L’affaire Polanski n’est pas oubliée par la justice américaine
Si le réalisateur du Pianiste (Oscar du meilleur réalisateur en 2003) est considéré en Europe comme l'un des plus grands cinéastes du XXe siècle, aux États-Unis, sa réputation reste durablement entachée par une affaire de mœurs.
Là bas, le ministère public devrait s'opposer à la révision du procès vieux de 30 ans dans lequel Polanski est accusé d'avoir abusé d'une mineure de 13 ans.
Les faits datent du 10 mars 1977. A l'issue d'une séance de photos qu'il réalisait pour un magazine dans la demeure de Jack Nicholson à Hollywood, Polanski avait eu des relations sexuelles avec son modèle, une adolescente de 13 ans, à qui il avait fait consommer de l'alcool et un psychotrope.
Interpellé le lendemain par la police, le réalisateur alors âgé de 43 ans avait exprimé sa stupeur.
Risquant en théorie 50 ans de prison, le metteur en scène de "Chinatown" avait scellé un marché avec le parquet et plaidé coupable d'un seul de six chefs d'inculpation, procédure courante aux Etats-Unis qui évite un procès et ouvre la voie à une condamnation directe.
L'affaire a néanmoins provoqué un déchaînement médiatique contre le cinéaste, devenu "prédateur" huit ans après avoir été victime d'un crime, le meurtre barbare de son épouse enceinte Sharon Tate par les adeptes de Charles Manson.
Condamné à une "évaluation" de trois mois dans une prison californienne, Polanski y avait passé 47 jours. Le 31 janvier 1978, au lendemain d'une réunion entre ses avocats et le magistrat lors de laquelle ce dernier avait laissé entendre qu'il allait le renvoyer sous les verrous, Roman Polanski avait pris un avion pour Londres, puis la France.
Trente ans plus tard, il est toujours considéré comme un "criminel en fuite" par la justice californienne. Il n'est jamais retourné aux Etats-Unis, ce qui l'a empêché de recevoir en personne son Oscar du meilleur réalisateur pour "Le Pianiste" en 2003.
Pourtant, celle qui n’était qu’une jeune fille lorsqu’elle a été abusée par le cinéaste affirme qu'elle n'a jamais voulu l’envoyer en prison.
Elle a déposé auprès du procureur de district du comté de Los Angeles une requête en extinction visant les charges qui pèsent encore aux Etats-Unis contre Polanski. Voulant tourner la page, elle estime que la remise sur la sellette de cette affaire pourrait à l'avenir la traumatiser. Mariée et mère de famille, Samantha Geimer, 45 ans, indique que l'insistance du parquet à vouloir que le réalisateur soit
physiquement présent pour négocier l'extinction de l'affaire est "une blague, une blague cruelle dont(elle) est victime''. Selon elle, les procureurs font état de détails explicites à connotation sexuelle la concernant afin de masquer les errements dans l'enquête menée il y a 31 ans. Des errements mis à jour dans le documentaire "Roman Polanski: Wanted and Desired'', qui ont poussé l'avocat du réalisateur à entamer une procédure visant à l'extinction des poursuites contre son client.
Roman Polanski, âgé de 75 ans, vit à Paris, mais voudrait retourner aux Etats-Unis.
Il a demandé une révision du procès de 1977 qui l'a contraint à quitter le pays.
Une audience est prévue aujourd'hui au tribunal de Los Angeles. Roman Polanski, 75 ans, y est attendu en personne au risque de se faire arrêter sur place.
Jamila Zeghoudi avec agences
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