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"Quand ça tire, on est ravis de les entendre arriver" : le 5e régiment d'hélicoptères de combat de Pau, une unité d'élite endeuillée au Mali

Sur les treize militaires qui ont perdu la vie lundi soir dans un accident d'hélicoptères, sept venaient de ce régiment d'élite des Pyrénées-Atlantiques

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le 5e régiment d'hélicoptères de combat de Pau (Pyrénées-Atlantiques) lors d'une visite de la ministre des Armées, Florence Parly, le 13 juin 2019. (MAXPPP)

"Tous les pros déployés un jour en Opex [opération extérieure] ont un jour ou l'autre eu affaire à eux, raconte Charles*, un militaire lui-même en mission à l'étranger actuellement. Ces garçons sont unanimement appréciés partout où ils passent et plus d'un blessé leur doit la vie". Ces "garçons", ce sont les militaires du 5e régiment d'hélicoptères de combat (RHC) basé à Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques. Ces hommes ont perdu sept des leurs, lundi 25 novembre, lors d'une mission dans le cadre de l'opération Barkhane au Mali. Au total, ce sont treize militaires qui sont morts lors d'une collision entre deux hélicoptères, dans la région de Ménaka, dans l'Est du Mali, près de la frontière avec le Niger.

"C'est une terrible nouvelle, c'est un grand moment d'émotion. Lorsque l'on voit 'Mali' et 'hélicoptères', on pense forcément à Pau, soupire Laurence Farreng, eurodéputée MoDem des Pyrénées-Atlantiques et ex-directrice de la communication de la mairie de Pau. "Créé en 1977 à Pau, le 5e RHC est présent depuis sa création sur tous les théâtres où les forces françaises ont été engagées", rapporte France 3 Nouvelle-Aquitaine. Selon nos confrères, le régiment s'est illustré en Afghanistan en 2008 lors de l'opération Pamir, avant de participer en 2011 à des opérations en Libye, puis, en 2014, en rejoignant les troupes au Sahel, lors des opérations Serval, Barkhane (Mali) et Sangaris (Centrafrique).

Des missions à haut risque

"Ce sont des hommes hors du commun, assure de son côté Frédérique Espagnac, sénatrice socialiste des Pyrénées-Atlantiques. Ils sont d'une technicité et d'une condition physique exceptionnelles, ce sont des forces d'élite." Leurs missions, détaillées sur le site de l'armée de terre, sont nombreuses : "Renseignement et manœuvre terrestre dans un cadre d'aérocombat interarmes", "missions de reconnaissance, d'escorte et de destruction d'objectifs ennemis", "transport des troupes et de matériel, évacuation sanitaire" et "actions de secours aux populations". Plus de 90 appareils composent leur flotte, ce qui en fait l'une des plus grandes bases aéronautiques d'Europe, selon France 3.

Charles connaît bien ce régiment qu'il a cotôyé en Opex. "Ce sont des chics types, très pros, des volants de l'armée de terre (...). Le 5 – c'est comme cela qu'on dit – est de tous les coups durs au profit des militaires français déployés en Opex", assure-t-il. Et le militaire de poursuivre : "Ses équipages servent sur la totalité des coins les plus pourris là où, en général, ça tire. Leur mission consiste à appuyer les troupes au sol par le feu de soutien et de déposer au plus près du combat les militaires engagés." Une mission à haut risque, explique Charles : "Cela impose une maîtrise totale de leur matériel, qui présente pourtant des signes de vétusté car il n'y a plus un rond pour l'entretien et ces mecs embarquent tout de même dans leurs machines en souriant."

Faut avoir une sacrée paire de burnes pour voler sur des appareils hors d'âge et employés H24 sans parachute, pour aller au contact au plus près de l'ennemi pour extraire ou infiltrer, poser ou récupérer, alimenter ou ravitailler. Et, quand ça tire, nous autres, au sol, on est ravis de les entendre arriver.

Charles, militaire

à franceinfo

"Ce sont des héros", assure encore Charles, qui y voit "un coup très dur pour le 5, qui perd des gens confirmés". Sylvain*, qui a quitté l'armée il y a une dizaine d'années, a lui aussi servi aux côtés du 5e RHC. Il salue "des gens d'exception" qui font partie d'"un très bon régiment", "opérationnel, comme on dit". 

Un régiment très implanté localement

L'émotion est aussi très grande à Pau et aux alentours. "Treize militaires ont donné leur vie cette nuit. Sept étaient de Pau, a écrit sur Twitter François Bayrou, le maire de la ville. Pour tout notre pays, ce sont de vrais héros dans le sacrifice. Pour notre ville, pour nous, ce sont nos enfants si précieux".  

Un rassemblement est prévu mardi soir devant l'hôtel de ville. "Nous avons besoin de partager notre immense chagrin et notre immense reconnaissance pour ceux qui ont donné leur vie", souligne le président du MoDem. Eric Castet, le maire d'Uzein, petite commune sur laquelle est implanté le régiment, sera présent à Pau. "Les militaires font partie de notre vie, nous avons pas mal d'habitants qui sont au 5, et lorsque les militaires partent pour des missions de six mois, il y a beaucoup d'émotion dans les familles", explique-t-il. 

"C'est un régiment, composé de pratiquement mille personnes, très implanté dans la vie de la communauté, assure également Laurence Farreng. On les cotoie en permanence, notamment lors des commémorations." 

Pau est très fier de ses militaires et de ses bases prestigieuses. Il y a un lien très affectif entre la population et les militaires.

Laurence Farreng, eurodéputée

à franceinfo

Frédérique Espagnac ne dit pas autre chose : "Ils font la fierté du territoire, les familles sont parties intégrantes de la vie de la cité, même s'il y a une discrétion totale car on respecte la confidentialité de leur mission." Ce ne sont pas les premières pertes du régiment en opération extérieure, loin de là. Mais cette fois, "le bilan est très lourd. Sept sur treize, cela fait beaucoup", conclut la sénatrice.

* Les prénoms ont été modifiés pour préserver l'identité des personnes interrogées

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