"S'habituer à la menace terroriste", cela veut dire quoi ?
Après les attaques au Danemark, Manuel Valls a rappelé que le risque restait élevé en France, et qu'il fallait désormais apprendre "à vivre avec".
Désormais, prendre en compte la menace doit faire partie de notre quotidien. C'est en substance le message lancé par Manuel Valls au lendemain des attaques terroristes à Copenhague (Danemark). "Il faut dire la vérité aux Français. (...) Il faut s'habituer à vivre avec", a rappelé le Premier ministre, sur RTL, lundi 16 février. Il a également assuré que le plan Vigipirate serait prolongé "autant que nécessaire, tant que la menace reste élevée".
Angoisse, alertes à la bombe, présences policière et militaire accrues... Depuis le 7 janvier, et l'attaque de Charlie Hebdo, nos habitudes ont déjà été profondément bouleversées. Mais elles devraient l'être pour longtemps au vu des moyens engagés et confirmés par Manuel Valls.
Plus d'angoisse
C'est sans doute la notion la plus compliquée à repérer et à quantifier. Ces attentats, et les menaces qui pèsent désormais sur la France, ont "de quoi susciter l'émotion, l'indignation, la colère chez beaucoup, mais aussi la peur et l'anxiété pour certains d'entre nous", explique à L'Express Laurie Hawkes, psychologue clinicienne auteure de La peur de l'autre (Eyrolles).
Une tendance vérifiée par Le Parisien auprès de SOS Amitié. Même si aucune statistique n'a été réalisée, les bénévoles constatent que les coups de téléphone sont plus nombreux depuis le début de l'année, et que l'angoisse est croissante. "On est comme sur une île avec la marée qui monte", explique au quotidien Marie-José Cronel, qui assure la communication de l'antenne d'Ile-de-France. "Les attentats ont beaucoup amplifié ce sentiment. Des chocs comme Charlie, ça crée des fissures".
Plus de moyens humains
C'est le premier changement visible et palpable depuis les attentats : des milliers de militaires dans les rues des grandes villes, les gares, ou devant des lieux dits "sensibles". Mobilisées dans le cadre du plan Vigipirate, rebaptisé Sentinelle, ces forces ont connu leurs premières relèves le week-end dernier à Paris. Des bus entiers de soldats en provenance de Vannes (Morbihan), et qui doivent remplacer ceux déployés après les attentats des 7, 8 et 9 janvier. Au total, l’effectif a atteint 10 412 hommes le 15 janvier, selon les tableaux de l’état-major opérationnel de l’armée de terre, consultés par Le Monde. Des troupes qui protègent 830 "sites sensibles" en France dont 310, principalement juifs, en Ile-de-France.
Un dispositif exceptionnel, mais qui n'est prévu initialement que sur une très courte durée. Un plan d'adaptation est donc à l'étude, et pourrait faire diminuer l’effectif militaire par paliers, pour le faire passer à 7 500 hommes, puis 3 000. Il verrait également les méthodes de surveillance évoluer, avec davantage de patrouilles mobiles, plutôt que fixes aujourd'hui.
Les policiers, eux aussi en première ligne, sont fortement sollicités. Le niveau d’alerte actuel "demande une mobilisation et un investissement au quotidien, et cela entraîne une fatigue physique et morale pour les personnels. Il y a une suppression des congés, qui entraîne des heures supplémentaires, des reports de mission, de stage, et cela aura un impact sur la pénibilité du métier et sur la délinquance," explique à France Info Christophe Rouget, commandant de police membre du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure.
Plus de moyens financiers
Une telle mobilisation a un coût, estimé à un million d’euros par jour, selon les informations du Monde. Il comprend l’indemnité de service accordée aux soldats, et les frais de fonctionnement liés à leur déploiement. Des dépenses qui n'ont pas été budgétisées dans le Livre blanc de la Défense, et qu'il faudra donc compenser dans d'autres secteurs. Ainsi, pour tenir, l’armée de terre devra sans doute procéder à des arbitrages, différer des entraînements, des formations, voire prélever des hommes sur d’autres missions.
Plus d'alertes... et de retards dans les transports
Ceux qui ont pris les transports depuis le 7 janvier ont sans doute entendu les messages appelant à alerter en cas de colis suspect. Cette vigilance accrue des passagers entraîne une dizaine de paquets signalés chaque jour, dans les transports en commun à Paris, contre un tous les trois jours en moyenne avant les attentats, détaille la RATP à francetv info.
Le constat est la même sur le réseau SNCF. Des signalements qui ont des conséquences sur le trafic, puisqu'à chaque fois, il faut évacuer la zone concernée avant l'intervention des démineurs, bloquant ainsi la circulation en moyenne une heure, explique la RATP.
Plus de coups de filet médiatisés
Les attaques des frères Kouachi et d'Amedy Coulibaly, ainsi que leurs parcours, ont montré les failles des renseignements français. Si jusqu'ici les attentats déjoués étaient gardés sous silence, les autorités françaises multiplient et communiquent, ces dernières semaines, sur les coups de filet dans des filières jihadistes, comme à Albi, Toulouse, Lyon, Paris ou encore Lunel.
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