"Je voulais un bon coup de balai après 20 ans d'Erdogan au pouvoir": à Berlin, l'incompréhension dans la communauté turque à l'issue du premier tour
Sur l'écran télé de ce restaurant turc, lundi 15 mai, les images du scrutin défilent en boucle avec les scores des candidats à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle en Turquie. Selon les résultats définitifs, le président sortant Recep Tayip Erdogan a obtenu 49,51% des suffrages, contre 44,88% pour son son rival social-démocrate, Kemal Kiliçdaroglu. Un deuxième tour départagera les deux candidats le 28 mai.
Bülent regarde avec déception la chaîne d'information, en terminant son sandwich. "Je voulais un bon coup de balai après 20 ans d'Erdogan au pouvoir", confie cet artisan de 45 ans. Il nourrissait "cet espoir" mais le résultat du premier tour de la présidentielle n'est selon lui, "pas vraiment une surprise" car "le gouvernement actuel est dominant, très puissant, contrairement à l'opposition".
"Dans les petites villes et les villages, les gens l'aiment. Ils ne jurent que par lui et pas par un autre."
Bülent, un ressortissant turc à Berlinfranceinfo
Le gouvernement d'Erdogan "a construit des routes et des ponts, on en a besoin mais ça ne fait pas tout", poursuit Bülent.
>>> Présidentielle en Turquie : quel bilan pour Recep Tayyip Erdogan après vingt ans au pouvoir ?
En 2018, les Turcs de Berlin avaient voté à 51% pour Recep Tayip Erdogan, beaucoup moins que les 65% recueillis par le président sortant en Allemagne. À Kreuzberg, le quartier turc de la capitale, Ahmet, 40 ans, gère un magasin de reprographie. Le commerçant a du mal à comprendre le résultat. "Après le tremblement de terre, je pensais qu'il allait perdre à cause de tous les problèmes économiques et de la mauvaise gestion du séisme. Il aurait dû perdre cette élection".
"Depuis deux ans, l'inflation est incroyable, les pauvres sont de plus en plus pauvres et les gens votent encore pour lui ... C'est à cause du nationalisme et de la religion, il se sert encore de ça."
Ahmet, un ressortissant turc vivant à Berlinfranceinfo
Arin partage cette analyse. Elle estime que Recep Tayip Erdogan se pose en défenseur de l'islam pour se maintenir au pouvoir. La jeune femme croisée près de la Kottbusser Tor, accuse aussi le président sortant de fraudes. "Il a manipulé le scrutin pour pouvoir continuer à diriger. Il y a eu beaucoup de problèmes. Certaines personnes n'ont pas pu aller voter, les bulletins ne sont pas comptés correctement et tous les médias sont dans son camp. C'est comme ça depuis dix ans, tout le monde le sait. C'est tout un système qu'il a mis en place." Les Turcs d'Allemagne sont donc appelés à revoter pour un deuxième tour inédit, mais beaucoup croisés dans les rues de Berlin, estiment qu'il est joué d'avance.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.