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"Trahison", "le responsable, c'est moi" : ce qu'a dit Emmanuel Macron aux élus LREM à propos de l'affaire Benalla

Le président s'est exprimé depuis la maison de l'Amérique latine, où les élus de la majorité étaient réunis pour un pot de fin de session parlementaire.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Emmanuel Macron lors d'une visite à Montréal (Québec), le 7 juin 2018. (DAVID HIMBERT / HANS LUCAS / AFP)

Six jours de silence, et finalement, une prise de parole devant les siens. Emmanuel Macron a pris pour la première fois la parole au sujet de l'affaire Benalla devant les députés de la majorité réunis mardi 24 juillet.

>> Affaire Benalla : suivez en direct les nouvelles auditions à l'Assemblée et au Sénat

Depuis l'estrade de la maison de l'Amérique latine, où les élus de La République en marche et du Modem étaient réunis pour un pot de fin de session parlementaire, le chef de l'Etat a évoqué sa "responsabilité" dans le scandale qui secoue le palais de l'Elysée, et a épinglé la presse et l'opposition. Franceinfo récapitule les principales déclarations d'Emmanuel Macron.

Sur les raisons de son silence : "J'ai pris ce pli de choisir le moment où je parle"

Le chef de l'Etat est d'abord revenu sur les raisons de son mutisme, alors que l'affaire a éclaté mercredi 18 juillet au soir avec la parution de l'article du Monde révélant les agissements de son chargé de mission. "Beaucoup se disaient : pourquoi le président de la République ne parle pas ? J'ai plutôt pris ce pli de choisir le moment où je parle et ne pas me le faire dicter. Et je continuerai à procéder de la sorte", s'est justifié Emmanuel Macron.

Quand on est président de la République, on ne parle pas quand il y a une garde à vue (...) et quand les esprits s'embrasent (...) et pour être un des participants d'une mêlée.

Emmanuel Macron

devant les parlementaires de la majorité

Sur les rumeurs : "Benalla n'a jamais été mon amant !"

Emmanuel Macron a ensuite ironisé sur les informations communiquées par certains titres de presse et sur les fausses nouvelles qui ont circulé au sujet de son chargé de mission sur les réseaux sociaux : "Alexandre Benalla n'a jamais détenu de codes nucléaires, Alexandre Benalla n'a jamais occupé à un 300 m² à l'Alma, Alexandre Benalla n'a jamais gagné 10 000 euros, Alexandre Benalla lui non plus n'a jamais été mon amant !  Alexandre Benalla, bagagiste d'un jour, n'a jamais occupé cette fonction dans la durée. Toutes ces choses qu'on a entendues...", a-t-il énuméré sous les rires des parlementaires.

"Les mêmes vous disant tout et n'importe quoi sans que ça les fasse rougir ou s'interroger sur eux-mêmes. Qu'ils soient parlementaires, commentateurs ou journalistes... On dit des fadaises !", a martelé Emmanuel Macron.

Sur les faits reprochés à Benalla : "Cela a été pour moi une trahison"

Avant de revenir sur les faits reprochés à Alexandre Benalla, le président de la République a rendu hommage au "courage" dont a fait preuve par le passé son ancien responsable de la sécurité : "Alexandre Benalla, c'est quelqu'un qui nous a accompagné durant la campagne avec beaucoup de courage et d'engagement. (...) Quoiqu'il advienne dans cette affaire, je n'ai pas à oublier cet engagement."

Le contraste entre cet "engagement" et les faits de violences reprochés à son chargé de mission a visiblement particulièrement déçu le chef de l'Etat.

Ce qu'il s'est passé le 1er mai, (...) est grave, sérieux et a été pour moi une déception, une trahison.

Emmanuel Macron

devant les parlementaires de la majorité

Sur son rôle dans l'affaire : "Le responsable, c'est moi !"

Alors que le ministère de l'Intérieur et la préfecture de police se sont renvoyés la balle au sujet de leurs responsabilités dans l'affaire lors des auditions des commissions d'enquête organisées à l'Assemblée et au Sénat, Emmanuel Macron a finalement accepté de monter en première ligne.

"Et si ils cherchent un responsable, dites-leur que vous l'avez devant vous ! Le seul responsable de cette affaire, c'est moi, et moi seul. Celui qui a fait confiance à Alexandre Benalla, c'est moi, le président de la République. Celui qui a été au courant et a validé l'ordre, la sanction de mes subordonnées, c'est moi et personne d'autre", a tempêté le chef de l'Etat.

Et de dénoncer la "République des fusibles" appelée selon lui des vœux de l'opposition. "Ce qui nous a conduits là, ce n'est pas la République des fusibles, ce n'est pas la République de la haine, celle où l'on fait trinquer un fonctionnaire ici, un collaborateur là. On ne peut pas être chef par beau temps et se soustraire lorsque le temps est difficile. S'ils veulent un responsable, il est devant vous, qu'ils viennent le chercher !", a-t-il lancé d'un air de défi.

Sur les médias : "Nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité"

Emmanuel Macron n'a pas résisté à l'envie d'épingler la presse, qui a révélé l'affaire Benalla. Il déplore notamment des manquements à la "présomption d'innocence" de son ancien chargé de mission, qui a pourtant reconnu les faits qui lui sont reprochés. "Nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité. (...) Je vois un pouvoir médiatique qui veut devenir un pouvoir judiciaire, qui a décidé qu'il n'y avait plus de présomption d'innocence dans la République et qu'il fallait fouler aux pieds un homme et avec lui toute la République", a estimé le chef de l'Etat.

Le président de la République a également eu un mot pour le "pouvoir judiciaire", victime selon lui de trop nombreuses fuites dans la presse.

Pas une audition, pas une recherche ne sort à la seconde même dans la presse. Comment conjuguer la présomption d'innocence avec un tel fonctionnement ?

Emmanuel Macron

devant les parlementaires de la majorité

Il a également fustigé l'attitude de certains parlementaires, coupables selon lui de vouloir "faire sortir le pouvoir législatif de son lit, considérant qu'il appartient au Parlement de se substituer à la justice et de devenir un tribunal populaire, d'oublier la séparation des pouvoirs et de considérer qu'il est de son ressort de contrôler chaque décision de l'Elysée."

Sur les frondeurs potentiels : "C'est toujours une erreur pour le collectif"

Emmanuel Macron a enfin eu un mot à l'attention des parlementaires de la majorité qui seraient tentés par le fait d'émettre une voix dissonante dans cette période de crise politique. Une allusion à peine voilée à l'élue de la Manche Sonia Krimi et au député du Morbihan Paul Molac, qui avait estimé que l'affaire Benalla représentait "le pire du monde d'avant".

"Parfois, nous nous sommes trompés à trop surligner nos différences (...) Je n'ai jamais cru aux disciplines de parti [mais] je préfère le 'en même temps' symphonique au 'en même temps' cacophonique", a déclaré le locataire de l'Elysée. "Et donc, nous nous sommes parfois trompés en pensant qu'émettre une voix dissonante était le signe d'une force."

Et de durcir le ton, avec des propos qui évoquent presque des menaces. "Penser qu'on réussit parce qu'on se décale au moment où un texte est difficile (..) est toujours une erreur. Ca peut être un gain personnel au moment où on le fait, mais c'est toujours une erreur pour le collectif."

Les tireurs couchés d'un jour finissent abattus avec les autres quand ils décident de tirer sur les camarades.

Emmanuel Macron

devant les parlementaires de la majorité

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