Budget 2024, immigration, échéances électorales… On vous résume les grands chantiers de la rentrée politique des principaux partis
Après trois semaines de pause estivale, la vie politique reprend son cours. Le premier Conseil des ministres s'est tenu mercredi 23 août, un mois après le remaniement. Confirmée à Matignon, Elisabeth Borne a rencontré toute la semaine les chefs des partis qui composent sa majorité pour préparer les prochains chantiers. Dans les oppositions aussi, l'automne s'organise. Les partis font leur rentrée, avec des universités d'été qui battront leur plein le week-end des 26 et 27 août. Au programme, des discussions sur les priorités pour la prochaine session parlementaire et des arbitrages concernant les scrutins à venir, à un mois des élections sénatoriales et dix mois des européennes.
Renaissance et ses alliés
Le chef de l'Etat s'est peu exprimé durant ses vacances au fort de Brégançon. Dès son retour, il a prévu une réunion "des forces représentées au Sénat et à l'Assemblée" dans le cadre d'une "initiative politique d'ampleur", et annoncé de possibles référendums sur plusieurs sujets dans une interview au Point. L'objectif est de trouver des terrains d'entente avec les oppositions afin d'éviter une nouvelle année parlementaire chaotique à cause de la majorité relative à l'Assemblée.
Le budget 2024, présenté fin septembre, occupe les esprits des macronistes. "C'est un moment clé pour défendre le pouvoir d'achat des Français", assure la députée Anne Genetet. Emmanuel Macron a en effet promis en mai des baisses d'impôts pour les ménages. La vice-présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée évoque aussi des réflexions en cours après le mouvement de révolte qui a suivi la mort de Nahel à Nanterre (Hauts-de-Seine) le 27 juin, notamment sur l'"autorité" et le "soutien aux familles face à des difficultés éducatives".
Puis, viendra la réforme de l'immigration. Les marcheurs défendent "plus que jamais" la complémentarité de ses deux volets, le régalien et le social, assure le député Sacha Houlié, face aux pressions des Républicains. Faute de majorité absolue, le chef de l'Etat n'exclut pas de recourir à nouveau au 49.3. Les parlementaires du parti présidentiel s'y prépareront lors de leur séminaire de rentrée les 13 et 14 septembre. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, les a devancés, en donnant rendez-vous à ses soutiens le 27 août à Tourcoing (Nord).
Si les macronistes ne nourrissent guère d'ambitions aux élections sénatoriales, ils peaufinent leur stratégie en vue du scrutin européen de juin 2024. L'Europe sera d'ailleurs le sujet phare du campus de Renaissance, du 6 au 8 septembre à Bordeaux. Leurs alliés feront leur rentrée mi-septembre à Angers pour Horizons, autour d'Edouard Philippe, et à la fin du mois à Guidel (Morbihan) pour le Modem de François Bayrou.
Les Républicains
Après avoir étalé au grand jour leurs divisions durant le débat sur les retraites, les Républicains se rassemblent autour d'Eric Ciotti à Levens (Alpes-Maritimes) dimanche pour un "déjeuner champêtre". L'état-major du parti sera présent pour cet événement centré sur la "reconstruction de [leur] famille politique". LR espère retrouver un semblant d'unité lors de l'examen de la loi sur l'immigration. "Si le gouvernement maintient la régularisation des étrangers dans les secteurs professionnels en tension, et qu'il dégaine pour cela un 49.3, il y aura une motion de censure. C'est notre ligne", prévient Pierre-Henri Dumont, député du Pas-de-Calais.
La droite se saisira aussi du débat sur le budget, en présentant à l'automne un "contre-projet" pour réduire les dépenses sociales "improductives" et augmenter les moyens "pour l'autorité de l'Etat", a détaillé sur France 2 Eric Ciotti en juillet.
Hormis ces sujets, le parti veut rester dans une attitude d'opposition mesurée. "On est prêts à voter ce qui va dans le bon sens, ce qui correspond à notre programme, mais on ne veut pas servir de majorité de confort", poursuit Pierre-Henri Dumont, ajoutant que ces questions seront abordées lors de la rentrée parlementaire de la droite, à Saint-Malo, début septembre. Prompte à réagir à l'actualité et aux faits divers, la direction du parti a aussi annoncé mardi "un grand plan de lutte nationale contre le trafic de drogue", après la mort d'un enfant de 10 ans à Nîmes, lundi 21 août, dans une fusillade sur fond de trafic de stupéfiants.
Quant aux élections sénatoriales, la droite les aborde sereinement, quasi certaine de conserver la majorité à la chambre haute. Elle n'ignore pas, en revanche, que les élections européennes seront délicates, après son score décevant de 2019.
Le Rassemblement national
Après un été en sourdine, Marine Le Pen, Jordan Bardella et leurs troupes feront leur rentrée à Beaucaire (Gard) le 16 septembre. L'accent sera mis sur la sécurité, "chantier prioritaire" selon le député de l'Yonne Julien Odoul. La présidente du groupe à l'Assemblée et le chef du parti y "donneront une perspective pour l'année à venir et rappelleront notre combat contre l'immigration anarchique et pour le pouvoir d'achat des Français", développe Julien Odoul.
Le RN espère entrer au Sénat fin septembre. Il prépare aussi les élections européennes et espère à nouveau devancer la liste de la majorité. "Un premier test" avant la présidentielle de 2027.
Lors de leurs journées parlementaires, les députés doivent aussi sélectionner les propositions de loi qu'ils présenteront pendant leur niche parlementaire du 12 octobre. A l'Assemblée, la stratégie reste la même : gagner en crédit en incarnant une opposition "constructive", dit-on au parti, en utilisant tous les outils législatifs à disposition, dont la motion de censure.
La Nupes
A gauche, les quatre partis de la Nupes font leur rentrée le même week-end, mais séparément : les Verts organisent leur université d'été au Havre (Seine-Maritime), tandis que les insoumis se rassemblent à Chateauneuf-sur-Isère (Drôme), les socialistes à Blois (Loir-et-Cher) et les communistes à Strasbourg (Bas-Rhin). L'avenir de la coalition sera au cœur des discussions, après des mois de tensions sur la stratégie, les prochains scrutins et d'innombrables passes d'armes sur les réseaux sociaux. Après la réforme des retraites, celle sur l'immigration sera-t-elle le nouveau combat fédérateur de la Nupes ? Les députés de l'intergroupe se réuniront en séminaire le 18 septembre à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), pour définir un programme de travail commun.
• La France insoumise. L'heure est à la bataille contre le budget 2024, la réforme de l'immigration, "injuste et inefficace", selon le député de Seine-Saint-Denis Eric Coquerel, et le projet de loi plein emploi, "réactionnaire". Mais le rendez-vous clé de cette rentrée est la manifestation "contre les violences policières" le 23 septembre, près de trois mois après la mort de Nahel. "J'espère qu'on arrivera à unifier la Nupes sur ce sujet, cela n'a pas tout à fait été le cas fin juin", avance le parlementaire.
Un autre sujet menace de fracturer la Nupes : les élections européennes, pour lesquelles les Verts et les communistes veulent présenter chacun leur liste. Les insoumis maintiennent la pression pour une liste unique. "On va continuer à plaider en ce sens, jusqu'au bout, car face au danger de l'extrême droite, rien ne doit être fait pour mettre en question l'union de la Nupes aux prochaines élections", lance Eric Coquerel.
• Europe Ecologie-Les Verts. Si l'invitation de Médine aux universités d'été n'a pas causé de remous chez les insoumis, elle a divisé les Verts et parasité leur rentrée. Le parti espère désormais tourner la page et pouvoir se concentrer sur la lutte contre le changement climatique. "Il faut se battre contre chaque fraction de degré, mais aussi travailler sur l'adaptation de notre société, surtout après un été comme celui-ci", résume Julien Bayou, député de Paris, qui annonce plusieurs amendements en ce sens lors de l'examen du budget, pour favoriser le train ou peindre les toits des bâtiments en blanc.
Les bons résultats des écologistes aux dernières municipales laissent espérer quelques gains aux élections sénatoriales. En octobre, ils lanceront une autre campagne, celle des européennes. EELV a choisi de partir seul, avec l'eurodéputée Marie Toussaint en tête de liste, au grand dam des insoumis.
• Le Parti socialiste. L'université d'été des socialistes a fait moins de bruit. Consacrée aux classes populaires, elle accueille notamment deux anciens candidats à la présidentielle, Ségolène Royal et Benoît Hamon. Une petite polémique agite toutefois le PS : la présidente de la région Occitanie, Carole Delga, a choisi de boycotter l'événement, sur fond de tensions entre la ligne pro-Nupes du premier secrétaire, Olivier Faure, et celle anti-Nupes de certains socialistes, dont elle fait partie.
Outre le budget et la loi sur l'immigration, les socialistes comptent cibler le projet de loi sur le plein emploi, qui prévoit notamment de réformer le RSA et Pôle emploi. "C'est une grosse bataille, car ce texte est le symbole des régressions du gouvernement : après la réduction des droits au chômage et à la retraite, Emmanuel Macron va réduire les droits de ceux qui n'ont rien, ou que les minimas sociaux", dénonce Arthur Delaporte, député du Calvados. Le PS tentera également d'attirer de nouveaux militants en organisant à l'automne des conventions dédiées au féminisme, à l'Europe et aux classes populaires.
• Le Parti communiste. Comme les Verts, les communistes ont choisi de faire cavalier seul aux européennes, avec une liste menée par Léon Deffontaines. En choisissant Strasbourg, fief du Parlement européen, ils placent leur rentrée sous l'égide de cette future bataille électorale. Vont-ils continuer à prendre leurs distances avec la Nupes, que leur secrétaire national, Fabien Roussel, a jugée "dépassée" en avril dernier ?
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