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Syrie : les milices pro-Assad supplétives d’une armée syrienne affaiblie

S’appuyer sur une Force nationale de défense. C’est ainsi que le régime de Bachar al-Assad continue d'asseoir son pouvoir. But : compenser sur le terrain une armée affaiblie. Mais qui sont en 2015 ces milliers de combattants organisés en milices dans une sorte de «coalition» hétéroclite pro-Assad ?
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le corps d'un milicien pro-gouvernemental, tué dans la ville d'Alep, dans le nord de la Syrie, le 27 février 2014. (AFP PHOTO / ALEP MEDIA CENTRE / TAMER AL-HALABI)

Evoquant la crise en Syrie, Carnegie revient sur la domination d’Assad sur l’axe Damas-Homs-Alep, dans les villes côtières, à Hama, au Sud et dans certaines localités du Nord, où il reste «l’acteur central d’une région économiquement viable, englobant au moins les deux-tiers de la population du pays». Comment? Grâce notamment aux milices qui occupent le terrain alors que l’armée régulière est en perte de vitesse (passée de 220.000 hommes à 150.000, en quatre ans de guerre, selon une estimation mi-2013 de l’Institut international des études stratégiques).
 
Depuis le début du conflit en 2011, les comités populaires «spontanés ou recrutés par les services syriens de renseignement ou des hommes d'affaires pro-Assad» se sont (ou ont été) armés en même temps que l'opposition se militarisait. Le régime a pu acheter «l’allégeance de jeunes chômeurs, en leurs distribuant des armes, des voitures et en mettant en sécurité ces loyalistes et leurs familles», précise Carnegie. Ces groupes de défense civile servaient le régime bien avant la guerre, comme l’a montré en 2012 Fabrice Balanche dans atlantico.
 
Une grande autonomie pour des intérêts divergents
Depuis 2013, ils opèrent majoritairement sous la bannière des Forces de défense nationale, fusion des comités populaires et des groupes armés pro-gouvernementaux. Composées essentiellement de Syriens, ces milices (au sens large) disposent d’une grande autonomie et leur fonctionnement varie d’une province à l’autre en fonction de leurs intérêts. 
 
Carnegie en dresse une liste non-exhaustive : Kurdes, groupes religieux alaouites, druzes, ou chrétiens (ces minorités autrefois protégées se sentent menacées par les groupes islamistes), tribus sunnites (à l’est), bataillon Baas (branche armée du parti au pouvoir, organisée au niveau national et très active à Alep, Damas, Lattaquié, Tartous…). Mais aussi brigades Jérusalem (Alep, composées de Palestiniens du camp de réfugiés de Neirab), membres du Front Populaire pour la Libération de la Palestine-Commandement général, alliés à Damas à d’autres groupes palestiniens (al-Saiqa, branche du parti Baas ; Fatah al-Intifada, groupe dissident du Fatah de Yasser Arafat), ou encore Résistance syrienne (active à Lattaquié et fondée par un Turc, Ali Kayali).

Soldats syriens et combattants du Hezbollah arrêtés près d'Alep par un groupe d'opposition, le 19 février 2015. (Mustafa Sultan / Agence Anadolu)

Après 2013, des combattants étrangers chiites formés et soutenus par l'Iran (ils seraient quelques entre 50.000 et 100.000) sont venus grossir les rangs de ces milices, financées également pour certaines par la République islamique : combattants yéménite houthis, selon Orient XXI,  Hezbollah libanais, factions irakiennes (10.000), «y compris l'Organisation Badr, qui contrôle actuellement le ministère irakien de l'Intérieur et règne sur une grande partie de l'appareil de sécurité intérieure de l'Irak, ainsi que la Asaib Ahl al-Haqq, un groupe dissident de chiites dirigé par l'imam irakien Moqtada al-Sadr», selon le site.
 
Il y aurait environ un millier de chefs de milices, qui comptent également d’anciens rebelles anti-Assad (retournés) ou des criminels de divers horizons (une vidéo mise en lien par Orient XXI montre des membres de Surenos, un gang californien). Par comparaison, il y aurait quelque 1200 groupes de rebelles en Syrie.
 
On le voit, Bachar al-Assad jouit encore de larges appuis qui lui permettent de tenir. Et dans une période où on parle plus des exactions commises par Daech que par le régime, il n’en reste pas moins que «les forces gouvernementales syriennes et les milices pro-Assad sont pourtant cent fois plus meurtrières : elles ont tué 125.000 civils depuis mars 2011», précise Libération.

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