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Claire Thibout, l'ex-comptable des Bettencourt, était de nouveau entendue jeudi par la police et confrontée à Maistre

La comptable accuse Patrice de Maistre d'avoir remis à Eric Woerth 150.000 euros pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, selon Mediapart.Selon Le Monde, elle a confirmé devant les enquêteurs ses propos sur cet épisode. Mais elle est revenue mercredi soir sur une partie de ses déclarations à Mediapart, selon Le Monde et Le Figaro.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Photo d'une page de Libération montrant des carnets de comptes des époux Bettancourt (AFP)

La comptable accuse Patrice de Maistre d'avoir remis à Eric Woerth 150.000 euros pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, selon Mediapart.

Selon Le Monde, elle a confirmé devant les enquêteurs ses propos sur cet épisode. Mais elle est revenue mercredi soir sur une partie de ses déclarations à Mediapart, selon Le Monde et Le Figaro.

A propos de remises d'enveloppes à Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était maire de Neuilly, Claire Thibout a dit aux policiers qu'elle n'avait "jamais dit que des enveloppes étaient remises régulièrement à M. Sarkozy".

"L'article de Mediapart me fait dire que j'aurais déclaré quelque chose concernant la campagne électorale de M. Balladur. C'est totalement faux. C'est de la romance de Mediapart. De même que je n'ai jamais dit que des enveloppes étaient remises régulièrement à M. Sarkozy", a-t-elle déclaré aux policiers, d'après Le Monde.

De son côté, le site Médiapart rétorque que les propos de l'ex-comptable de Liliane Bettencourt ont été scrupuleusement retranscrites, lors de deux conversations, en présence d'un tiers témoin différent à chaque fois.

"La vérité est rétablie", a affirmé le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant.

L'ex-comptable de la femme la plus riche de France évoquait surtout un éventuel financement illicite de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

Claire Thibout affirmait que l'actuel ministre du Travail Eric Woerth avait reçu en tant que trésorier de la campagne de M. Sarkozy la somme de 150.000 euros en liquide en mars 2007 pour financer cette campagne.

Edwy Plenel, fondateur de Mediapart, a souligné sur iTele qu'"elle ne s'est pas rétractée sur les 150.000 euros", dénonçant le fait que cette affaire tourne au face à face de "David contre Goliath" autrement dit "Mediapart contre l'Elysée".

Selon Le Monde, Mme Thibout a confirmé aux policiers avoir remis à ses employeurs 50.000 euros en espèces - auxquels devaient s'ajouter 100.000 euros retirés de Suisse - mais pas à la date mentionnée.

Quant aux remises d'enveloppes à M. Sarkozy, elle insiste pour dire que ses propos "auraient été romancés", selon Le Monde et le Figaro.

L'ex-comptable est arrivée discrètement jeudi après-midi dans les locaux de la Direction des affaires économiques de la police judiciaire parisienne, pour y être à nouveau entendue, selon des sources proches du dossier.

Au terme de son audition, elle devrait être confrontée à Patrice de Maistre, gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt qu'elle accuse d'avoir remis à Eric Woerth les 150.000 euros pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy.

Le sort des carnets
L'avocat de l'héritière de L'Oréal, Me Georges Kiejman, a montré des photocopies des carnets de caisse sur i-Télé et Libération en reproduit des extraits dans son édition de jeudi. Comptable de 1995 à 1998, Claire Thibout dit y avoir consigné tous les retraits en espèces effectués sur deux comptes ainsi que les utilisations de ces retraits.

Ces carnets, que Liliane Bettencourt disait volés et que la comptable affirmait avoir laissé chez la milliardaire, sont entre les mains de la police depuis mercredi, dit-on de source proche du dossier.

Claire Thibout n'avait pas mentionné à la police les versements en espèces directement aux hommes politiques et notamment à Nicolas Sarkozy quand il était maire de Neuilly (1983-2002), ce qu'elle a fait à Médiapart.

Les policiers envisagent une confrontation entre l'ex-comptable et le gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, qui a contesté mardi devant les enquêteurs les déclarations de l'ancienne collaboratrice.

Quid d'un versement de 50.000 euros
Selon Georges Kiejman et Libération, les fameux carnets mentionnent bien la trace d'un retrait des 50.000 euros retirés sur un compte de Liliane Bettencourt à la BNP à la date indiquée par la comptable, le 26 mars 2007. Aux dires de l'ex-comptable, ces 50.000 euros étaient censés avoir été remis à Eric Woerth, trésorier de la campagne Sarkozy, en même temps que 100.000 euros retirés en Suisse.

Les carnets "ne confirment pas une remise d'espèces de 50.000 euros" à Liliane Bettencourt contrairement à ce qu'avait indiqué la comptable lundi aux policiers, explique le quotidien. "Il n'y a pas le moindre élément qui permette de dire que ces sommes ont servi à autre chose que d'argent de poche" à la famille Bettencourt", estime l'avocat de la milliardaire, Me Georges Kiejman, cité par Libé. Selon ces deux sources, les cahiers mentionnent effectivement une série d'utilisations des 50.000 euros sans rapport avec un financement politique, notamment des achats alimentaires et le paiement d'un relieur.

Claire Thibout voit ainsi ses accusations "en partie contredites" par ces documents qui recensent les dépenses de la milliardaire, commente Libération.

Selon le quotidien, l'ex-comptable "est désormais au pied du mur. Contrainte peut-être d'en dire plus. D'expliciter" les carnets.

"Il faut remonter au mois de janvier (2007, NDLR) pour trouver confirmation des dires de la comptable, qui évoquait des sorties (d'argent, NDLR) importantes destinées à des financements politiques", écrit Libération. "Le 26 janvier, 100.000 euros sont donnés à 'Monsieur'" (André Bettencourt), ajoute le journal. "Ma cliente est catégorique. Quand on sort 100.000 euros pour M. Bettencourt, ce n'est pas pour aller chez le coiffeur", commente l'avocat de la comptable, Me Antoine Gillot, cité par Libération .

De son côté, la comptable a déclaré à Médiapart qu'elle portait toujours cette mention lorsque l'argent était remis à des hommes politiques, pour qu'il ne reste pas de trace écrite.

Claire T: l"ex-comptable de Liliane Bettancourt défie le pouvoir

« Lassée » d"être accusée d"avoir volée des documents, Claire T, qui a noté pendant douze ans tous les retraits d"espèces, défie le pouvoir par des déclarations jugées fantaisistes par ses détracteurs.

Claire T, la cinquantaine, la cinquantaine, a livré des confidences ultra-sensibles en affirmant au site Mediapart qu'Eric Woerth avait reçu en tant que trésorier de l'UMP la somme de 150.000 euros en liquide pour financer la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy au printemps 2007.

Alors que l"Elysée et le ministre du Travail affirment qu"il s"agit de calomnies, son avocat, Me Guillot, estime à l"inverse que "c'est une petite femme au caractère bien trempé, quelqu'un de droit et de loyal". "Elle doit l'être pour avoir été la comptable de Mme Bettencourt pendant douze ans et obtenir un accréditif de 50.000 euros", ajoute-t-il,

En 2008, la comptable avait été entendue dans l'enquête ouverte pour "abus de faiblesse" contre le photographe François-Marie Banier. Elle avait alors témoigné de l"état de santé fragile de la milliardaire, faisant état de pressions constantes exercées par l"écrivain photographe.

L"avocat de M.Banier indique qu"elle n'a apporté "aucune preuve" de ce qu'elle "avance (…) aujourd"hui comme dans le passé".

La comptable a reconnu n'avoir jamais vu la remise d'une enveloppe à M. Woerth mais a souligné que ses accusations reposaient sur les déclarations du gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt, Patrice de Maistre.

Visée par une plainte pour "vol de documents" déposée au parquet de Nanterre par l'avocat de Liliane Bettencourt, Me Georges Kiejman, l'ancienne comptable a été placée en garde à vue les 18 et 19 juin, puis de nouveau auditionnée lundi au siège de
la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).

Elle est accusé par Me Kiejman de ne pas avoir restitué les "carnets de caisse" dans lesquels elle notait les retraits d'espèces qu'elle réalisait à la demande des Bettencourt.

"Par lassitude d'être accusée, elle s'est lâchée, elle en avait marre d'être traitée de voleuse. Elle est soulagée d'avoir parlé même si ce qu'elle endure est dur", dit encore son avocat.

Après la plainte pour abus de faiblesse contre M. Banier et l'audition par la police de plusieurs membres du personnel, deux clans se sont formés au sein des salariés de Mme Bettencourt: les pro-Banier et les autres, explique-t-il. Ceux qui ont témoigné contre le photographe ont été poussés dehors par le gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt et par M. Banier, ajoute-t-il.

Claire T. a été licenciée en novembre 2008 mais "elle est partie avec une lettre d'éloges de son employeuse", ajoute-t-il. "Ma cliente a toujours essayé de protéger Mme Bettencourt, je tiens à le rappeler".

Patrice de Maistre, portrait d'un homme de confiance

Le gestionnaire discret de la fortune de Mme Bettencourt, Patrice de Maistre, apparaît jour après jour comme le personnage central, en dépit de ses dénégations, de cette affaire politico-financière qui touche le sommet de l'Etat.

M. de Maistre, 61 ans, a été désigné devant les policiers par l'ex-comptable de l'héritière de l'Oréal comme l'intermédiaire qui "s'occupait des 'politiques'", dont Eric Woerth.

Ancien expert-comptable au cabinet Deloitte entré au service de Mme Bettencourt en 2003, M. de Maistre a formellement contesté, par la voix de son avocat, les "allégations mensongères" de l'ex-comptable et a menacé d'intenter des actions en justice.

Accusé d'avoir versé 150.000 euros en liquide au printemps 2007 au trésorier de l'UMP pour financer la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, M.de Maitre a déjà été auditionné par les policiers au sujet de son rôle présumé dans des opérations d'évasion fiscale. Si une enquête pour blanchiment de fraude fiscale était ouverte par le parquet de Nanterre, il serait trés certainement à nouveau entendu.

Marié avec la première épouse du patron de LVMH, Bernard Arnault, M.de Maistre a su gagner la confiance de Mme Bettencourt auprès de laquelle il a été introduit par l'ex-PDG de L'Oréal, Lindsay Owen Jones. Il a été rapidement nommé à la tête des deux structures destinées à gérer la fortune de l'héritière, Clymène et Téthys.

Dans les enregistrements, il demande à Liliane Bettencourt de lui offrir un nouveau voilier.

Dans la seule interview accordée depuis le début de l'affaire, M. de Maistre avait reconnu le 25 juin au Figaro l'existence de deux comptes en Suisse non déclarés d'une valeur de 78 millions d'euros dont il n'aurait "découvert l'existence qu'en novembre 2009".

Pourtant, le 27 octobre 2009, il déclare à Liliane Bettencourt: "Il faut qu'on arrange les choses avec vos comptes en Suisse. Il ne faut pas que l'on se fasse prendre avant Noël". Concernant l'un des deux comptes, M. de Maistre précise trois semaines plus tard: "Je suis en train d'organiser le fait de l'envoyer dans un autre pays, qui sera soit Hong Kong, Singapour ou en Uruguay".

Autre détail qui met le ministre du travail en difficulté, les liens de M.de Maistre avec le couple Woerth, ce dernier lui ayant remis en janvier 2008 les insignes de chevalier de la Légion d'honneur. C'est par ailleurs Patrice de Maistre qui a embauché en 2007 Florence Woerth à Clymène, structure qui gère la fortune de l'héritière de L'Oréal, quelques mois après que son époux était devenu ministre du Budget. Une fonction dont elle a finalement démissionné fin juin.

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