Primaires démocrates aux Etats-Unis : comment Joe Biden a réussi son coup lors du "Super Tuesday"
Après plusieurs défaites, l'ancien vice-président de Barack Obama a fait un retour spectaculaire dans la course à l'investiture démocrate. Même si rien n'est encore joué, cette victoire permet à Joe Biden de s'installer dans un duel avec Bernie Sanders.
Il était donné politiquement mort il y a encore seulement deux semaines. Joe Biden a effectué, mardi 3 mars, lors du "Super Tuesday", un retour fracassant dans la course à l'investiture démocrate. L'ancien vice-président de Barack Obama a devancé son grand rival Bernie Sanders dans neuf Etats : au Texas, en Virginie, en Caroline du Nord, en Alabama, en Oklahoma, dans le Tennessee, en Arkansas, dans le Minnesota et le Massachusetts. Un Grand Chelem dans les Etats du sud du pays.
"Il y a à peine quelques jours, les médias et les commentateurs avaient déclaré la mort de cette candidature", a réagi un Joe Biden remonté à bloc. "Et bien je suis là pour le dire : nous sommes bien vivants", a-t-il ajouté sous les hourras et les applaudissements de ses supporteurs. Donnant un accent personnel à ces résultats, il a dédié ses victoires "à tous ceux qui ont été mis à terre, ignorés, laissés pour compte".
Cette remontée spectaculaire ne signifie pas pour autant que l'affaire est pliée : Bernie Sanders a remporté la Californie qui compte le plus grand nombre de délégués et la primaire n'est pas terminée.
Wednesday's front page: Joe Biden's campaign made a shocking rise from the dead on Super Tuesday, The Post's Michael Goodwin writes https://t.co/mgjfIKkGhA pic.twitter.com/WYs4U9nqh1
— New York Post (@nypost) March 4, 2020
Il a profité de sa bonne dynamique
Après des résultats décevants dans l'Iowa, le New Hampshire et le Nevada, Joe Biden a remporté, samedi 29 février, très largement la primaire en Caroline du Sud avec 48,4% des voix. Un résultat sans appel qui lui a permis de combler partiellement le retard pris sur son adversaire, Bernie Sanders, après les trois premiers scrutins. L'ancien bras droit de Barack Obama était le favori dans cet Etat, où les Noirs, chez qui il est très populaire, représentent plus de la moitié de l'électorat démocrate.
Thank you, South Carolina! To all those who have been knocked down, counted out, and left behind — this is your campaign. Together, we will win this nomination and beat Donald Trump.
— Joe Biden (Text Join to 30330) (@JoeBiden) March 1, 2020
"En Caroline du Sud, Joe Biden a pu compter sur le soutien de James Clyburn, élu démocrate influent à la Chambre des représentants et le soutien de l’électorat noir, important dans cet Etat du sud", rappelle La Croix.
Il a bénéficié d'un calendrier plus favorable
Les Etats du "Super Tuesday" sont tombés à pic pour l'ancien vice-président d'Obama. "Joe Biden, c'est quand même un centriste, assure Nicholas Dungan, membre de l'Atlantic Council et de l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). Les Etats du 'Super Tuesday' sont des Etats plus conservateurs que ceux qui ont déjà voté lors de la primaire."
Bernie Sanders a gagné des Etats très à gauche comme la Californie et le Vermont mais le radicalisme de gauche voire le socialisme de Bernie Sanders n'est pas la tasse de thé de tous les démocrates.
Nicholas Dunganà franceinfo
Effectivement, la remontée spectaculaire de Joe Biden s'explique par la sociologie différente de l'électorat de ce "Super Tuesday". "Joe Biden l'emporte parce qu'on arrive enfin sur un terrain qui lui est plus favorable : les Etats du Sud, où les Afro-Américains représentent une part importante de l'électorat", décrypte Lauric Henneton. Pour ce spécialiste des Etats-Unis, "le récit de l'élection aurait été très différent si les primaires avaient démarré dans l'Alabama ou la Virginie au lieu de l'Iowa et le New Hampshire, des Etats majoritairement blancs".
Il a cartonné chez l'électorat noir
C'est sans doute le point qui explique le mieux la remontée de Joe Biden : sa très grande popularité parmi l'électorat afro-américain. Le candidat démocrate l'avait d'ailleurs martelé pour tenter de dépasser ses deux premiers piteux résultats, début février, dans l'Iowa et le New Hamsphire : "Nous n'avons pas encore entendu les membres les plus engagés du parti démocrate : les Afro-Américains". Puis en Caroline du Sud, après sa première victoire dans cet Etat où les Noirs représentent une majorité des électeurs démocrates, il avait salué le "cœur" du parti démocrate.
"La popularité de Joe Biden auprès des Afro-Américains s'explique de deux façons, analyse Lauric Henneton. Evidemment, parce qu'il est l'ancien vice-président de Barack Obama et donc son successeur. 'Voter Biden, c'est voter pour un troisième mandat d'Obama', comme le dit si bien mon collègue Jean-Eric Branaa [un specialiste de la politique américaine]."
La popularité de Joe Biden s'explique aussi par le fait que l'électorat noir est assez pragmatique et centriste. Joe Biden semble plus rassurant que Bernie Sanders, perçu comme un vote risqué.
Lauric Hennetonà franceinfo
"Joe Biden capitalise sur deux électorats fiables : les Noirs et les plus de 35 ans, qui ont un bon taux de participation", ajoute-t-il.
Il a rassemblé les démocrates modérés
Outre un électorat qui lui est plus favorable, Joe Biden a pu compter sur le ralliement et le soutien de plusieurs figures de la politique américaine. Sa victoire en Caroline du Sud a ainsi déclenché en quelques heures une dynamique extraordinaire, provoquant l'abandon des candidats modérés Pete Buttigieg et Amy Klobuchar. Et leur ralliement derrière sa candidature, avec l'autre ex-candidat Beto O'Rourke, ainsi qu'une cascade d'élus dont l'influence locale peut se montrer décisive.
I’m voting for Joe Biden because he can beat Donald Trump; because having him at the top of the ticket will help our down-ballot candidates, especially in Texas; & because he can bring people together to reach the ambitious goals we have for our country. https://t.co/tdgZOHeBAS
— Beto O'Rourke (@BetoORourke) March 3, 2020
Se posant en rassembleur, il leur a attribué en partie ses bons résultats mardi soir. "Les désistements de Buttigieg et Klobuchar, annoncés juste avant le 'Super Tuesday' ont permis aux électeurs modérés de se reporter sur Biden", commente Lauric Henneton. "C'est une forme de 'vote utile' : l'aile modérée s'est rassemblée derrière un unique candidat et se trouve plus solide face à Bernie Sanders", conclut-il. Dans la foulée du "Super Tuesday", le milliardaire Michael Bloomberg, autre grand modéré, a d'ailleurs annoncé qu'il abandonnait et se ralliait à Joe Biden.
Three months ago, I entered the race to defeat Donald Trump. Today, I'm leaving for the same reason. Defeating Trump starts with uniting behind the candidate with the best shot to do it. It's clear that is my friend and a great American, @JoeBiden. pic.twitter.com/cNJDIQHS75
— Mike Bloomberg (@MikeBloomberg) March 4, 2020
À regarder
-
Kamala Harris reconnaît sa défaite
-
Election américaine : pourquoi un tel raz-de-marée républicain ?
-
Donald Trump encense Elon Musk après avoir déclaré sa victoire
-
Donald Trump revendique "une victoire politique jamais vue"
-
Comment les expatriés américains font pour voter ?
-
La mort de cet écureuil est récupérée par le camp de Donald Trump
-
Peut-on comparer démocrates et républicains à la gauche et la droite française ?
-
Donald Trump imite Emmanuel Macron
-
Présidentielle américaine : l'artiste Bad Bunny soutient Kamala Harris
-
Election américaine : qu'apporte Elon Musk à la campagne de Donald Trump ?
-
Election américaine : quand connaîtra-t-on le nom du prochain président élu ?
-
Maya Harris, plus proche conseillère de Kamala depuis plus de 50 ans
-
Quelle est la position des candidats à la présidentielle américaine sur le conflit au Proche-Orient
-
Aux Etats-Unis, "Superman" appelle les Américains à voter
-
Présidentielle américaine : des cookies Trump et Harris controversés
-
Election américaine : plus de 6 millions de dollars de paris sur le duel Harris-Trump
-
Les célébrités peuvent-elles influencer le scrutin américain ?
-
Pourquoi n'y a-t-il que deux grands partis aux Etats-Unis ?
-
Élection présidentielle aux États-Unis : le business des produits dérivés
-
Election américaine : "I have a Glock", quand Kamala Harris parle de son arme
-
Élection américaine : les démocrates contrôlent-ils la météo ?
-
Un bar à thème présidentiel aux États-Unis
-
La "Bible Trump" bientôt dans les écoles ?
-
Une interview de Melania Trump à 250 000 dollars ?
-
Une statue géante de Donald Trump aux États-Unis
-
Kamala Harris traite Donald Trump de poule mouillée
-
Des singes prédisent le résultat de l'élection américaine
-
Élection américaine : rencontre avec Raymond, électeur de Donald Trump
-
Visée par Donald Trump, la communauté haïtienne de Springfield est devenue la cible de l'extrême droite
-
Une possible tentative d'assassinat visant Donald Trump
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.