Pour l'union civile entre homosexuels : "Le pape mène une politique que je qualifierai de petits pas", commente Frédéric Martel
Ce que le pape "déteste vraiment ce sont ces cardinaux, évêques, archevêques, ultraconservateurs qui refusent les évolutions de la famille alors qu'eux-mêmes ont des comportements hypocrites", affirme le journaliste qui a enquêté sur l'homosexualité au coeur du Vatican.
Dans un documentaire, le pape François s'est prononcé en faveur d'une union civile pour les couples homosexuels. C’est la première fois qu’un pape plaide pour le pacs et les formules apparentées. "Depuis de longues années, le pape mène une politique que je qualifierai de petits pas", a expliqué jeudi 22 octobre sur franceinfo Frédéric Martel, journaliste, écrivain, animateur de Soft Power sur France Culture, auteur de Sodoma, enquête au coeur du Vatican (Robert Laffont).
franceinfo : Que pensez-vous de cette déclaration ?
Depuis de longues années, le pape mène une politique que je qualifierai de petits pas. Déjà en Argentine, il avait laissé faire les unions civiles même s'il était très hostile au mariage gay. Son entourage m'avait confirmé qu'il était lui-même, personnellement, favorable aux unions civiles et il l'avait laissé entendre discrètement.
Lorsqu'il devient pape il engage un dialogue, que je qualifierai de secret, avec Matteo Renzi [chef du gouvernement italien] puisque les réunions avaient lieu la nuit. Il avait passé un deal, je vous laisse faire les unions civiles à condition qu'il n'y ait pas de mariage et d'adoption.
Frédéric Martel, journaliste, écrivainfranceinfo
L'archevêque Vigano estime que les propos du pape sont hérétiques. Est-ce une voix isolée ?
La raison pour laquelle le pape est très prudent sur le sujet c'est parce qu'il a une curie romaine, c'est-à-dire un collège de cardinaux dont certains ont été nommés par Jean-Paul II ou Benoît XVI et dont certains sont très conservateurs. Le collège cardinaliste est très hostile à ces questions, donc le pape est obligé de défendre ce qu'il croit juste à titre personnel et d'être prudent lorsqu'il s'exprime officiellement. L'archevêque Vigano est un ultraconservateur, un homme extrêmement marginalisé. Mais il est clair que beaucoup de cardinaux français, c'est le cas du cardinal Barbarin, de l'archevêque de Paris, sont très hostiles sur ces sujets. Donc, le pape cherche pas à pas à faire évoluer les mentalités mais ça reste difficile.
Le pape cherche-t-il à mettre fin à une hypocrisie ?
Il est absolument clair et on le sait depuis longtemps que l'homosexualité est très présente dans le collège cardinal. On estime qu'une majorité des cardinaux sont homosexuels activement ou même sans avoir d'amant, ils ont une proximité avec d'autres hommes, vivent parfois en couple, parfois juste dans des désirs secrets. Donc, effectivement il y a une hypocrisie et c'est ça que le pape déteste. Au fond, il n'a rien contre les homosexuels, ce qu'il déteste vraiment ce sont ces cardinaux, évêques, archevêques, ultraconservateurs et qui refusent les évolutions de la famille alors qu'eux-mêmes ont des comportements hypocrites.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.