par tous les joueurs Renaissance. Si certains confirment à franceinfo qu'ils n'y participeront pas, à l'instar de Benjamin Haddad ou de Marc Ferracci, d'autres seront bien sur le terrain mercredi soir. "Dans cette majorité présidentielle, nous ne sommes pas des députés godillots", explique le député des Yvelines Karl Olive à franceinfo"De quel droit, quelle légitimité peut avoir La France insoumise pour nous donner le camp du bien, le camp du mal et pourquoi pas la fois prochaine demander les religions des joueurs ?", poursuit-il.

"Les LFI et le PS n'ont pas fait la même fine bouche quand des RN jouaient dans l'équipe de rugby. C'était sans doute moins médiatique donc pas de coup politique possible", renchérit le député du MoDem Erwan Balanant, qui enfilera bien le maillot sans pour autant "taper dans le dos des RN". Louis Aliot (RN) et Alexis Corbière (LFI) ont en effet joué ensemble au sein du XV parlementaire. "Je ne crois pas que l'on normalise les députés du RN quand on joue un match de foot caritatif, personne ne partage leurs idées, mais on les combat politiquement dans l'hémicycle", ajoute le député Renaissance Stéphane Buchou, qui ne sera pas sur le terrain mercredi soir mais pour des questions d'agenda. 

4Marine Le Pen déplore "la haine, tout le temps"

Invitée de RTL mercredi matin, Marine Le Pen a vivement réagi à cette polémique. "Ça en dit long sur ces gens. En réalité, c'est la haine tout le temps, partout, le combat tout le temps", critique-t-elle. "Ils vont à l'encontre d'une des grandes valeurs du sport qui est que le sport, précisément, c'est l'endroit où on ne fait pas de politique", ajoute-t-elle, convaincue que les groupes appelant à ne pas participer à ce match seront "jugés durement par les Français".

5La polémique rebondit jusqu'au sein du gouvernement

Des ministres s'interrogent aussi sur la position à tenir sur le sujet. Si le RN siège en nombre à l'Assemblée, "ça ne veut pas dire qu'on doit participer à leur volonté de se normaliser", exhorte le porte-parole du gouvernement sur Cnews. Olivier Véran reconnaît néanmoins une "ambivalence" à boycotter ce match : "En vous disant que je n'irai pas jouer, je participe au phénomène qui consiste à faire monter le sentiment qu'ils sont ostracisés, qu'ils sont victimes du système, etc.", développe-t-il.

Interrogé sur Sud Radio, le ministre des Solidarités, Jean-Christophe Combe, regrette d'ailleurs ce boycott qui "rend plutôt sympathiques aujourd'hui" les 89 députés du RN. "Je ne joue pas au football mais je pense que ce n'est pas la bonne façon de combattre les idées du RN", c'est "un mauvais exemple, un mauvais combat à conduire". Jamais un match de foot n'avait autant prêté à une controverse politique. 

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