Cet article date de plus de neuf ans.

Election du président de l'UMP : un scrutin à hauts risques

L'UMP l'affirme, toutes les précautions ont été prises. Mais le mode de scrutin choisi, le vote électronique, pour désigner le futur président du parti suscite l'inquiétude.
Article rédigé par Yannick Falt
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
  (Le vote électronique suscite l'inquiétude au sein de l'UMP © RF/BS)

Les adhérents de l'UMP sont appelés à choisir leur nouveau président entre Nicolas Sarkozy, Bruno Le Maire et Hervé Mariton. Le scrutin débute ce vendredi à 20 heures. Les résultats seront connus samedi soir. Cette année, les adhérents vont voter de manière électronique ce qui suscite de l'inquiétude en dépit des précautions prises par l'UMP.

 

La première d'entre-elles a été l'envoi par courrier des identifiants et mots de passe aux adhérents de l'UMP. Ils sont 268.000 à jour de cotisation. Tous ont donc reçu dans leurs boîtes aux lettres ces sésames pour pouvoir participer au scrutin. Ce papier, en revanche, ne mentionne pas le numéro d'adhésion – qui se trouve sur la carte d'adhérent et qui est également nécessaire.

 

Une première sécurité donc, pour pouvoir voter sur son ordinateur, sa tablette, son smartphone ou dans l'un des 314 bureaux de vote ouverts en métropole et en outre-mer. Des bureaux de vote qui consistent en un simple ordinateur installé dans les fédérations et section UMP à disposition de ceux qui n'en ont pas. 

Une cellule de crise dédiée

Mais le scrutin électronique présente également d'autres risques, comme par exemple celui de non confidentialité du vote. Le choix des adhérents doit pourtant rester secret, un principe de base en démocratie, rappelé par la CNIL, la Commission Nationale Informatique et Liberté. Et l'anonymat sera bien sûr respecté assure la Haute Autorité de l'UMP chargée de superviser le scrutin.

 

Il y a également, avec le vote électronique, la crainte d'usurpation d'identité et de vote multiple à partir d'un même ordinateur, chez les adhérents comme dans les bureaux de vote. Mais, explique Anne Levade la présidente de la Haute Autorité "des alertes ont été mises en place dans ces deux cas. Et sans connaître le sens du vote, cela permettra d'identifier l'adhérent qui a franchi notre seuil d'alerte ". Et dans ce cas-là, l'adhérent sera contacté pour savoir s'il a bien voté et que ce vote n'a pas eu lieu à son insu". "S'il s'avérait, qu'il y a un problème ou une fraude nous n'hésiterions pas à isoler l'ensemble des bulletins émis depuis cet ordinateur pour le cas échéant les exclure du décompte final ", précise Anne Levade.

 

Ces alertes se déclencheront au dixième étage de l'UMP. Une sorte de cellule de crise du vote électronique avec un écran géant qui affichera les adresses IP des votants et le trafic sur le site de l'UMP dédié au scrutin.

Un scrutin à risques

C'est d'ailleurs un prestataire extérieur, Parangon Elections, spécialisé dans le vote électronique, qui a mis en place ce système. Auparavant, une autre société avait décliné la proposition de l'UMP. "Trop de pression médiatique" ont expliqué ses dirigeants. Paragon est par ailleurs supervisée par un cabinet d'expertise indépendant. C'est une recommandation également de la CNIL. Son nom : Expertis Lab, lui aussi spécialisé dans les scrutins par internet.

 

Expertis Lab s'est déjà occupée du vote des administrateurs des caisses du RSI, la sécurité sociale des travailleurs indépendants avec quatre millions et demi de votants. Beaucoup plus qu'à l'UMP, mais "c'est un scrutin risqué car il est médiatique et qu'il intéresse beaucoup de monde donc on peut se dire qu'il y a un risque de venir perturber le vote ", détaille Bruce Bonnaure le dirigeant d'Expertis Lab. "Il y a trois-quatre risques identifiés ", précise-t-il. "Risques en matière de dénis de service, d'intrusions ou de détournements du lien par lequel les votants ont voté sur le site ". Récemment, c'est le site d'une grande marque de bière hollandaise qui renvoyait brièvement sur le site de l'UMP. Objectif : tenter de le saturer. Des tests dits de montée en charge ont dont été réalisés ces derniers jours, ainsi que des tests d'intrusion. Les experts ont donc joué aux pirates informatiques.

Toujours des inquiétudes

Reste que toutes ces précautions ne suffisent pas à rassurer tous les candidats. Les concurrents de Nicolas Sarkozy redoutent les bugs. L'UMP a d'ailleurs prévu 40 personnes pour répondre aux appels téléphoniques des adhérents. Le problème, c'est que tout s'est fait dans l'urgence regrette Bruno Le Maire. "C'est un vote qui est économique et vu l'état des finances de l'UMP c'est bien. Mais ça se prépare. " Pour Bruno Le Maire, "tout cela a été fait avec un peu de précipitation. Et je pense qu'on aurait pu faire un travail plus sérieux en amont. Cela nous aurait permis, par exemple, d'avoir des résultats par département. Dans un parti organisé par fédérations départementales, c'est quand même original de ne pas avoir ce détail. Ce sont quand même des indications politiques utiles ".

 

Ces résultats par départements ont permis de révéler les anomalies du scrutin Copé-Fillon en 2012. A l'époque, les adhérents avaient voté de manière "traditionnelle", avec des bulletins papiers. La question de la sécurité de ce vote électronique est ultra-sensible et elle a donné lieu à des discussions houleuses entre les différentes équipes de campagne. Trop pour le très sérieux bureau Véritas initialement chargé d'expertiser le scrutin et qui a préféré jeter l'éponge.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.