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Etats-Unis : libération d’un «Black Panther» détenu depuis 40 ans

Un ancien militant du parti Black Panther, Herman Wallace, souffrant d'un cancer en phase terminale, a été remis en liberté le 1er octobre sur décision de justice, après plus de 40 ans d'enfermement à l'isolement pour le meurtre d'un Blanc qu'il a toujours nié.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Trois hommes condamnés à l'isolement. Au total, pendant 100 ans. (http://www.angola3.org)

Condamné dans le cadre d'une lutte politique, Herman Wallace a finalement obtenu la liberté grâce à la décision d’un juge fédéral. Le juge Brian Jackson a en effet ordonné «la libération immédiate de M.(Herman) Wallace», 72 ans, et annulé sa condamnation à la prison à vie, prononcée en janvier 1974, en pointant des irrégularités dans la sélection du jury, mais sans se prononcer sur le fond de l'affaire, selon le jugement.

Black Panther Party

«Il ya 41 ans, au fond de la Louisiane rurale, trois jeunes hommes noirs ont été réduits au silence pour avoir tenté de montrer la poursuite de la ségrégation, la corruption systématique et la violence horrible dans la plus grande prison des Etats-Unis, une ancienne plantation de 18.000 hectares appelée Angola. Manifestations pacifiques et non-violentes sous la forme de grèves de la faim organisées par les détenus ont attiré l'attention des dirigeants élus de la Louisiane et les médias locaux au début des années 1970», explique le site qui défend M.Wallace et ses co-détenus.

Les détenus «ont rapidement appelé à des enquêtes sur une foule de pratiques inconstitutionnelles et extraordinairement inhumaines banales dans ce qui était alors la "prison sanglante du Sud".», ajoute le site.

Pour les défenseurs de Wallace, les responsables de la prison ont alors commencé à punir les détenus qu'ils considéraient comme des fauteurs de troubles et c'est ainsi, selon eux, que Herman Wallace, Albert Woodfox et Robert King ont été accusés d'un meurtre qu'ils n'ont pas commis et jetés dans des cellules d'isolement.

La lutte de ces détenus, qui se revendiquaient du Black Panther Party, s'inscrivait dans les combats contre le racisme. Le Black Panther Party était un mouvement américain né à la fin des années 60 aux Etats-Unis en pleine période de la lutte contre la ségrégation raciale. Alors que la violence contre les militants pour l’égalité se développait, violence symbolisée par l’assassinat de Martin Luther King en 1968, le BPP cultivait une vision plus radicale et violente de la lutte anti raciste. Le mouvement s’était attiré les foudres du FBI. Edgar Hoover, le patron du FBI qualifiait d’ailleurs le BPP de «menace la plus sérieuse à la sécurité interne du pays». Une intense répression s’abattit sur le mouvement faisant plusieurs victimes, puis le mouvement perdit de l’importance en raison de divergences internes, malgré la médiatisation de certains leaders comme Angela Davis.

Herman Wallace en prison, photo, non datée, fournie par son comité de soutien. (HERMAN'S HOUSE / AFP)

«Torture physique et morale»
Aujourd'hui libéré, Wallace était l'un des «trois d'Angola», du nom de la prison d'Angola en Louisiane, réputée pour son passé raciste et baptisée ainsi car elle fut construite sur une ancienne plantation où les esclaves venaient de ce pays d'Afrique australe. Ces trois prisonniers ont attiré l'attention internationale après avoir passé à eux trois plus d'un siècle à l'isolement.

Quarante ans après les faits, le juge Jackson a critiqué sa «condamnation et la peine, en raison de l'exclusion systématique de femmes dans le grand jury qui l'avait reconnu coupable, en violation du 14e amendement de la Constitution qui garantit l'égalité devant la loi» et a estimé que le détenu «a passé plus de 40 ans en prison pour une condamnation basée sur une inculpation anticonstitutionnelle».
 
Amnesty International s'est félicitée de ce jugement, regrettant qu'il intervienne «alors qu'Herman meurt du cancer avec seulement quelques jours ou heures à vivre».
«Aucun jugement ne pourra effacer les conditions de prison cruelles, inhumaines et dégradantes qu'il a endurées», a déclaré Steven Hawkins, directeur d'Amnesty USA.
 
Amnesty parlait à propos des détenus d’Angola de «torture physique et morale» en raison de la détention en isolement de 1972 à 2008.

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