Qui sont les dix prévenus du procès Bettencourt ?
Le procès du volet "abus de faiblesse" de l'affaire Bettencourt s'ouvre lundi au tribunal de Bordeaux, pour cinq semaines. A la barre figurent, notamment, le photographe François-Marie Banier et l'ex-ministre Eric Woerth.
Ont-ils exploité la vulnérabilité de Liliane Bettencourt pour profiter de son immense fortune ? Huit ans après le début de la retentissante affaire Bettencourt, dix personnes sont jugées, à partir du lundi 26 janvier, devant le tribunal correctionnel de Bordeaux (Gironde). Un procès de cinq semaines qui se déroulera sans Nicolas Sarkozy : un temps mis en examen, l'ex-chef de l'Etat a finalement bénéficié d'un non-lieu en octobre 2013, mettant fin aux poursuites le concernant dans cette affaire.
La plupart des dix prévenus sont poursuivis pour "abus de faiblesse" au détriment de la milliardaire, âgée de 92 ans et détentrice de la 11e fortune mondiale, évaluée à 34,5 milliards de dollars (30,8 milliards d'euros). Une bonne partie de la procédure repose sur une expertise psychiatrique, effectuée en 2011, attestant que l'héritière de L'Oréal se trouvait en état de vulnérabilité depuis 2006. Mais celle-ci est contestée par les avocats de la défense car menée par une experte proche du juge d'instruction Jean-Michel Gentil.
Pour y voir plus clair, francetv info revient sur les dix prévenus dans cette affaire et sur les charges qui pèsent sur eux.
François-Marie Banier et Martin d'Orgeval
Qui sont-ils ? Surnommé "le photographe des stars" à partir des années 1970, François-Marie Banier fait la connaissance de Liliane Bettencourt à l'occasion d'un portrait pour le magazine Egoïste en 1987. Au fil des années, la milliardaire tisse des liens d'amitié avec l'artiste et son compagnon, Martin d'Orgeval, lui aussi photographe.
Que leur reproche-t-on ? Tout est parti d'une plainte déposée à la fin 2007 par la fille de Liliane Bettencourt, Françoise Bettencourt-Meyers, qui ne supporte pas les largesses accordées par sa mère à François-Marie Banier. Des cadeaux qui atteignent des sommes faramineuses, notent Les Echos : 844 millions d'euros de contrats d'assurance-vie, 53 millions d'euros de créances, une trentaine de millions d'euros d'œuvres d'art… A la suite du tourbillon médiatique et judiciaire déclenché par l'affaire, le photographe a renoncé à une partie de ces sommes.
Que risquent-ils ? François-Marie Banier et Martin d'Orgeval sont tous les deux poursuivis pour "abus de faiblesse" et "blanchiment", deux infractions passibles chacune d'une peine maximale de trois ans de prison et 375 000 euros d'amende.
Patrice de Maistre
Qui est-il ? C'est l'ancien gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, une fonction qu'il a occupée de 2003 à 2010. Un personnage central de l'affaire, dont le rôle présumé a éclaté au grand jour lors de la publication dans la presse d'enregistrements clandestins dévoilant des conversations privées avec Liliane Bettencourt. Agé de 65 ans, il est le seul protagoniste du dossier à avoir été placé en détention provisoire au cours de l'instruction, pendant 88 jours, au printemps 2012.
Que lui reproche-t-on ? Dans des enregistrements pirates réalisés par le majordome de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre évoque plusieurs opérations d'évasion fiscale. L'ancien gestionnaire de fortune est également soupçonné d'avoir touché plus de 5 millions d'euros de la part de la milliardaire à une époque où elle était en état de vulnérabilité.
Que risque-t-il ? Comme François-Marie Banier, il comparaît pour "abus de faiblesse" et "blanchiment", deux infractions passibles chacune de trois ans de prison et 375 000 euros d'amende.
Eric Woerth
Qui est-il ? Ancien trésorier de l'UMP, pendant la campagne présidentielle de 2007, puis ministre du Budget et du Travail de Nicolas Sarkozy, Eric Woerth apparaît dans le dossier en 2010, lorsque son nom est cité dans les enregistrements clandestins. A partir de cette date, l'affaire Bettencourt devient l'affaire Woerth-Bettencourt et prend une tout autre tournure médiatique, qui va jusqu'à éclabousser Nicolas Sarkozy.
Que lui reproche-t-on ? Selon l'ex-comptable de Liliane Bettencourt, Claire Thibout, Eric Woerth aurait reçu, au printemps 2007, 150 000 euros en liquide de la part de Patrice de Maistre, dans le but de financer illégalement la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Mais la destination de cet argent n'a pu être établie au cours de l'instruction. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'infraction de "financement illégal de campagne électorale" n'a pas été retenue et que Nicolas Sarkozy a bénéficié d'un non-lieu.
Que risque-t-il ? Eric Woerth est poursuivi pour "recel" d'une somme qui lui aurait été remise par Patrice de Maistre. Il encourt cinq ans de prison et 375 000 euros d'amende.
Les six autres prévenus
L'avocat Pascal Wilhelm a succédé à Patrice de Maistre comme gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt. En 2011, Françoise Bettencourt-Meyers dépose une nouvelle plainte : elle accuse Pascal Wilhelm d'avoir rédigé un document dans lequel la milliardaire le désigne pour s'occuper de son patrimoine si elle n'était plus capable de le faire elle-même. Une opération retient particulièrement l'attention : l'avocat aurait poussé la milliardaire à investir 143 millions d'euros dans LOV Group, une société appartenant au producteur audiovisuel Stéphane Courbit. Or, il s'avère que Me Wilhelm était, par ailleurs, l'avocat de Stéphane Courbit. Les deux hommes sont renvoyés devant le tribunal pour "abus de faiblesse".
Un chef d'accusation également retenu contre Alain Thurin, un infirmier de Liliane Bettencourt, bénéficiaire de 10 millions d'euros sur le nouveau testament de la nonagénaire, rédigé en 2011. Le notaire Patrice Bonduelle est, quant à lui, poursuivi pour complicité des abus de faiblesse qu'auraient commis Pascal Wilhelm, Stéphane Courbit et Alain Thurin. Un autre notaire, Jean-Michel Normand, âgé de 80 ans, est, lui, jugé pour "complicité d'abus de faiblesse commis par François-Marie Banier, Martin d'Orgeval et Patrice de Maistre".
Enfin, Carlos Cassina Vejarano, ancien gestionnaire de l'île d'Arros (Seychelles), dont Liliane Bettencourt était propriétaire, est renvoyé pour "abus de faiblesse" et "abus de confiance". Il avait reçu, de la part de la milliardaire, la somme de 2 millions d'euros en 2009.
Le volet "abus de faiblesse" de cette tentaculaire affaire, est le premier à donner lieu à un procès. Mais au terme des cinq semaines d'audience, la justice n'en aura pas fini avec le dossier Bettencourt. Trois autres procès se tiendront prochainement à Bordeaux. Dès le 23 mars, Patrice de Maistre et Eric Woerth comparaîtront une nouvelle fois pour "trafic d'influence". Le premier est soupçonné d'avoir fourni un travail à l'épouse de l'ancien ministre UMP,dans la société Clymène de Liliane Bettencourt, en échange d'une Légion d'honneur.
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