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Quatre signes qui montrent que Benoît Hamon a (plutôt) réussi son pari à Bercy

A Bercy, dimanche, Benoît Hamon jouait gros. Avec une salle bondée et un discours très offensif, le candidat socialiste semble avoir réussi son coup.

Article rédigé par Sophie Brunn
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Benoît Hamon en meeting à Bercy, à Paris, le 19 mars 2017 (ERIC FEFERBERG / AFP)

Ce devait être le plus grand meeting de Benoît Hamon. A Bercy, ce dimanche 19 mars, le candidat socialiste voulait (une nouvelle fois) relancer une campagne qui patine. Avec les nombreux ralliements à Emmanuel Macron dans son camp et les mauvais sondages, qui le donnent toujours à la quatrième place, l'ancien ministre avait besoin d'une démonstration de force. Chaude ambiance, ton très offensif, changement de style... Franceinfo liste les quatre signes qui montrent qu'il a plutôt réussi son pari.

Une salle bien remplie : "Bercy déborde !"

"Bercy déborde !" Il est bientôt 15 heures et l’animateur chargé de chauffer la salle peut enfin le proclamer : le meeting affiche complet. Les organisateurs l'assurent, 20 000 personnes sont dans la salle et 5 000 sont restées dehors à suivre la retransmission sur un écran géant. Le décompte est sans doute un peu exagéré, mais le pari est réussi.

On a rempli Bercy, Macron nous a fait c**** pendant des semaines avec son meeting à Lyon à 16 000 personnes, mais là c’est encore mieux.

Un député proche de Benoît Hamon

à franceinfo

Dans les gradins bien fournis, des militants et sympathisants de tous âges et de toute la France. "Cela fait longtemps qu'on n'a pas eu un candidat vraiment de gauche", estime Laurence, venue du Vaucluse pour assister au meeting. Angèle, conseillère départementale dans le Lot, croit la victoire encore possible : "Plein de gens ne savent pas pour qui voter. Nous, on fait campagne, on veut convaincre." L'ambiance dans la salle est au rendez-vous. Drapeaux socialistes et écolos se mélangent. Benoît Hamon traverse longuement la salle sous les applaudissements. Et quand le candidat commence son discours, un cri retentit même, telle une groupie : "Benoîîîîtttt...." A l'issue du meeting, le soulagement de l’équipe de Hamon en dit long sur les doutes qui pouvaient exister avant dimanche. 

Une valeur sûre de la gauche sur scène : Christiane Taubira

Elle a soutenu Hamon dès le second tour de la primaire. A Bercy, Christiane Taubira a mis son éloquence à son service, le jour-même où Manuel Valls, dans le JDD, a acté un peu plus sa prise de distances avec le candidat socialiste. Dernière personnalité à prendre la parole avant le candidat, l’ancienne garde des Sceaux a violemment attaqué Emmanuel Macron, qui représente selon elle la “tentation de papillonner, de picorer ici et là, de transformer un programme en happening et de confondre un projet avec un biopic”. A l’applaudimètre, c’est sans aucun doute elle qui l’emporte.

Benoît Hamon lui a rendu hommage, plaçant dans son discours l’ancienne ministre de la Justice au même rang que Robert Badinter, une valeur sure des meetings socialistes. L’équipe du candidat ne s’y est pas trompée : à la fin du meeting, c’est dans ses bras que le candidat commence par tomber. Idem pour la Marseillaise, propice aux photos de fin de meeting : l’ancienne ministre de la justice est juste à côté du candidat.

Une punchline marquante : "Le parti de l'argent"

L’équipe du candidat voulait faire que Bercy soit “le Bourget de Hamon”, en référence au grand meeting de François Hollande en janvier 2012, resté célèbre pour sa tirade sur la finance :  “Mon adversaire n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature. Il ne sera pas élu. Et pourtant, il gouverne. Mon adversaire, c'est le monde de la finance." Alors Benoît Hamon va lui aussi sur ce thème, puisqu’il juge la campagne “polluée par l’argent”, et rebondit sur la formule de l’actuel président, en mettant dans le même sac François Fillon et Emmanuel Macron.

Le parti de l’argent a trop de candidats dans cette élection. Il a plusieurs noms, il a plusieurs visages, il a même plusieurs partis désormais.

Benoît Hamon

lors de son meeting à Bercy

La phrase restera-t-elle dans les annales comme celle de François Hollande en 2012 ? Peut-elle permettre à Benoît Hamon de relancer sa campagne, lui qui stagne pour l’heure à la quatrième place dans les sondages? Interrogé par franceinfo à l’issue du meeting, un ténor du PS (et soutien de Hamon), relativise l’impact du discours. "Dans un moment où beaucoup d’électeurs de gauche ne savent plus où ils habitent, entre Hamon, Mélenchon et Macron, c’est un bon discours pour parler au peuple de gauche, dire que c’est là que ça se passe et pas ailleurs, estime ce dirigeant du parti. Pour autant, est-ce suffisant pour convaincre au-delà? Je ne sais pas.

Un changement de ton : "C'est la première fois qu'il manque de me faire pleurer"

Tout commence aujourd’hui, tout commence avec vous, tout commence par vous.” Visiblement ému au début de son meeting, Benoît Hamon a changé de ton. D’ordinaire très prolixe sur les sujets du quotidien, le candidat a tenté à Bercy de prendre de la hauteur, n’hésitant pas à se montrer grave, notamment lors de la minute de silence dédiée aux victimes des attentats. S’il a décliné son projet, c’est surtout pour insister sur les valeurs qu’il défend. Il a aussi multiplié les références historiques et a livré sa vision de la France et de la république.

On connaît le Benoît Hamon proche des gens, on veut montrer qu’il sait aussi être solennel.

Un dirigeant de la campagne de Benoît Hamon

à franceinfo

L’ancien ministre de l’Education a aussi parlé de lui, de sa Bretagne natale, de ses origines et de sa famille, évoquant notamment son père, “qui commença à 16 ans comme apprenti puis ouvrier à l’Arsenal”. “Oui, je sais d’où je viens”, affirme Benoît Hamon pour expliquer que “sa famille, sa vie c’est la gauche”. Bref, il s’est lui aussi résolu à fendre (un peu) l’armure, passage obligé d’une campagne présidentielle. Sa femme, très discrète dans la campagne, était aussi présente. Dans les tribunes, des amis de sa famille sont venus spécialement de Brest. "Je l'ai entendu plusieurs fois, mais aujourd'hui c'est la première fois qu'il manque de me faire pleurer, confie Sandrine. On l'a vraiment vu comme il a toujours été, intègre, droit dans ses bottes, à défendre les valeurs qu'il portait déjà adolescent." Ce changement de ton sera-t-il suffisant pour convaincre les électeurs ?

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