Turquie : la révolte face au pouvoir s'étend dans le pays
Pas question de s'en aller. Les milliers de manifestants, rassemblés depuis trois jours sur la place Taksim, le coeur battant d'Istanbul, semblent décidés à aller jusqu'au bout.
Au départ pourtant, le motif des manifestations, la destruction de centaines d'arbres du parc Gezi pour ériger un immeuble, semblait bien dérisoire. Mais désormais, les jeunes manifestants réclament ni plus ni moins que le départ du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan. Un dirigeant accusé d'islamiser la société turque depuis son arrivée au pouvoir il y a une dizaine d'années, et qui a reconnu ce week-end que la réponse policière avait été trop brutale envers les jeunes gens sortis crier leur colère dans les rues.
Victoire, puis affrontements
Samedi et dimanche, les étudiants et militants de gauche - la majorité des manifestants présents sur la place Taksim - ont fêté une première victoire, le retrait des forces de l'ordre demandé par le Premier ministre. Mais dimanche soir, après une journée passée dans le calme et une ambiance bon enfant, des incidents ont à nouveau éclaté, alors que les manifestants tentaient d'accéder aux bureaux du Premier ministre.
Dans le viseur, les policiers et l'usage massif de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants. Même le chef de l'État turc, Abdullah Gül, a jugé dimanche "inquiétant" le niveau de la confrontation.
Les jeunes manifestants ont également fait de Twitter un moyen de partager leur révolte, via le hashtag ou #OccupyGezi sur le modèle des Indignés à travers le monde.
Parallèlement, quelque 3.000 personnes ont défilé lundi à Istanbul pour dénoncer la partialité des médias turcs. Certains ne couvrent carrément pas le mouvement de contestation, comme la chaîne d'informations en continu NTV, devant laquelle les manifestants se sont rassemblés à la mi-journée.
Ankara, l'autre foyer de la révolte
Il n'y a pas qu'à Istanbul que la colère gronde. Dimanche, c'est même à Ankara que les violences ont été le plus ressenties. Les manifestants ont été brutalement délogés de la place Kizilay, centre névralgique de la révolte citoyenne, à coups de tirs de gaz lacrymogènes et de canons à eau. Les policiers ont également empêché les manifestants d'accéder aux bureaux du Premier ministre. Lundi, la police a de nouveau délogé les manifestants de la place Kizilay, à grand renfort de gaz lacrymogènes tirés sur la foule.
Des manifestations ont également eu lieu dans d'autres provinces de Turquie, comme à Izmir, Adana ou encore Gaziantep. Pas moins de 235 manifestations auraient été recensées dans 67 villes du pays depuis mardi dernier.
Difficile pour l'instant d'établir un bilan fiable de ces incidents : médecins, ONG et pouvoir se démentent tous les uns les autres. Une certitude : les blessés se comptent par centaines. Mais pour l'instant, Recep Tayyip Erdogan veut encore donner l'image d'un Premier ministre inflexible, refusant de céder à la rue ; pour en donner la preuve, il est parti comme si de rien n'était lundi matin pour une tournée de quatre jours au Maghreb.
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