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Cinéma : "Retour à Montauk" un film de Volker Schlöndorff au cinéma le 14 juin

L’écrivain Max Zorn arrive à New York pour promouvoir son dernier roman. Il y raconte l’échec d’une passion dans cette ville, il y a 17 ans. Presque par hasard, il revoit Rebecca, la femme en question. Ils décident, encore une fois, de passer un weekend ensemble à Montauk, le petit village de pêcheurs au bout de Long Island. Ils y reviennent pleins d’espoir et de regrets

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
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Affiche (GAUMONT)

Entretien avec Volker Schlöndorff

Retour À Montauk a été échafaudé sur une longue période.

Oui. J’ai décliné la proposition lorsque Rainer Kölmel m’a suggéré la première fois, il y a cinq ou six ans, de faire un film d’après Montauk de Max Frisch : s’il était possible d’adapter ce livre, je l’aurais fait depuis longtemps. J’en avais discuté avec Max Frisch lorsque nous travaillions sur Homo faber, et nous étions tous les deux d’accord : bien trop autobiographique, bien trop essayiste. Ce n’est pas un récit cinématographique. Mais, quelques décennies plus tard, je me suis dit : et si on ne partait que de la trame de base ? Un écrivain vient à New York pour présenter son nouveau roman. Pendant son séjour, il rencontre des personnes de son passé et de son présent, ce qui donne une histoire assez simple qui se déroule sur une semaine – sans message, comme chez Max Frisch. Ça a été notre point de départ.

Mais plusieurs années ont passé avant que vous soyez satisfait du scénario ?

Max Frisch a dit un jour : "Quiconque jette un regard en arrière sur sa vie a le sentiment que c’est un roman." J’avais besoin de l’aide d’un écrivain pour écrire ça : Colm Tóibín que je connais personnellement depuis plusieurs années. Suite à nos conversations, Colm a écrit un premier traitement encore très tourné vers Max Frisch. Nous avons gardé ce projet en tête pendant – croyez-le ou non – cinq ans, en revenant sans cesse dessus. On s’asseyait l’un en face de l’autre – parfois à New York, parfois à Berlin – on écrivait à quatre mains et on testait les dialogues en se les criant l’un à l’autre. Au bout du compte, nous avons décidé – sur une suggestion de Peter von Matt, l’exécuteur testamentaire de Max Frisch – de nous éloigner complètement de Max Frisch pour que Retour à Montauk devienne un travail indépendant. Et plus il devenait indépendant, plus il semblait personnel. Au final, nous avons créé le double portrait d’un écrivain, car aussi bien Colm Tóibín que moi y avons intégré des expériences de nos propres vies.

Découvrez la bande-annonce de Retour à Montauk :

Retour À Montauk est votre premier film contemporain, moderne, depuis longtemps.

Depuis plusieurs années, je ne tournais que des films historiques, sur la Deuxième Guerre mondiale ou avec un contenu politique comme point de départ. Mes films étaient des adaptations, racontaient l’histoire d’autres gens. Cette fois, c’est la mienne, située à New York, ville où j’ai vécu de nombreuses années et que je connais très bien. C’est ce qui fait que ce film est très personnel. Cela faisait des années que je ramais pour monter cette production. Jusqu’au jour où j’ai rencontré Regina Ziegler – on se connaissait depuis des lustres, mais on n’avait jamais travaillé ensemble. Elle m’a aidé à financer le film. J’ai aussi comme partenaire Francis Boespflug, de la société française Pyramide Productions, avec qui j’avais déjà fait Diplomatie, grand succès en France. Et Gaumont, comme coproducteur et distributeur mondial. Enfin, un autre partenaire – en dehors des chaînes de télé et des financeurs – est apparu de manière assez inattendue : Til Schweiger qui a spontanément conclu son soutien d’une poignée de main au cours d’un dîner. Alors que nous ne connaissions même pas très bien ! N’est-ce pas une jolie histoire pour le cinéma ?

La collaboration avec les acteurs était-elle étroite ?

C’était un plaisir de travailler avec des acteurs dont les rôles étaient progressivement écrits pour eux. C’était un travail d’équipe. On a travaillé ensemble à peaufiner le scénario et à adapter les situations et les dialogues pour Stellan Skargård et Nina Hoss, et plus tard pour Susanne Wolff, la jeune collègue Isi Laborde et Niels Arestrup. Après avoir tout balayé, pour ainsi dire, et testé chaque nuance du texte au cours des répétitions, on a pu tourner le film quasiment d’une traite comme un reportage. J’ai rarement pris autant de plaisir à travailler avec des acteurs et, par-dessus tout, à voir chacun d’eux s’approprier le projet pour en faire leur propre film. Je crois que je peux le dire : Stellan Skarsgård joue ici le rôle de sa vie.

Capture d'écran de Retour à Montauk (Ziegler Film - Franziska Strauss)

Qu’est-ce qui fait de Montauk un lieu propice à la nostalgie ?

Montauk signifie "la fin des terres" en amérindien. C’est l’île qui se trouve au large de la côte américaine. Elle s’étend dans l’Atlantique, avec le phare à sa pointe. On retrouve ce genre d’endroits au Portugal ou en Bretagne. Ce sont des lieux à part où on a le sentiment que la terre s’arrête là. La vie elle-même ne s’arrête pas là, mais on ne peut que revenir sur son passé. D’ailleurs, c’est Max Frisch qui a créé le mythe de Montauk. Avant lui, seule une poignée de personnes, telles qu’Andy Warhol, Peter Beard et Julian Schnabel, s’était intéressée au phare de Long Island et beaucoup n’avaient jamais entendu parler de Montauk aux Etats-Unis. Et soudain, par son histoire, Max Frisch a rendu ce lieu mythique. Un lieu où l’on est coupé du monde – il n’y a plus que le ciel et la plage sans fin – et assailli par les souvenirs. Et c’est là que les fantômes surgissent sur la plage, sortant de votre subconscient. Pendant les répétitions avec les acteurs, ainsi que lors des nombreuses discussions avec des amis et notre équipe, il y avait toujours quelqu’un pour dire qu’il avait vécu la même chose. Tous, homme ou femme, semblent rétrospectivement se poser la question de savoir s’ils sont avec la bonne personne ou s’ils n’ont pas laissé un autre grand amour dans le passé. C’est la question universelle derrière cette histoire – bien qu’aucune réponse ne soit donnée.


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