"Indécent", "déplorable"… Les maires pointés du doigt par Valls crient aux "effets d'annonce" sur le logement social
Le Premier ministre a rendu publique une liste de 36 communes "qui ne respectent pas leurs engagements" en matière de construction de logements sociaux.
"Quand une loi de la République n'est pas appliquée, il faut dénoncer ceux qui ne l'appliquent pas et faire en sorte qu'elle s'applique, tout simplement." En annonçant, lundi 26 octobre aux Mureaux (Yvelines), que les préfets pourront se substituer aux maires récalcitrants pour attribuer leurs quotas de logements sociaux, Manuel Valls ne s'est pas fait que des amis.
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Le Premier ministre, qui clôturait un comité interministériel consacré à la mixité sociale et à la lutte contre les discriminations, a rendu publique une liste de 36 communes "qui ne respectent pas leurs engagements" en matière de construction de logements sociaux. Une liste de mauvais élèves, situés dans cinq régions ciblées par le gouvernement, qui se voient donc privés de leurs prérogatives en matière de logement social, et qui n'ont pas apprécié d'être mis en cause publiquement.
"Nous faisons le job pour respecter la loi"
"Nous avons appris l'existence de cette liste dans les médias, cet après-midi", raconte à francetv info Eric Schlegel, maire sans étiquette de Gournay-sur-Marne (Seine-Saint-Denis). "La méthode est assez déplorable, et nous nous en serions bien passés, car de notre côté, nous faisons le job pour respecter la loi", continue l'élu, qui pointe la responsabilité de la municipalité précédente, battue en 2014, quant au très faible taux de logement social de la commune (6,6% au lieu des 25% requis par la loi).
L'édile déplore d'autant plus la décision du chef du gouvernement qu'il explique que la construction de logements sociaux dans sa commune relève déjà du champ de compétences du préfet depuis un an. "Après mon élection, j'avais été entendu par le préfet, et je me suis engagé à rattraper notre retard. Cela a d'ailleurs permis de faire baisser le montant de la pénalité que la ville devait rembourser. (...) Depuis, nous collaborons avec l'Etat en espérant récupérer la main sur ce domaine le plus rapidement possible, afin de continuer à construire des logements sociaux à notre rythme."
"Impatient de voir le préfet gérer les incohérences"
Didier Mau, maire du Pian-Médoc (Gironde) et membre du parti Les Républicains, est autrement plus remonté. "C'est indécent ! Que Manuel Valls publie une liste des mauvais élèves, c'est une chose, mais qu'il le fasse en donnant aux Français tous les éléments du dossier", s'agace l'élu, joint par francetv info. S'il reconnaît qu'avec 8,09% de logements sociaux, sa commune est loin de respecter le cadre fixé par la loi, le maire assure que ce sont certains riverains qui ont freiné les efforts entrepris par sa municipalité pour rattraper son retard.
"Un programme important était sur les rails, mais des voisins ont déposé un recours motivé d'une part par des éléments du Grenelle de l'environnement, puis par le schéma de cohérence écologique établi par la région." Et de pointer du doigt les "incohérences" entre les textes régissant le logement social et ceux fixant des contraintes en matière d'environnement. "J'attends avec impatience de voir comment le préfet va gérer cela !" lâche-t-il, avant d'ajouter que "plutôt que de faire des effets d'annonce, Manuel Valls ferait mieux d'agir sur le front de l'emploi. C'est là qu'il sera jugé."
"Je fais partie de l'erreur judiciaire !"
Comme les autres maires pointés du doigt interrogés par francetv info, Nicolas Dupont-Aignan juge qu'il n'a rien à faire sur la liste des mauvais élèves. "C'est scandaleux, je fais partie de l'erreur judiciaire ! J'ai rempli 80% des objectifs fixés par l'Etat. Ma commune approche des 14% de logements sociaux, et nous devrions atteindre les 20% d'ici cinq à sept ans", assure le député-maire de Yerres (Essonne).
"Je n'accepte pas d'être traîné dans la boue par un Premier ministre qui baisse les dotations aux communes, puis qui s'étonne qu'elles n'aillent pas assez vite", enchaîne le président du parti Debout la France, qui s'estime "bien sûr" personnellement visé par l'exécutif. Et de souhaiter, un peu amer, "bon courage" au préfet qui prendra son relais sur le logement social. "Dans une ville où il n'y a pas de terrain disponible, il faut préempter des logements au tarif du marché. Avec quels crédits d'Etat le préfet le fera-t-il ?"
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