En meeting à Marseille, Nicolas Sarkozy tente de déjouer le piège de la "présidentielle référendum"
Nicolas Sarkozy a tenu, dimanche 19 février à Marseille, son premier meeting régional devant 15 000 militants UMP, selon les organisateurs. Probablement un peu moins. Le président sortant s'est livré à une longue déclaration d'amour à la France.
Marseille, envoyé spécial - "Aujourd'hui, je suis venu vous parler de la France." C'est par ces mots que Nicolas Sarkozy a ouvert son intervention, dimanche 19 février, pour le premier meeting régional de sa campagne devant un public conquis et ravi de se retrouver face à son candidat.
Désignés vedettes américaines, Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, et Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, avaient brièvement chauffé le hall du parc Chanot où avaient pris place, selon les organisateurs, 15 000 militants. Un chiffre sans doute plus proche, en réalité, de 8 000 à 10 000 personnes mais qui, grâce aux Jeunes populaires, faisaient du bruit comme 15 000.
Le parti du président avait mis les petits plats dans les grands puisque le chef de l'Etat-candidat avait devant lui, outre son épouse, Carla Bruni, une partie du gouvernement emmenée par le premier ministre. Il a rendu hommage, du reste, à François Fillon et à Alain Juppé.
"Jeune, j'ai aimé la France sans le savoir. Beaucoup dans ma famille venaient de loin", a poursuivi M. Sarkozy dans une longue déclaration d'amour au pays qui a formé la trame de son discours. Et comme en écho, on croyait entendre ce slogan qu'apprécie la frange la plus droitière de l'électorat : "La France, aimez là ou quittez là".
Une virule attaque contre Hollande, sans le citer
Cet amour qu'il porte à la France, le candidat de l'UMP ne le décèle pas chez son principal rival : François Hollande. Tout porte à penser qu'il décèle même le contraire.
"Aimer la France, a-t-il dit, c'est refuser d'accepter les 35 heures qui mettent tant d'entreprises françaises hors d'état d'affronter la concurrence des entreprises étrangères".
"Aimer la France, a-t-il poursuivi, c'est refuser de promettre la retraite à 60 ans en sachant que dans moins de 10 ans on ne pourra plus payer les retraites".
"Aimer la France, a-t-il ajouté, c'est refuser d'augmenter les dépenses et d'augmenter les impôts en pleine crise de la dette".
"Aimer la France, a-t-il conclu, c'est refuser d'aborder l'immigration par la seule posture idéologique". "Je n'ai jamais été pour l'immigration zéro qui pour un pays comme la France n'a tout simplement pas de sens", a-t-il assuré, en se prononçant pour une "immigration choisie".
Faire la genèse de la crise
La cible étant pointée, M. Sarkozy a développé une virulente attaque contre M. Hollande, sans jamais citer son nom, qui s'est conclue sur une accusation sans ambiguité : "Quand on aime la France, on ne ment pas tous les jours aux uns pour faire plaisir aux autres (...) Quand on aime la France, on dit la vérité aux Français sur ce que l'on veut faire, sinon on jette un discrédit sur la parole publique".
Et sa vérité justement, le président sortant y a consacré une autre partie de son discours.
Conscient que tous ses adversaires vont l'entrainer sur le terrain du bilan de son quinquennat, il tente, par tous les moyens, de sortir du piège qui consisterait à faire de l'élection présidentielle un référendum "pour ou contre Sarkozy".
Et le moyen le plus sûr, c'est de faire la genèse de la crise contre laquelle, dit-il, il a su protéger les Français. "Depuis 2008, a-t-il ainsi lancé, dans la tempête économique et financière le plus grave et la plus dangereuse que le monde ait connu depuis les années 1930, la France a résisté, la France a tenu. Les Français ont fait face".
Des erreurs ont été commises... avant
Bien sûr, "l'endettement a augmenté", "les fins de mois sont plus difficiles", "il y a plus de chômeurs", "il est difficile de se loger", "on ne pourra plus partir à la retraite à 60 ans", "il va falloir travailler plus longtemps", "c'est vrai, un fonctionnaire sur deux partant à la retraite n'est pas remplacé", a reconnu M. Sarkozy, sans plus entrer dans le détail.
Mais "ces décisions", le candidat de l'UMP "les assume". Et il les assume d'autant mieux qu'elles ont permis aux Français, selon lui, d'éviter le sort peu enviable de "l'ouvrier grec", du "retraité italien" ou bien du "chômeur espagnol qui a si peu de chances de retrouver un emploi".
"Si les Français ont souffert de la crise, a-t-il lancé, c'est à proportion des erreurs qui avaient été commises et qui ont affaibli la France". Avant ! Il faut entendre, évidemment, les erreurs qui ont été commises avant son arrivée à l'Elysée. Cette rhétorique un peu particulière qui tend à donner au président sortant une sorte d'extra-territorialité quinquennale saura-t-elle convaincre ?
Une seule proposition... dejà faite en 2007
La question se pose d'autant plus que le discours de Marseille a été assez chiche en propositions nouvelles. Alors que son entourage ne cesse de dire que sa campagne va donner le tournis, avec une proposition par jour, M. Sarkozy s'est très mollement aventuré sur le terrain du mode de scrutin.
"Je suis attaché au scrutin uninominal à deux tours", a-t-il dit en concédant "on pourrait le corriger à la marge pour que tous les grands courants politiques puissent avoir des députés à l'Assemblée nationale".
Mis à part que M. Sarkozy avait déjà fait cette proposition en 2007, sans lui donner corps pendant son quinquennat, son auditoire a parfaitement compris à quel électorat il tendait une main secourable : celui du Front national. ET les centristes pourrait y trouver aussi leur compte.
"Candidat du peuple contre les élites", le président sortant semblait aussi avoir besoin de mains secourables, en lançant, pour conclure, aux militants en liesse : "Aidez-moi".
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