Cet article date de plus de six ans.

Cinéma : « La route sauvage », le nouveau film de Andrew Haigh, au cinéma le 25 avril

Charley Thompson a quinze ans et a appris à vivre seul avec un père inconstant. Tout juste arrivé dans l’Oregon, le garçon se trouve un petit boulot chez un entraineur de chevaux et se prend d’affection pour Lean on Pete, un pur-sang en fin de carrière. Le jour où Charley se retrouve totalement livré à lui-même, il décide de s’enfuir avec Lean on Pete, à la recherche de sa tante dont il n’a qu’un lointain souvenir. Dans l’espoir de trouver enfin un foyer, ils entament ensemble un long voyage …

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
La Route Sauvage (SCOTT PATRICK GREEN)

Pour son quatrième long métrage, l’auteur et réalisateur anglais Andrew Haigh a choisi d’adapter au cinéma, un roman de l’écrivain Américain, Willy Vlautin. C’est en 2011, peu de temps avant la sortie américaine de « Week-end », que Haigh a découvert « Lean on Pete » – publié en français sous le titre « Cheyenne en automne ». Le roman partage des thématiques avec ses films : la solitude du personnage principal, les liens inattendus qu’il parvient à créer - notamment avec Lean on Pete, un vieux « quarter horse ». Andrew Haigh a tout de suite vu le potentiel cinématographique du récit : les grands espaces de l’Ouest américain que les personnages traversent, mais aussi la puissance émotionnelle de leur parcours, ainsi que la capacité d’espoir, dans l’adversité, du jeune Charley. Pour Andrew Haigh, il y avait la matière d’une odyssée américaine contemporaine.

Le roman de Willy Vlautin

Le livre de Willy Vlautin a comme personnage central un adolescent de 15 ans, solitaire et autonome, que le monde ne cesse de décevoir, mais qui refuse d’abandonner sa quête de stabilité, de liens avec autrui et d’un foyer. Alors qu’il traverse les plaines de l’Ouest à la recherche d’une famille, le jeune héros, Charley Thompson, trouve un équilibre dans l’amitié qui le lie au cheval de course dont son propriétaire bourru, Del Montgomery, lui a confié la garde et le soin. « Willy Vlautin décrit de façon très vivante la vie quotidienne au champ de course, explique Andrew Haigh. Ce n’est pas comme dans les grands hippodromes : ici, les portefeuilles ne sont pas bien garnis et personne ne fait fortune. Mais une communauté s’y forme – presque une famille. »

Willy Vlautin a placé en épigraphe de son roman ces mots de John Steinbeck, tirés de À l’Est d’Eden : « J’en conviens, nous sommes faibles, malades, laids et querelleurs, mais si nous n’étions que cela, il y a bien longtemps que nous aurions été rayés de la surface de la Terre. » La phrase résonne au fil du roman, à travers l’infatigable résilience du jeune Charley, particulièrement dans la deuxième partie du livre, alors qu’il parcourt la campagne américaine.

« Charley veut recevoir de l’amour et en donner, explique Andrew Haigh. Plus le récit progresse, moins stable est sa situation ; le voyage vers un lieu, une famille auxquels il pourrait appartenir n’est pas sans danger. Le roman est déchirant mais jamais sentimental. L’amitié de Charley pour Lean on Pete révèle la gentillesse naturelle de ce gamin, sa compréhension profonde que nous partageons tous le besoin d’être protégé. »

La Route Sauvage (SCOTT PATRICK GREEN)

L’adaptation d’Andrew Haigh

Ce n’est pas uniquement le folklore des champs de course de seconde zone et de ceux qui les fréquentent qui a attiré Andrew Haigh. La solitude du personnage principal, son désir de liens affectifs, familiaux ou amicaux, fait écho à ses précédents films : la rencontre des deux héros de « Week-end », et l’amitié inattendue qui les lie l’espace de quarante-huit heures, les failles qui se créent au coeur du couple de vieux mariés de « 45 ans », les relations compliquées du petit groupe de personnages de « Looking », la série à laquelle il a participé en tant qu’auteur, producteur et réalisateur - jusqu’à en signer l’ultime épisode sous la forme d’un long-métrage pour HBO.

« Il y avait une simplicité dans le roman que je voulais retrouver dans le film, explique Andrew Haigh. Le voyage de Charley n’est pas qu’un classique récit d’apprentissage qui le conduirait vers l’âge adulte. Il y a quelque chose de plus fondamental : ce qui l’entraîne est un besoin désespéré d’appartenance à un foyer, une famille - la quête d’un lieu où il se sentirait protégé. ». Le cinéaste appréciait aussi la façon dont le romancier ne juge ni ne condamne aucun de ses personnages, quels que soient leurs actes. « Il sait que ce sont des gens essayant de garder la tête hors de l’eau et que cet effort a un impact sur leur conduite. C’est vraiment un texte sur la recherche de compassion de la part de ceux qui sont dans le besoin. »

La Route Sauvage (SCOTT PATRICK GREEN)

Ce n’est qu’après avoir tourné « 45 ans » et plusieurs épisodes de « Looking » qu’Andrew Haigh est parti pour Portland rencontrer Willy Vlautin. Celui-ci lui a montré quelques lieux du roman, notamment le champ de course. Puis le cinéaste a décidé de suivre la route de Charley et de son cheval : il a traversé l’Oregon, l’Idaho, le Wyoming, l’Utah et le Colorado, s’arrêtant dans de petites villes de l’Oregon comme Tillamook ou Burns, assistant à des courses de chevaux et s’immergeant dans la culture locale. « J’ai dormi dans les motels nommés dans le roman. J’ai reconnu les lieux que Willy Vlautin avait décrits. J’ai aussi campé, mangé du chili en boîte, pris des centaines de photos. Ce serait ridicule de penser que j’ai pu ressentir ce que Charley éprouve au cours de son voyage, mais les trois mois de “road-trip” m’ont au moins donné une idée du monde que Willy décrit dans ses romans. Les paysages que j’ai traversés sont magnifiques, connaitre le pays tout entier prendrait des années mais cette région a une identité, radicalement différente de l’Europe. Et je peux même dire que l’Utah est très différent du Colorado, que Portland n’a rien à voir, socialement et politiquement, avec l’est de l’Oregon. La diversité est prodigieuse. C’était parfois choquant au cours de mon voyage de voir le patriotisme intense des Américains, même quand leur pays les laisse dans des situations économiques insoutenables. Les gens croient au rêve américain, même si très peu parviennent à le vivre. »

Plus d’informations sur le site d’Ad Vitam

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.