Les mormons, une entreprise américaine prospère
Signe caractéristique qui frappe l’observateur, tout mormon doit partir deux ans en mission à l’étranger (dix-huit mois pour les femmes), afin de recruter de nouveaux adeptes. Ils sont ainsi 51.000 à sillonner le monde entier, deux par deux, pour apporter la bonne parole de John Smith (1805-1844). L’homme aurait eu la révélation d’établir une nouvelle religion basée sur la pureté biblique. Une foi foncièrement américaine puisque «la grande mission de l’Amérique est de porter la lumière de la vérité et la démocratie au reste du monde».
Interrogé au début de la campagne sur les rapports entre sa religion et la politique, Mitt Romney a rapidement préféré couper court, n’accordant désormais plus d’interview sur ce thème. Nous «avons souvent été regardés comme des étrangers dans notre propre pays», affirme Doug Anderson, professeur à la Utah State University, qui met l’accent sur les persécutions dont les membres de cette nouvelle église ont été victimes. John Smith a ainsi été assassiné.
Deux milliards de noms dans un coffre
La polygamie, un sujet qui pouvait prêter à controverse, a été abolie en 1890, sauf en ce qui concerne quelques groupes dissidents.
Quant aux recherches de généalogie, autre domaine qui retient souvent l’attention, elles ont pour but de baptiser les disparus afin de pouvoir les sauver. A Salt Lake City, dans l'Utah, la ville du siège de l’église, deux milliards de noms seraient ainsi conservés dans des bases données.
Le festival annuel mormon dans l'état de New York
AFP, le 16 juillet 2012
Afin de pas laisser le chemin libre à l’oisiveté, qui pourrait permettre la «contestation de la société par les enfants », les mormons ont créé toute une série d’activités pour occuper ses membres, quelle que soit leur place dans la famille. Les femmes font partie de sociétés de secours, les enfants bénéficient de cours d‘instruction religieuse, de travaux manuels. Les projets d’entraide sont nombreux.
Les mormons se signalent également par un régime sans excitant, pas d’alcool, de tabac, de thé ou de café et par une alimentation à base de céréales et de fruits.
Sherlock Holmes a vilipendé les Mormons
L’église mormone a cependant des détracteurs. Ceux-ci lui reprochent, entre autres, le fait que jusqu’en 1978, les mormons refusaient d’accorder la prêtrise aux Noirs et aux femmes.
Leur église est prompte à réagir aux critiques qui les touchent. Ainsi, le livre de Sherlock Holmes Une étude en rouge, dans lequel le détective rencontre le docteur Watson et qui présente les mormons sous un mauvais jour, a mis le feu aux poudres. Sur la plainte d’une mère d’élève, l’ouvrage a été banni de la lecture des classes de sixième d’un groupe d’écoles de Virginie, indique le Los Angeles Times.
L'argent et les profits ne sont pas des ennemis
Attendant la venue du Christ aux Etats-Unis, les adeptes de l’Eglise de Jésus-Christ des Saints des derniers jours se retrouvent sans complexe dans le credo de la société américaine : faire de l’argent. «Ils ne font pas de différence entre le spirituel et les choses matérielles. Un bon investissement est un moyen de travailler pour Dieu», explique l’historien Michael Quinn. Arrivés dans l’Utah en 1847, un territoire vierge sous administration mexicaine, ils ont bâti la ville de Salt Lake City.
Les sept millions d’Américains de religion mormone sont fiers de leur réussite financière, dont celle de l’entreprise mormone DMC, qui réalise 1,2 milliard de revenus annuels en investissant notamment dans les médias et les assurances. Quant à J.W.Marriott, ami personnel de Romney, lui aussi mormon, il est propriétaire de la chaîne d’hôtels éponyme.
Les mormons ont également organisé les jeux d’hiver, en 2002, dans leur fief. Cet esprit d’entreprise caractérise l’ancien évêque mormon de Boston, alias Mitt Romney. L’élection américaine a été un bon tremplin pour faire sortir son église de l’obscurité, puis le candidat républicain à la présidence, comme on l’a vu, s’est fait plus discret sur ce thème.
L’irruption sur la scène politique a été conséquente. Outre Romney, un autre gouverneur de l’Utah, mormon, s’est engagé dans les primaires républicaines. Le moyen d’obéir au credo que les membres de l’église «doivent être présents dans l’espace politique pour mettre en place le changement préalable à la venue du fils de Dieu».
Et dans l'Hexagone...
L’Eglise de Jésus-Christ des Saints des derniers jours collabore avec les autres cultes, notamment dans le domaine humanitaire, mais «ils se considèrent comme la seule vraie Eglise du Christ. C’est un problème», affirme sœur Chantal-Marie Sorlin, de la Conférence des Evêques de France.
Leur particularismes, leur mode de fonctionnement les placeraient–ils dans la catégorie des sectes ? Rien de la sorte n’a été prouvé. En France, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) n'a pas classé cette église comme telle dans le rapport parlementaire sur le sujet. Toutefois, d’anciens membres de l’église mormone ont fait état de pressions auprès du Centre d'accueil, d'étude et de documentation sur les mouvements sectaires (Unadfi ).
Quoi qu’il en soit, l’église dispose d’un véritable trésor de guerre évalué à trente milliards de dollars.
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