Turquie : le port du voile autorisé dans l'administration
Les femmes pourront désormais venir travailler voilées dans l'administration turque, et les hommes pourront y porter la barbe.
Cette mesure, présentée le 30 septembre dernier par Recep Tayyip Erdogan, fait partie d'un train de réformes qui élargit les droits des minorités en général. Elle est officiellement entrée en vigueur mardi matin, après sa publication dans le journal officiel, dans le cadre d'un nouveau règlement vestimentaire pour les fonctionnaires.
Le voile intégral reste interdit
Déjà autorisé aux étudiantes sur le campus, le port du voile sera désormais accepté pour les professeurs, les agents du public, ainsi que pour les députés. L'interdiction reste toutefois en vigueur pour les policiers, les militaires, et les procureurs ou juges.
Toutefois, l'AKP (le parti de la justice et du développement), a indiqué que les femmes en uniforme pourraient sans doute bénéficier de ce "droit" si les institutions pour lesquelles elles travaillent leur donnent le feu vert. A noter que la nouvelle autorisation ne s'applique pas au port du voile intégral : les fonctionnaires femmes seront obligées d'avoir le visage découvert.
Un des engagements de l'AKP
Depuis son arrivée au pouvoir, en 2002, l'AKP a fait de la levée de l'interdiction du foulard islamique dans la fonction publique un de ses engagements le plus fort. Le Parti de la justice et du développement parvient ainsi à mettre fin à une interdiction apparue avec la ligne des principes laïcs voulus par le fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Atatürk.
Recep Tayyip Erdogan, le Prermier ministre, en avait fait le symbole d'une Turquie à la laïcité modérée, assumant son identité musulmane sans renier totalement ses principes laïques. La fille et l'épouse du chef du gouvernement sont voilées, à l'instar des cadres féminines de sa formation.
L'opposition dénonce l'évolution de la Turquie
L'opposition turque a dénoncé cette mesure, estimant qu'elle constitue une nouvelle brèche dans le symbole de la Turquie laïque. Il est vrai que les choses ont bien changé depuis 1999, lorsque Merve Kavakçi, une députée turco-américaine élue sous les couleurs d'un parti islamiste, s'était présentée à l'Assemblée coiffée du voile pour prêter serment. Elle avait dû quitter l'hémicycle sous les huées, avant d'être déchue de sa nationalité turque.
"C'est un sérieux coup à la République nationale et séculaire ", a martelé la députée Ayman Güler, membre du principal parti d'opposition pro-laïque, le Parti républicain du peuple (CHP).
D'autant que cette mesure arrive dans un contexte très particulier. Elle intervient à six mois des municipales de mars 2014, et surtout, quelques mois après le grand mouvement populaire de la place Taksim, dont une des revendications principales était de dénoncer la dérive islamiste du gouvernement, après une réforme restreignant la consommation et la vente d'alcool.
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