Affaires Fillon : "Déboussolés", "abasourdis", "révoltés"... La déprime des militants Les Républicains
Alors que les révélations se multiplient dans l'affaire Penelope Fillon, franceinfo a contacté les présidents et secrétaires départementaux des fédérations. Ils racontent l'inquiétude de leurs adhérents.
Ils avaient tout pour gagner. Un président de la République impopulaire qui renonce à se représenter, une gauche divisée et, surtout, un candidat incontesté et apparemment incontestable dans leur camp. François Fillon, choisi à 66% par près de 4,5 millions d'électeurs lors de la primaire de la droite, était leur champion. C'était sans compter l'affaire Penelope Fillon. Depuis les premières révélations du Canard enchaîné, mercredi 25 janvier, sur les emplois présumés fictifs de l'épouse et de deux enfants de l'ex-Premier ministre, les militants Les Républicains vivent un cauchemar : la reconquête, jusque-là si plausible, est devenue beaucoup plus incertaine.
L'ouverture d'une enquête par le parquet national financier trouble et inquiète les adhérents. Si certains commencent à douter de la moralité de leur candidat, d'autres demandent des explications ou crient au complot. Contactés par franceinfo, présidents et secrétaires départementaux racontent le désarroi de leur base.
"Les militants veulent savoir ce qui s'est vraiment passé"
Dans la plupart des fédérations, le téléphone sonne plus souvent qu'à l'ordinaire. Au bout du fil, les adhérents des Républicains veulent comprendre. "Les militants s'interrogent, ils se posent des questions, confie un secrétaire départemental LR du sud de la France à franceinfo. Il n'y a pas de volonté de laisser tomber Fillon, mais plutôt une envie de transparence : ils veulent savoir ce qui s'est vraiment passé. On m'appelle pour avoir des infos, mais pas pour le lâcher." "Les militants sont un peu perdus, renchérit Dominique Bousquet, président de la fédération LR de Dordogne. Ils demandent à ce que la situation s'éclaircisse rapidement."
Pas de cartes d'adhérents déchirées et retournées aux fédérations : officiellement, l'affaire n'a, pour l'instant, pas causé de défection majeure. "On a prévu un tractage ce week-end, on n'a pas eu désistement, assure le secrétaire départemental du Sud. Les militants se serrent les coudes. Ils n'expriment pas de la véhémence, mais de l'inquiétude."
Ceux qui doutent, ceux qui crient au complot
Mais certains commencent clairement à s'interroger sur la moralité de leur champion. "J'ai des militants qui sont révoltés, qui me disent : 'Ce n'est pas le projet ni l'image ou le chemin qu'a tracé François Fillon', rapporte Stéphane Fautrat, dans le Loiret. Il y a une certaine désorientation avec des militants déboussolés et surpris."
La campagne de Fillon était basée sur l'honnêteté, il y a un souci, me disent les militants.
Jacques Baudhuin, secrétaire départemental des Républicains dans la Nièvreà franceinfo
Ce dernier raconte que même les "fillonistes purs et durs" commencent à avoir des doutes. "On doit faire un tractage lundi, mais les fillonistes me disent : 'On va peut-être attendre.' L'inquiétude est arrivée."
A contrario, d'autres se demandent pourquoi les révélations du Canard enchaîné interviennent maintenant, à seulement trois mois de l'élection présidentielle. "Les militants ne me parlent pas de la moralité, mais se basent sur le plan politique, affirme le secrétaire départemental du sud de la France. Est-ce que c'est un complot ? A qui profite le crime ?" "Au départ, les gens étaient abasourdis, sous le coup : François Fillon a fait campagne sur la probité et là, les militants étaient déçus et pas contents", raconte François Goulard, président de la fédération du Morbihan.
Ça évolue. Les militants trouvent que les médias en font trop, et ils se disent : 'Le candidat est bon, il ne faut pas qu'il lâche'.
François Goulard, président de la fédération des Républicains du Morbihanà franceinfo
Une campagne en suspens
Qu'ils soutiennent ou qu'ils doutent de François Fillon, la dynamique de campagne des militants est en tout cas stoppée. "Pour l'instant, j'ai demandé le moins de communication possible, ce n'est pas la peine de provoquer tant que la situation ne s'est pas éclaircie", explique Dominique Bousquet, responsable Les Républicains de la Dordogne.
Je n'envisage pas la suite. Il faut un candidat qui soit capable de gagner. On est certain de rien aujourd'hui.
Jacques Baudhuin, secrétaire départemental des Républicains dans la Nièvreà franceinfo
Dans le Morbihan, la campagne n'avait pas encore réellement commencé, explique François Goulard. Et la faire démarrer maintenant, en pleine affaire, serait contre-productif, selon lui. "Je ne donne pas le top départ, ça ne rimerait à rien aujourd'hui", souffle-t-il. Dans les fédérations, on espère que tout cela n'est que temporaire. "Le balancier peut repartir très vite dans l'autre sens, veut croire Stéphane Fautrat, dans le Loiret. Mais, c'est un peu urgent." La date limite pour se présenter à la prochaine présidentielle est fixée au 17 mars par le Conseil constitutionnel. Si les Républicains doivent trouver un plan B, le temps presse.
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